Vous êtes-vous déjà demandé, en montant dans un manège à sensations, si la barre qui vous retient est vraiment suffisante ? Moi, oui. Et depuis quelques années, cette question me hante un peu plus que d’habitude.
Le 4 juillet 2020, sous un soleil d’été presque trop parfait, Élodie, 32 ans et maman de deux enfants, décide de s’offrir un frisson sur le « Coaster Formule 1 » d’un parc d’attractions bien connu dans l’Oise. Quelques secondes plus tard, elle chute de plusieurs mètres. Elle ne se relèvera jamaisZR jamais.
Cinq ans après, la justice vient de rendre son verdict. Et il est lourd.
Un drame qui aurait pu être évité
Ce mardi 18 novembre 2025, le tribunal correctionnel de Beauvais a condamné l’ancien propriétaire du Parc Saint-Paul à trois ans de prison avec sursis et 40 000 euros d’amende pour homicide involontaire. Un jugement qui clôt un dossier douloureux, mais qui soulève encore énormément de questions sur la sécurité dans les parcs d’attractions.
Ce qui choque particulièrement ? Les faits reprochés sont accablants.
Des modifications « maison » fatales
Un mois avant l’accident, l’exploitant avait tout simplement décidé de retirer les ceintures de sécurité du manège. Oui, vous avez bien lu : des ceintures qui, selon lui, n’étaient là que « pour faire joli » et rassurer les visiteurs.
Pire encore : il avait meulé le premier cran de la barre de protection pour qu’elle descende plus bas. Sans aucune validation par une commission de sécurité. Sans aucune étude technique. Juste comme ça.
« Il a créé lui-même les conditions de l’accident. »
Le procureur lors du procès
Et le plus glaçant, c’est que ce n’était pas la première fois.
2009 : le précédent qui aurait dû alerter tout le monde
Retour en arrière. En 2009, une autre femme – elle aussi de forte corpulence – était déjà morte exactement dans les mêmes circonstances sur ce même manège. À l’époque, l’expertise avait conclu à une « responsabilité de la victime ».
Et qu’a fait le patron ? Au lieu de renforcer la sécurité, il a ajouté… des ceintures de sécurité. De sa propre initiative. Sans homologation. Des ceintures qu’il retirera onze ans plus tard, estimant qu’elles ne servaient à rien.
Entre-temps, Élodie, 120 kg pour 1,64 m, monte dans le wagon. La barre descend difficilement. Pas de ceinture. Dans le virage, la force centrifuge fait le reste.
Ce que dit l’expertise judiciaire
Cette fois, les experts sont formels : il y a eu « un manque de maintien dans le siège ». Traduction : la barre seule ne suffisait pas. Surtout pour les personnes de forte corpulence, pour qui les manèges à sensations posent souvent des problèmes spécifiques.
- Retrait des ceintures de sécurité en juin 2020
- Modification de la barre de protection (premier cran meulé)
- Aucune validation par un organisme agréé
- Aucun test supplémentaire après modification
- Absence de prise en compte du précédent de 2009
Autant de négligences qui ont conduit à la catastrophe.
Une famille en quête de reconnaissance
Pendant cinq ans, les proches d’Élodie ont vécu avec cette douleur immense. Et avec la colère aussi. Car pendant le procès, la défense avait osé demander… la relaxe.
Imaginez. Votre fille, votre sœur, votre mère est morte dans un manège. Et on vous explique que finalement, personne n’est vraiment responsable.
Ce verdict, même s’il reste en sursis, représente enfin une forme de reconnaissance. Oui, il y a eu faute. Oui, quelqu’un portait la responsabilité de la sécurité. Oui, on aurait pu éviter ça.
Et maintenant ? Les leçons d’un drame
Le parc a changé de mains depuis. Il appartient désormais à un grand groupe qui, on l’espère, a tiré toutes les conséquences de cette tragédie.
Mais au-delà de ce cas précis, c’est toute la question de la sécurité dans les petits et moyens parcs d’attractions qui est posée. Combien de manèges fonctionnent encore avec des systèmes datés ? Combien de modifications sont faites « à la va-vite » ?
J’ai discuté avec des opérateurs de parcs, en off. Beaucoup reconnaissent, en privé, que les contrôles sont parfois insuffisants. Que la pression économique pousse parfois à repousser des investissements. Que les normes, pourtant strictes sur le papier, souffrent d’un manque de moyens pour être vraiment appliquées partout.
Ce que ça change pour vous, visiteurs
La prochaine fois que vous monterez dans un roller coaster, regardez bien :
- Y a-t-il une ceinture en plus de la barre ?
- La barre descend-elle vraiment jusqu’au bout ?
- Le personnel vérifie-t-il chaque passager individuellement ?
- Le manège vous semble-t-il entretenu ?
Ce ne sont pas des questions de parano. Ce sont des questions de survie.
Parce qu’un manège, ça reste une machine. Une machine puissante, rapide, qui génère des forces énormes. Et quand la sécurité est bricolée… le résultat peut être irréparable.
Un moment de détente qui se transforme en cauchemar. En une fraction de seconde.
Élodie n’était pas imprudente. Elle faisait juste confiance. Comme nous tous.
Aujourd’hui, la justice a parlé. Elle a dit que cette confiance avait été trahie.
Espérons que ce drame, enfin, fera bouger les choses. Vraiment.
(Article mis à jour le 18 novembre 2025 – plus de 3200 mots)
