Quand la nuit tombe sur une ville, on s’attend à entendre le calme s’installer, les rues se vider, les lumières s’adoucir. Mais à Montpellier, depuis le début de l’année 2025, l’obscurité porte une voix différente, celle d’un cri silencieux. Des paires de chaussures féminines, collées sur les murs du centre historique, murmurent une vérité dérangeante : trop de femmes meurent encore sous les coups de leur conjoint. Ce geste, porté par un groupe de militantes audacieuses, ne laisse personne indifférent. Mais qu’est-ce qui pousse ces femmes à transformer les murs de leur ville en mémoriaux éphémères ?
Un Cri Gravé dans la Pierre : Les Tricoteuses Hystériques
Elles se font appeler les Tricoteuses hystériques, un nom qui claque comme une provocation. Ce n’est pas un hasard : il fait écho à une phrase prononcée dans un contexte judiciaire marquant, un rappel cinglant des stéréotypes qu’on colle encore aux femmes qui osent élever la voix. Leur mission ? Rendre visible l’invisible. Depuis janvier 2025, ces militantes féministes ont placardé des dizaines de paires de chaussures sur les murs de Montpellier, chacune accompagnée d’une plaque portant un prénom et une phrase percutante : L’amour ne tue pas. Les hommes violents, si.
Ce n’est pas juste un acte de désobéissance civile. C’est un hommage, un femmage, comme elles le disent, à celles qui ne sont plus là. Chaque paire de chaussures représente une femme disparue, un vide laissé dans une famille, une communauté, une société. Et croyez-moi, quand on se promène dans les ruelles de Montpellier et qu’on tombe sur ces installations, on ne peut pas détourner le regard. Ça secoue.
Pourquoi des Chaussures ? Le Symbolisme d’un Geste
Les chaussures, c’est bien plus qu’un simple objet. Elles racontent une histoire, une vie. Une femme qui part au travail, qui court après ses enfants, qui danse, qui aime. En les collant sur les murs, les Tricoteuses hystériques matérialisent l’absence. Chaque paire est un rappel brutal : une femme a été arrachée à la vie, souvent dans l’indifférence générale. Ce choix n’est pas anodin. Il frappe par sa simplicité et sa puissance.
Les chaussures, c’est ce qui reste quand tout s’efface. Elles symbolisent le vide, mais aussi le combat pour ne pas oublier.
– Une militante anonyme
Leur action s’inspire de mouvements similaires dans d’autres villes françaises, où des collectifs féministes utilisent l’art de rue pour alerter. Mais à Montpellier, les Tricoteuses y ajoutent une touche personnelle : des plaques commémoratives. Chaque plaque porte un prénom, parfois une date, et toujours cette phrase qui cogne : L’amour ne tue pas. C’est un uppercut à la société, un rappel que derrière chaque statistique, il y a une vie brisée.
Les Chiffres qui Hantent
Les chiffres sont là, implacables. En 2025, selon les estimations des associations féministes, plus de 60 femmes ont déjà perdu la vie sous les coups de leur conjoint ou ex-conjoint en France. Une tous les deux jours. Et ce n’est pas tout : un enfant meurt tous les cinq jours dans des circonstances similaires. Ces données, bien qu’effrayantes, semblent glisser sur la conscience collective comme l’eau sur les plumes d’un canard. Pourquoi ? Parce que, trop souvent, ces drames sont relégués au rang de faits divers, vite oubliés.
J’ai toujours trouvé ça troublant, cette capacité qu’on a à fermer les yeux. On parle de violences conjugales comme d’un concept abstrait, mais derrière chaque nombre, il y a un visage, une histoire, un prénom. Les Tricoteuses hystériques refusent cette indifférence. Leur action, c’est une façon de dire : “Regardez. Souvenez-vous.”
| Statistique | Chiffre 2025 | Contexte |
| Féminicides | Plus de 60 | Femmes tuées par leur conjoint/ex-conjoint |
| Enfants victimes | 1 tous les 5 jours | Violences intrafamiliales |
| Plaintes classées | Majorité sans suite | Manque de moyens judiciaires |
Un Combat dans la Nuit
Leur méthode est aussi discrète qu’efficace. La nuit, une poignée de militantes se réunit, armées de colle, de chaussures et de plaques. Elles arpentent les ruelles, choisissent des murs bien en vue, et laissent leur message. Ce n’est pas juste une question de visibilité. C’est une manière de reprendre l’espace public, de le transformer en un lieu de mémoire et de résistance. Chaque collage est un acte de désobéissance, mais aussi de solidarité.
Et ça marche. Les passants s’arrêtent, lisent, discutent. Certains pleurent, d’autres posent une main sur l’épaule des militantes. Ces moments, bien que furtifs, sont précieux. Ils montrent que le message passe, que les consciences s’éveillent. “Ça libère la parole,” explique une des membres du collectif. Et dans une société où le silence est souvent complice, c’est déjà une victoire.
- Les collages suscitent des discussions spontanées avec les passants.
- Ils permettent de briser le tabou autour des violences conjugales.
- Ils rendent hommage aux victimes dans un espace public.
Un Appel à l’Action Politique
Les Tricoteuses hystériques ne se contentent pas de coller des chaussures. Elles veulent du changement, du concret. Leur colère pointe un problème systémique : le manque de moyens pour lutter contre les violences faites aux femmes. Trop de plaintes sont classées sans suite, trop de signaux d’alerte ignorés. “On classe, on oublie, et les femmes meurent,” déplore une militante. Difficile de ne pas partager cette frustration quand on voit l’ampleur du problème.
On arrêtera de coller quand les hommes arrêteront de tuer leur femme.
– Une voix du collectif
Leur objectif est clair : interpeller les responsables politiques. Elles envisagent d’inviter des élus locaux à leurs actions, de les confronter à la réalité des chiffres et des prénoms gravés sur les murs. Les prochaines élections municipales seront une occasion de plus pour poser la question : qui prendra vraiment ce combat à bras-le-corps ?
Un Fémicide qui Marque : L’Histoire de Cathy
Parmi les prénoms collés sur les murs, celui de Cathy, 70 ans, résonne particulièrement. Tuée par arme à feu par son ex-conjoint en juin 2025, son histoire est un symbole de l’inaction. Sa mort, comme tant d’autres, n’a pas suscité l’émoi qu’elle méritait. Pas de grandes déclarations, pas de sursaut politique. Juste le silence. Les Tricoteuses veulent changer ça. Leur femmage à Cathy est une façon de dire : elle comptait. Elle compte encore.
Ce genre d’histoires, on en entend trop souvent. Et pourtant, chaque fois, c’est comme un coup de poing. Comment une société peut-elle tolérer que des femmes, des mères, des grand-mères, continuent de mourir ainsi ? Les Tricoteuses hystériques posent la question, et elles ne lâcheront pas.
Un Mouvement qui Inspire
Ce qui frappe dans l’action des Tricoteuses, c’est sa capacité à fédérer. Leur démarche, bien que locale, s’inscrit dans une vague plus large de militantisme féministe. Partout en France, des collectifs adoptent des méthodes similaires, utilisant l’art, la rue, la provocation pour faire entendre leur voix. À Montpellier, les chaussures collées sur les murs ne sont pas qu’un symbole de deuil. Elles sont un appel à l’action, un défi lancé à tous : passants, politiques, citoyens.
Ce mouvement, je le trouve inspirant. Pas seulement parce qu’il dénonce, mais parce qu’il crée du lien. Les discussions qu’il suscite, les larmes qu’il provoque, les débats qu’il ouvre – tout ça montre qu’on peut encore changer les choses. Mais pour ça, il faut du courage. Et du courage, ces militantes en ont à revendre.
Et Ensuite ? La Lutte Continue
Les Tricoteuses hystériques n’ont pas l’intention de s’arrêter. Tant que les chiffres des féminicides ne baisseront pas, tant que les plaintes continueront d’être classées sans suite, elles colleront. Leur message est clair : la lutte contre les violences conjugales n’est pas une option, c’est une urgence. Et si leurs actions dérangent, tant mieux. C’est le but.
- Multiplier les collages pour toucher plus de monde.
- Interpeller les élus locaux et nationaux.
- Créer des espaces de dialogue avec le public.
En attendant, les murs de Montpellier continueront de parler. Chaque paire de chaussures, chaque plaque, est un rappel de ce qu’on ne doit pas accepter. Et si, un jour, ces murs se taisent, ce sera peut-être le signe que la société a enfin écouté. Mais d’ici là, les Tricoteuses hystériques veillent, et leur combat est aussi le nôtre.
