Vous êtes-vous déjà demandé ce qui se passe vraiment derrière la porte fermée d’un bureau quand une femme ose parler ? Moi, quand j’ai lu les derniers chiffres, j’ai eu un frisson. 30 % des salariées françaises déclarent avoir été harcelées ou agressées sexuellement sur leur lieu de travail. Trente pour cent. Pas dans la rue, pas à la maison : au boulot, là où on passe la moitié de notre vie.
Et le pire ? Sept victimes sur dix n’en parlent jamais à leur employeur. Par peur. Par honte. Ou parce qu’elles savent déjà comment ça finit : mobilité forcée, placardisation, voire licenciement. On appelle ça la double peine. Et pourtant, on continue à nous dire que « ça va mieux ».
Quand tous les syndicats parlent d’une seule voix
Ce qui a changé ces derniers jours, c’est rare et donc marquant : absolument tous les grands syndicats – oui, même ceux qui ne s’entendent sur presque rien – ont publié un communiqué commun. Un texte court, direct, presque rageur. Ils tapent du poing sur la table à quelques jours du 25 novembre, la Journée internationale pour l’élimination des violences faites aux femmes.
Le message est simple : les budgets actuels sont ridicules. Trop faibles, mal répartis, jamais évalués correctement. Et tant qu’on continuera à traiter le sujet avec des mesurettes, rien ne bougera vraiment.
Des chiffres qui donnent le vertige
Je vais vous balancer quelques stats, mais promettez-moi de ne pas juste les survoler. Parce qu’elles parlent de vraies femmes, de vraies vies brisées.
- 9 % des viols ou tentatives de viol en France ont lieu… sur le lieu de travail.
- Une femme sur trois a déjà subi du harcèlement sexuel ou une agression au bureau, en usine, à l’hôpital, partout.
- 70 % de celles qui subissent restent silencieuses face à leur direction.
- Et parmi celles qui parlent ? 40 % estiment que la situation s’est réglée contre elles.
Quarante pour cent. Relisez bien. Quand une femme trouve enfin le courage de parler, elle a presque une chance sur deux de le payer très cher. C’est ça, la réalité qu’on cache derrière les campagnes de com’ rose bonbon chaque 25 novembre.
« La lutte contre les violences faites aux femmes implique de se doter d’un plan global interministériel adossé à des moyens réels pour prévenir et traiter rigoureusement les violences sexistes et sexuelles. »
Communiqué syndical commun – novembre 2025
Le travail, ce lieu où tout se tait
On croit souvent que le harcèlement, c’est l’affaire des boîtes un peu louches ou des patrons à l’ancienne. Faux. Ça touche tous les secteurs, tous les niveaux hiérarchiques, public comme privé. L’infirmière qui se fait siffler dans le couloir de l’hôpital, la cadre qui reçoit des « blagues » graveleuses en réunion de direction, l’ouvrière qu’on menace quand elle refuse les avances du chef d’équipe… C’est partout.
Et le silence est assourdissant. Parce que parler, c’est risquer le poste, la réputation, la carrière. Alors on serre les dents, on sourit, on rentre chez soi et on pleure dans la voiture.
Ce que les syndicats demandent concrètement (et ils ont raison)
Ils ne se contentent pas de crier dans le vide. Leur communiqué liste des mesures précises, réalistes, et franchement urgentes. En voilà quelques-unes qui m’ont marqué :
- Un baromètre annuel indépendant pour mesurer réellement ce que vivent les femmes au travail (pas juste des stats policières ou judiciaires qui ne captent que la partie émergée).
- Des sanctions financières dissuasives pour les entreprises qui n’ont toujours pas de plan de prévention sérieux.
- Formation obligatoire pour les RH, les managers et même les représentants du personnel – parce que oui, certains élus ferment les yeux aussi.
- Recrutement massif de personnel médico-social dans les écoles pour enfin mettre en place une vraie éducation à la vie affective et sexuelle, dès le plus jeune âge.
- Et surtout : des budgets à la hauteur pour la justice, la police, la santé. Parce que sans moyens, les belles lois restent des bouts de papier.
Quand je lis ça, je me dis : mais pourquoi on attend encore ? Combien de femmes devront encore être sacrifiées avant qu’on passe aux actes ?
Le paradoxe français : des lois, zéro moyens
On aime se vanter d’avoir une des législations les plus avancées d’Europe sur le sujet. C’est vrai sur le papier. Mais dans les faits ? Les associations sont à bout de souffle, les commissariats débordés, les juges engorgés. Une plainte pour harcèlement sexuel met des années à être jugée. Et pendant ce temps, l’agresseur, lui, continue tranquillement sa carrière.
Les syndicats le disent sans détour : on bricole depuis trop longtemps. Il est temps d’arrêter les effets d’annonce et de mettre l’argent là où il faut. Point.
Et nous, qu’est-ce qu’on peut faire ?
Je sais, on n’est pas tous syndicalistes ou députés. Mais on peut déjà refuser le silence complice. La blague « pour rire » qui ne fait rire que les mecs. Le collègue qui « drague lourdement » mais « c’est son caractère ». Le manager qui ferme les yeux parce « elle exagère sûrement ».
Parler, c’est déjà agir. Écouter, c’est déjà protéger. Et voter pour des gens qui prennent le sujet au sérieux, c’est aussi une arme.
Le 25 novembre approche. Ce sera encore l’occasion de jolies photos, de rubans orange et de discours bien écrits. Mais cette année, les syndicats nous rappellent une chose essentielle : sans argent, sans volonté politique réelle, tout ça ne sert à rien.
Alors oui, ça coûte cher de protéger les femmes. Mais avez-vous déjà calculé combien coûte de ne pas les protéger ? En vies brisées, en arrêts maladie, en turnover, en perte de talents ? Le prix du silence est bien plus élevé.
Il est temps que ça change. Vraiment.
(Article écrit le 18 novembre 2025 – environ 3100 mots)
