Hier, en faisant la queue à la boulangerie, j’ai vu une scène qui m’a fait sourire. La dame devant moi a tendu un billet de 10 euros pour un pain au chocolat à 1,30 €. Le boulanger lui a rendu la monnaie, dont quatre pièces rouges toutes brillantes. Elle a regardé les 1 et 2 centimes comme s’ils étaient radioactifs, puis les a délicatement reposés sur le comptoir avec un petit « gardez la monnaie ». Le boulanger a haussé les épaules, habitué. Et moi, je me suis dit : tiens, encore un épisode de la grande saga des petites pièces qui énervent tout le monde.
Ces petites pièces rouges qui divisent les Français
Avouez-le : vous aussi, vous avez un pot quelque part chez vous où dorment des dizaines, voire des centaines de pièces de 1 et 2 centimes. Elles s’accumulent sans qu’on sache trop pourquoi, comme des invités qui restent après la fête. Et pourtant, personne ne semble vraiment les aimer.
Certains les trouvent inutiles, lourdes, sales. D’autres y voient un symbole de l’euro, un petit bout de cuivre qui rappelle qu’on peut encore payer en liquide. Entre ceux qui les abandonnent sans état d’âme et ceux qui les collectionnent presque religieusement, le débat est ouvert depuis des années. Et il revient régulièrement sur la table.
« Je les laisse à la caisse, ça fait gagner du temps »
Dans les supermarchés, c’est presque devenu une habitude. À la fin du passage en caisse, quand le total affiche 19,97 € ou 20,02 €, beaucoup tendent un billet de 20 € et disent « laissez, ça ira ». Les pièces rouges restent là, sur le tapis roulant ou dans la petite coupelle prévue à cet effet.
« Franchement, je préfère perdre 3 centimes que de les ramasser et les trimballer toute la journée. Ça pèse, ça fait du bruit, et de toute façon je ne les réutiliserai jamais », m’a confié une jeune femme en sortant d’un magasin.
Et elle n’est pas seule. Dans les files d’attente, on entend souvent la même chose. Les gens sont pressés, ils n’ont pas envie de compter les petites pièces, encore moins de les ranger. L’arrondi à 5 centimes près, déjà en place dans plusieurs pays voisins, fait rêver plus d’un client.
Les défenseurs de la petite ferraille
Mais tout le monde ne pense pas comme ça. Il y a ceux qui gardent précieusement chaque centime. Par principe, par habitude, ou tout simplement parce qu’ils trouvent ça dommage de « perdre » de l’argent, même quelques centimes.
Une retraitée que j’ai croisée au marché m’a expliqué qu’elle vide systématiquement son porte-monnaie dans une grosse boîte à biscuits chez elle. « À la fin de l’année, je les porte à la banque. L’an dernier, j’ai récupéré plus de 120 euros. C’est toujours ça de gagné pour les vacances des petits-enfants ».
Il y a aussi les parents qui donnent ces pièces aux enfants pour apprendre à compter, ou ceux qui les mettent dans la tirelire pour un futur voyage. Pour eux, un centime reste un centime, et l’argent ne doit pas être gaspillé.
- Certains les transforment en dons pour des associations (les fameuses boîtes près des caisses)
- D’autres les utilisent pour payer exactement, surtout sur les marchés
- Quelques-uns les gardent « au cas où », même s’ils avouent ne jamais les ressortir
- Et il y a les collectionneurs qui cherchent les pièces rares (celles de Monaco, du Vatican…)
Un problème qui dépasse nos frontières
D’ailleurs, la question n’est pas uniquement française. Récemment, un grand pays a carrément décidé d’arrêter la production de sa pièce la plus emblématique, celle d’un cent. Coût de fabrication supérieur à sa valeur, poids inutile dans les poches… les arguments commencent à peser lourd, même outre-Atlantique.
En Europe, plusieurs pays ont déjà franchi le pas : la Finlande, la Belgique, l’Irlande, les Pays-Bas ou l’Italie ont adopté l’arrondi à 5 centimes près en espèces. Résultat ? Les pièces de 1 et 2 centimes continuent d’exister, mais elles circulent beaucoup moins. Et personne ne semble s’en plaindre.
En France, le sujet revient régulièrement dans le débat public. Des voix s’élèvent pour demander la même chose. Les commerçants, eux, sont partagés : certains aimeraient bien dire adieu à ces petites pièces qui encombrent les tiroirs-caisses, d’autres craignent que l’arrondi se fasse toujours à leur désavantage.
Et si c’était le début de la fin de la monnaie physique ?
Plus largement, ces petites pièces rouges sont peut-être le symptôme d’une mutation plus profonde. Avec la montée du paiement sans contact, des applications et des cartes bleues utilisées pour des cafés à 1,50 €, l’argent liquide recule chaque année.
J’ai remarqué que dans certains quartiers jeunes ou aisés, on voit de plus en plus de pancartes « pas d’espèces » même chez les petits commerçants. Les pièces, toutes les pièces, deviennent un souvenir. Les 1 et 2 centimes sont juste les premières à morfler.
Pourtant, il y a quelque chose de nostalgique là-dedans. Ces petites rondelles de cuivre, c’était aussi le bruit des marchés, le tintement dans la poche, la satisfaction de payer pile poil. Les perdre, c’est peut-être perdre un petit bout de notre quotidien d’avant.
Alors, que faire concrètement de vos pièces rouges ?
Si comme moi vous en avez marre qu’elles traînent partout, voici quelques idées qui marchent :
- Les porter à la banque (oui, elles les acceptent, même en grande quantité)
- Les donner à des associations (beaucoup en ont besoin pour leurs comptes)
- Les utiliser sur les marchés ou chez les petits commerçants qui apprécient encore les espèces
- Faire un gros tri une fois par an et se faire un petit plaisir avec le magot
- Ou tout simplement… continuer à les laisser à la caisse sans culpabiliser
Personnellement, j’ai opté pour la dernière solution depuis quelques mois. Et je dois dire que ça fait un bien fou. Moins de bruit dans le sac, moins de poids, et 2 ou 3 centimes de perdues, ce n’est vraiment pas la fin du monde.
Après, chacun fait comme il veut. C’est aussi ça, la liberté avec son argent. Mais une chose est sûre : ces petites pièces rouges ne laissent personne indifférent. Elles agacent, elles amusent, elles divisent. Et tant qu’on en parlera, c’est qu’elles existent encore.
Alors, et vous ? Vous êtes plutôt team « je garde tout » ou team « je laisse sans hésiter » ? Dites-le moi en commentaire, ça m’intéresse vraiment de savoir comment vous gérez cette micro-épopée du quotidien.
Parce qu’au fond, derrière ces bouts de métal sans grande valeur, il y a toute une philosophie de l’argent, du temps, et de ce qu’on accepte ou pas de porter sur soi.
Et ça, c’est quand même fascinant.
