Quand une foule immense envahit les rues d’une capitale, brandissant des drapeaux et des pancartes, on sent que quelque chose de profond se joue. Ce dimanche, à Rabat, des dizaines de milliers de Marocains ont marché, unis par un cri commun : la situation à Gaza est insoutenable. Mais au-delà de la solidarité avec les Palestiniens, c’est aussi un rejet clair de la normalisation des relations entre le Maroc et Israël qui s’exprime. Pourquoi ce mouvement prend-il une telle ampleur ? J’ai plongé dans cette mobilisation pour comprendre ce qui pousse tant de gens à descendre dans la rue.
Une mobilisation massive à Rabat
Ce n’est pas tous les jours qu’une capitale voit défiler autant de monde pour une cause internationale. À Rabat, l’avenue principale s’est transformée en un océan de drapeaux palestiniens, de pancartes et de slogans. Les organisateurs, une coalition regroupant des mouvements islamistes comme Al Adl Wal Ihssane et des partis de gauche, ont réussi à mobiliser des foules impressionnantes. Ce qui m’a frappé, en observant ces images, c’est l’énergie brute qui se dégage : des jeunes, des familles, des militants de tous horizons, tous unis pour dénoncer ce qu’ils appellent une catastrophe humanitaire.
La situation à Gaza est un cri d’alarme pour l’humanité entière. On ne peut pas rester silencieux face à tant de souffrance.
– Un manifestant anonyme
Les pancartes portées par la foule disaient tout : « Levez le blocus », « Maroc, Palestine, un seul peuple », « Non à la normalisation ». Ces mots résonnent comme un refus de l’inaction face à un conflit qui dure depuis trop longtemps. Mais qu’est-ce qui rend cette mobilisation si particulière ? Pour le comprendre, il faut plonger dans les raisons profondes de cette colère.
Gaza : une crise humanitaire qui choque
Depuis plus de 21 mois, la bande de Gaza vit sous un blocus israélien qui asphyxie ses deux millions d’habitants. Les chiffres sont glaçants : selon des rapports internationaux, la population est au bord de la famine. Les bombardements, déclenchés après une attaque du Hamas en octobre 2023, ont laissé des milliers de morts et des infrastructures en ruines. Ce n’est pas juste une statistique, c’est une réalité qui bouleverse. Comment rester indifférent quand des enfants n’ont plus accès à l’eau potable ou à des soins médicaux ?
Pour beaucoup de Marocains, cette situation est perçue comme un nettoyage ethnique. Ce terme, utilisé par certains manifestants, est fort, mais il reflète une conviction profonde : ce qui se passe à Gaza n’est pas seulement une guerre, c’est une tentative d’effacer un peuple. Une jeune femme dans la foule a résumé ce sentiment avec force :
Ma présence ici, c’est pour amplifier la voix des Palestiniens. Ils sont affamés, tués, sous les yeux du monde entier.
– Une étudiante à Rabat
Ce qui rend cette crise encore plus insupportable, c’est le sentiment d’impuissance. Les Nations unies ont dénoncé l’utilisation de la nourriture comme une arme de guerre, mais les résolutions internationales semblent rester lettre morte. À Rabat, les manifestants ne se contentent pas de dénoncer : ils exigent des actions concrètes, comme la levée immédiate du blocus.
La normalisation avec Israël : un sujet brûlant
Si la crise à Gaza est au cœur des revendications, un autre sujet cristallise la colère : la normalisation des relations entre le Maroc et Israël, officialisée en décembre 2020. Pour beaucoup, cet accord est une trahison des valeurs de solidarité avec la Palestine, un pilier de l’identité marocaine. Les slogans comme « Non à la normalisation » ne sont pas nouveaux, mais ils prennent une résonance particulière aujourd’hui.
Pourquoi cette normalisation pose-t-elle problème ? Pour les manifestants, elle légitime un État qu’ils accusent de commettre des injustices à Gaza. D’un côté, le Maroc a officiellement appelé à l’arrêt de la guerre à Gaza, mais sans remettre en question cet accord diplomatique. Cette position ambivalente alimente le mécontentement. Comme me l’a confié un ami marocain, « on ne peut pas serrer la main de quelqu’un qui opprime nos frères ».
- La normalisation, actée en 2020, inclut des accords économiques et militaires.
- Elle est perçue par beaucoup comme un abandon de la cause palestinienne.
- Les manifestations demandent son abrogation pure et simple.
Ce débat n’est pas seulement politique, il est aussi profondément émotionnel. Pour beaucoup, il touche à l’identité même du Maroc, un pays qui a toujours affiché son soutien à la Palestine. Cette fracture entre la diplomatie officielle et la voix de la rue est l’un des moteurs de la mobilisation.
Une coalition hétéroclite mais unie
Ce qui m’a surpris dans cette manifestation, c’est la diversité des participants. Des islamistes aux militants de gauche, en passant par des citoyens lambda, tous se retrouvent autour d’un même combat. Cette coalition, bien que parfois fragile, montre une chose : la cause palestinienne transcende les clivages. Mais comment des groupes si différents parviennent-ils à s’unir ?
Le mouvement Al Adl Wal Ihssane, connu pour son influence dans les milieux islamistes, joue un rôle clé. Mais il est rejoint par des partis de gauche, traditionnellement plus laïcs, qui partagent le même rejet de la normalisation. Cette alliance improbable est une force : elle donne au mouvement une portée nationale, touchant des publics variés.
| Groupe | Position | Rôle dans la mobilisation |
| Al Adl Wal Ihssane | Islamiste, anti-normalisation | Organisation de manifestations |
| Partis de gauche | Progressistes, pro-Palestine | Mobilisation des jeunes |
| Citoyens ordinaires | Solidarité humanitaire | Participation massive |
Cette unité, même temporaire, montre à quel point la question palestinienne est ancrée dans la société marocaine. Elle rappelle aussi que, face à une cause perçue comme juste, les différences idéologiques peuvent s’effacer.
Un écho international
Les manifestations de Rabat ne sont pas un phénomène isolé. Partout dans le monde, des voix s’élèvent pour dénoncer la situation à Gaza. Mais ce qui rend le cas marocain unique, c’est son contexte : un pays qui a normalisé ses relations avec Israël tout en maintenant un fort soutien populaire à la Palestine. Cette tension est fascinante, non ?
À l’échelle internationale, les Nations unies et d’autres organisations ont multiplié les appels à un cessez-le-feu. Mais les manifestants marocains vont plus loin : ils veulent des sanctions contre Israël et une aide humanitaire massive pour Gaza. Cette exigence d’action concrète reflète un ras-le-bol face à ce qu’ils perçoivent comme l’inaction mondiale.
Dénoncer ce qui se passe à Gaza, c’est la moindre des choses. Il faut que ça s’arrête, point final.
– Une manifestante à Rabat
Ce mouvement pourrait-il inspirer d’autres pays ? Peut-être. Ce qui est sûr, c’est que la mobilisation marocaine envoie un message clair : la solidarité avec la Palestine reste une priorité pour des millions de personnes.
Et après ? Les enjeux pour le Maroc
Alors, que peut-on attendre de cette mobilisation ? D’un côté, le gouvernement marocain est dans une position délicate. Il doit jongler entre ses engagements diplomatiques avec Israël et la pression populaire. De l’autre, les manifestants ne semblent pas prêts à lâcher. Pour eux, la fin du blocus et l’abrogation de la normalisation sont des lignes rouges.
Ce qui m’interpelle, c’est la question de l’impact à long terme. Ces manifestations peuvent-elles changer la politique étrangère du Maroc ? Rien n’est moins sûr. Mais une chose est certaine : elles rappellent que la voix du peuple peut peser lourd. Et si le gouvernement choisit d’ignorer ces appels, le risque d’une fracture sociale est réel.
- Pression sur le gouvernement : Les manifestations mettent la diplomatie marocaine sous les projecteurs.
- Renforcement de la solidarité : La cause palestinienne unit des Marocains de tous horizons.
- Appel à l’action internationale : Les manifestants veulent un engagement mondial plus fort.
En fin de compte, ce mouvement est plus qu’une simple manifestation. C’est un cri du cœur, un appel à la justice, et une preuve que, même face à l’impuissance, des milliers de personnes refusent de baisser les bras. La question reste : jusqu’où ira cette vague de solidarité ?
En marchant dans les rues de Rabat, ces Marocains ne parlent pas seulement pour eux-mêmes. Ils parlent pour Gaza, pour la Palestine, et pour un monde qu’ils espèrent plus juste. Et ça, c’est peut-être l’aspect le plus puissant de cette mobilisation.
