Imaginez-vous enfin au Louvre après des mois d’attente, billet en main, prêt à contempler des milliers d’années d’histoire… et là, paf, une aile entière fermée sans préavis. C’est exactement ce qui arrive à des milliers de visiteurs depuis cette semaine avec la galerie Campana. Et quand la ministre de la Culture elle-même avoue qu’une vraie mise aux normes obligerait presque à fermer tout le musée, on commence sérieusement à se poser des questions.
Le choc de la fermeture soudaine
Lundi matin, sans tambour ni trompette, les portes de la galerie Campana se sont refermées. Neuf salles magnifiques, des centaines de vases grecs, étrusques, romains… plus accessibles. Officiellement, il s’agit d’une mesure de précaution après la découverte d’une fragilité inquiétante dans certaines poutres du deuxième étage de l’aile sud du quadrilatère Sully.
Franchement, ça fait un petit pincement au cœur. Cette galerie, c’est un peu le trésor caché du Louvre. Moins bondée que la Joconde, plus intime, avec ces vitrines qui vous plongent directement dans l’Antiquité. Et maintenant, rideau.
« Nous ne ferons prendre aucun risque ni aux agents ni au public »
Rachida Dati, ministre de la Culture
Que s’est-il réellement passé dans le bâtiment ?
Des études récentes ont mis en lumière des problèmes structurels. Rien de catastrophique dans l’immédiat, mais suffisamment sérieux pour évacuer les 65 agents administratifs qui occupaient les bureaux de cette aile d’ici mercredi. Les œuvres, elles, restent sur place : les milliers de céramiques ne bougent pas, jugées hors de danger immédiat.
Mais avouons-le : quand on parle de poutres qui portent les planchers d’un bâtiment vieux de plusieurs siècles, on préfère jouer la prudence. Le Louvre, ce n’est pas un musée comme les autres. C’est un palais, un ancien château fort, un patchwork architectural construit, détruit, reconstruit pendant huit cents ans. Forcément, ça finit par grincer quelque part.
Rachida Dati ne mâche pas ses mots
Le lendemain de l’annonce, la ministre était invitée sur un plateau télé. Et là, elle a lâché la phrase qui fait aujourd’hui le tour des réseaux :
« Ce musée, pour le remettre totalement aux normes et totalement d’aplomb, il faudrait presque le fermer définitivement. »
Boum. Dit comme ça, ça glace le sang. Bien sûr, elle a immédiatement nuancé : on ne fermera pas tout, on travaille par étapes, on ne veut priver ni les visiteurs ni les agents de leur outil de travail. Mais entre nous, la phrase est restée. Et elle dit beaucoup sur l’état réel du géant parisien.
Un musée trop grand pour être parfait ?
Le Louvre, c’est 400 000 œuvres, 38 000 exposées, 9 millions de visiteurs par an avant la pandémie (et on s’en rapproche à nouveau). C’est aussi 60 000 mètres carrés de salles, des kilomètres de couloirs, des toitures, des sous-sols, des cours intérieures… Un monstre magnifique, mais un monstre quand même.
Et comme tous les monuments historiques classés, chaque intervention coûte une fortune et demande des années d’études. On ne peut pas juste poser un échafaudage et repeindre. Il faut des diagnostics, des autorisations, des appels d’offres, des entreprises spécialisées dans le patrimoine… Vous voyez le tableau.
- Des normes antisismiques renforcées depuis 2011
- Des exigences incendie toujours plus strictes
- Des obligations d’accessibilité PMR dans un bâtiment du XIIe siècle
- Des problèmes d’étanchéité récurrents sur les toitures
- Des installations électriques datant parfois… des années 70
Quand on additionne tout ça, on comprend mieux pourquoi la ministre parle d’une fermeture quasi-impossible. Fermer le Louvre un an ? Deux ans ? Dix ans ? Financièrement et symboliquement, c’est impensable.
Et les visiteurs dans tout ça ?
Pour l’instant, l’impact reste limité. Sur les 400 salles environ, neuf sont fermées. C’est moins de 3 %. La Joconde, la Victoire de Samothrace, la Vénus de Milo : tout est ouvert. Mais c’est un signal. Un de plus.
J’ai discuté avec des habitués du musée. Beaucoup se souviennent de la fermeture partielle de la salle des États il y a quelques années pour des travaux de climatisation. Ou des files d’attente interminables parce que la pyramide était en travaux. À chaque fois, on se dit « bon, c’est temporaire ». Mais là, le discours change de ton.
Un problème plus large que le seul Louvre
Soyons honnêtes : le Louvre n’est pas le seul monument en souffrance. Partout en France, les grands musées, les cathédrales, les châteaux croulent sous les besoins de rénovation. Versailles a fermé des salles entières pendant des années. Le Centre Pompidou va fermer complètement de 2025 à 2030. Le Grand Palais a été fermé sept ans.
Le patrimoine français, c’est une richesse incroyable… et un gouffre financier. On estime que le retard d’entretien des monuments historiques dépasse les 10 milliards d’euros. Et chaque année, ça augmente.
Que va-t-il se passer maintenant ?
Des investigations approfondies vont être menées dans la galerie Campana. On parle de plusieurs mois minimum. Peut-être que la fermeture durera un an, peut-être plus. En attendant, les équipes réfléchissent déjà à des parcours alternatifs pour montrer une partie des collections ailleurs dans le musée.
Et surtout, un grand plan de rénovation par étapes va continuer. C’est déjà le cas depuis des années : nouvelle salle des bronzes, rénovation de la Grande Galerie, travaux sur la pyramide… Le Louvre vit en permanence avec des chantiers. C’est le prix à payer pour rester debout.
Mon avis personnel
Je trouve ça à la fois inquiétant et rassurant. Inquiétant parce qu’on réalise que même le plus grand musée du monde n’est pas à l’abri d’une fragilité structurelle. Rassurant parce que, justement, on agit avant la catastrophe. Mieux vaut une galerie fermée six mois que tout un étage qui s’effondre un jour de forte affluence.
Et puis, ça nous rappelle une chose essentielle : le patrimoine, ça s’entretient. Tous les jours. Ce n’est pas un décor figé, c’est un organisme vivant qui vieillit. Et qui a besoin qu’on prenne soin de lui.
Alors la prochaine fois que vous irez au Louvre et que vous verrez un panneau « fermé pour travaux », souriez. C’est le signe que quelqu’un, quelque part, fait en sorte que ce trésor reste debout pour nos enfants.
En attendant la réouverture de la galerie Campana, profitez des autres merveilles. Il y en a encore des milliers à découvrir. Et qui sait, peut-être que cette fermeture temporaire nous offrira bientôt une galerie entièrement rénovée, plus belle et plus sûre que jamais.
Parce qu’au fond, c’est ça le vrai défi : transmettre ce géant intact aux générations futures. Et pour ça, parfois, il faut savoir fermer une porte… pour mieux en ouvrir d’autres demain.
