Vous souvenez-vous de cette voix rauque qui vous réveillait chaque matin pendant plus de vingt ans ? Ce ton direct, parfois brutal, qui mettait les politiques dos au mur dès 8h30 ? Eh bien elle va revenir. Mais plus à la radio. Cette fois, c’est dans vos écouteurs, quand vous voulez, que Jean-Jacques Bourdin a décidé de poser à nouveau son micro.
À 76 ans, l’homme qui a incarné l’interview politique à la française pendant des décennies ne rangera pas ses questions tranchantes au placard. Non. Il les aiguisera autrement.
Bourdin Media : le pari d’un journalisme libre et sans concession
Le projet est simple sur le papier, ambitieux dans les faits : créer une chaîne de podcasts baptisée Bourdin Media, entièrement financée par le public, sans patron, sans actionnaire, sans ligne éditoriale imposée. Lancement prévu en janvier. Et le timing n’a rien d’un hasard.
Les municipales de 2026 approchent à grands pas, la présidentielle de 2027 pointe déjà le bout de son nez. Autant dire que le terrain de jeu est idéal pour celui qui a fait de l’interview politique son fonds de commerce. « Je lance ce média dans l’optique des municipales et surtout de la prochaine présidentielle », a-t-il expliqué sans détour. Clair, net, précis. Comme toujours.
Un retour annoncé en fanfare
Tout a commencé par une vidéo postée un samedi soir. Pas de chichi : un micro en gros plan, une musique qui claque, et ce slogan qui en dit long : « Bourdin revient ! » En quelques heures, des dizaines de milliers de vues. Les commentaires fusent, entre nostalgie et curiosité. Beaucoup n’en revenaient pas. D’autres attendaient ça depuis longtemps.
Le lendemain, l’information est confirmée : une campagne de financement participatif démarre dès le lundi sur une plateforme bien connue des créateurs indépendants. Objectif ? Rassembler les fonds nécessaires pour produire des podcasts de qualité professionnelle. Studio, équipe technique, montage, diffusion… tout ça a un coût. Et cette fois, ce seront les auditeurs qui mettront la main à la poche.
« C’est ma dernière aventure professionnelle »
Jean-Jacques Bourdin
Cette phrase, il l’a répétée plusieurs fois. On sent l’envie. La vraie. Pas celle du retraité qui s’ennuie. Celle de l’animal médiatique qui a encore des choses à dire, des questions à poser, des vérités à faire sortir.
Pourquoi maintenant ? Pourquoi les podcasts ?
La question mérite d’être posée. Après tout, il aurait pu rester dans son fauteuil, profiter d’une retraite dorée, écrire ses mémoires. Non. Le podcast, c’est le média qui monte, celui qui permet une liberté totale. Pas de grille horaire imposée, pas de coupure pub toutes les dix minutes, pas de directeur de l’info qui valide ou non un invité.
Et puis il y a cette envie, presque viscérale, de retrouver le contact direct avec le public. Sans filtre. Sans intermédiaire. Juste une voix, un micro, et en face, des responsables politiques qui n’auront plus nowhere to hide.
- Des entretiens longs, sans contrainte de temps
- Des questions qui dérangent, comme à la grande époque
- Une indépendance totale, financée par les auditeurs
- Un rythme choisi par lui, et non par une grille de programmes
En gros, tout ce que la radio et la télévision lui ont progressivement retiré ces dernières années.
Un modèle économique 100 % participatif : ça peut marcher ?
Passer par le crowdfunding, c’est un pari osé. Surtout à cet âge-là. Mais Bourdin connaît son public. Des années de matinales ont créé un lien particulier, presque affectif, avec des millions de Français. Beaucoup se souviennent encore de ces moments où il coincçait un ministre pendant vingt minutes sur une phrase maladroite. Ce public-là est prêt à payer pour retrouver ça.
Et puis il y a un contexte favorable. La défiance envers les médias traditionnels n’a jamais été aussi forte. Les gens cherchent des voix qui leur parlent vrai, sans langue de bois. Le succès de certains podcasteurs indépendants ces dernières années le prouve : quand le contenu est bon et l’indépendance réelle, les auditeurs suivent. Et payent.
Personnellement, je trouve l’idée séduisante. Dans un paysage où tout semble formaté, policé, aseptisé, entendre à nouveau quelqu’un qui pose les questions qu’on a tous en tête, sans se soucier du politiquement correct… ça fait du bien.
Quel ton pour ce retour ?
C’est LA grande question. Va-t-on retrouver le Bourdin pugnace, parfois agressif, qui faisait trembler les politiques ? Ou un Bourdin plus apaisé, presque paternaliste ? À 76 ans, après tout ce qu’il a vécu professionnellement et personnellement, difficile d’imaginer qu’il n’ait pas un peu évolué.
Moi je mise sur un mélange des deux. L’expérience en plus, la sagesse de l’âge, mais toujours ce même regard qui vous transperce et cette phrase assassine : « Vous répondez à ma question ou pas ? » Ce serait dommage de s’en priver.
Les invités : politique d’abord, mais pas que
Il l’a dit clairement : les responsables politiques seront la colonne vertébrale de sa chaîne. Ministres, députés, candidats aux municipales, prétendants à l’Élysée… personne n’échappera à la rituelle invitation. Mais il a aussi laissé entendre qu’il recevra d’autres personnalités. Des chefs d’entreprise ? Des intellectuels ? Des syndicalistes ? Peut-être même des anonymes qui ont des choses à dire.
L’idée, c’est de retrouver ce qui a fait sa force pendant toutes ces années : mettre en lumière des voix, confronter des idées, faire émerger des vérités. Sans parti pris. Ou du moins, en essayant.
Un symbole plus grand que le simple retour d’un animateur
Derrière ce projet, il y a quelque chose de plus profond. Une forme de résistance. À 76 ans, refuser la retraite médiatique, refuser de disparaître doucement, c’est un message en soi. C’est dire : tant que j’ai des questions à poser, je continue.
Et puis il y a cette idée que l’âge, finalement, n’est qu’un chiffre. Que l’expérience, la crédibilité, la légitimité, ça ne s’efface pas d’un claquement de doigts parce qu’on vous écarte d’une grille de programmes.
Dans un monde où on jette les seniors comme des kleenex, Bourdin dit non. Il dit : je vaux encore quelque chose. J’ai encore ma place. Et il va le prouver.
Et nous, auditeurs, qu’est-ce qu’on y gagne ?
Beaucoup, potentiellement. Des débats de fond à une période où on n’en entend presque plus. Des responsables politiques obligés de répondre vraiment, sans esquive. Une alternative aux chaînes d’info en continu qui tournent en boucle sur les mêmes sujets.
Et surtout, peut-être, le retour d’une certaine idée du journalisme. Celui qui dérange. Celui qui gratte. Celui qui ne lâche pas l’affaire tant qu’il n’a pas obtenu une réponse claire.
Franchement, ça fait envie.
Conclusion : un chapitre qui s’ouvre, pas qui se ferme
Janvier arrivera vite. Les premiers épisodes tomberont. On jugera sur pièces, bien sûr. Mais déjà, une chose est sûre : Jean-Jacques Bourdin n’a pas fini de faire parler de lui.
Et quelque part, ça fait du bien de se dire qu’il y a encore des journalistes qui, à 76 ans, ont assez de feu sacré pour se lancer dans une dernière aventure professionnelle aussi audacieuse.
On sera nombreux, je pense, à mettre la main à la poche. Pas par nostalgie. Par envie de retrouver une voix qui compte. Une voix qui pose les bonnes questions.
Alors oui, Bourdin revient. Et cette fois, c’est nous qui allons l’accompagner.
