Quand on confie son enfant à une assistante maternelle, on imagine un cocon, un endroit où il sera choyé, en sécurité. Et puis un jour, la réalité vous rattrape comme un coup de poing dans le ventre. Sept familles des Côtes-d’Armor vivent ce cauchemar depuis quelques mois. Leur confiance a été brisée net.
Je ne vais pas vous assommer tout de suite avec les détails crus – ils viendront – mais sachez simplement que ce qui s’est passé dans cette maison apparemment banale dépasse l’entendement. Et pourtant, c’est arrivé. Chez nous. En 2025.
Une affaire qui a commencé par une intuition de mère
Tout part d’une maman qui trouve son petit garçon bizarre en rentrant de la garde. Des phrases étranges, des cauchemars à répétition, un rejet soudain de l’assistante maternelle qu’il adorait pourtant. Comme souvent dans ces histoires, c’est l’instinct maternel qui a sonné l’alarme.
Elle pose des questions. Doucement. Sans juger. Et là, l’enfant lâche des mots qui glacent le sang. Des gestes qu’un gamin de cet âge ne devrait même pas connaître. Le fils de l’assistante maternelle, un quadragénaire qui vivait sous le même toit, serait passé à l’acte. À plusieurs reprises.
Juillet 2025. La plainte est déposée. Les gendarmes de Tréguier et la section de recherches de Lannion prennent l’affaire en main. Ce qui n’était qu’une suspicion va très vite devenir une enquête tentaculaire.
Sept enfants, sept témoignages accablants
Quand les enquêteurs commencent à auditionner les autres enfants gardés par la même femme, c’est l’effondrement. Un à un, sept petits – âgés de trois à huit ans seulement – racontent la même horreur. Des viols. Des agressions sexuelles. Parfois sous la menace. Parfois en profitant de la sieste collective.
Imaginez la scène. Des tout-petits qui tentent d’expliquer avec leurs mots à eux des actes qu’ils ne comprennent même pas complètement. Des dessins parfois. Des pleurs. Des silences lourds. Les spécialistes de l’audition des mineurs savent à quel point c’est délicat. Ici, les récits concordent. C’est terrifiant de cohérence.
Certains enfants dénonçaient également des faits de violences commis par leur assistante maternelle.
Communiqué du parquet de Saint-Brieuc
Et là, deuxième choc : la grand-mère – parce que c’est ainsi que les enfants l’appelaient – n’était pas toujours douce non plus. Des gifles. Des tirages de cheveux. Des punitions disproportionnées. L’image de la nounou idéale s’effrite complètement.
Le profil du suspect : un homme ordinaire… en apparence
Il a 41 ans. Vit chez sa mère. Pas d’antécédents judiciaires connus pour ce type de faits. Peut-être quelques petits délits par le passé, mais rien qui aurait alerté les services de protection de l’enfance. Le genre d’homme qu’on croise au supermarché sans le remarquer.
Et c’est bien ça qui fait le plus peur, non ? Le prédateur n’avait pas de cornes ni de cape noire. Il avait les clés de la maison où des enfants dormaient sans défense. Il passait dans le couloir pendant que sa mère faisait la cuisine ou la lessive. L’opportunité parfaite.
Mercredi dernier, les gendarmes débarquent. Garde à vue pour le fils et pour la mère de 62 ans. Lui nie tout en bloc. Elle aussi. Classique. Mais face aux témoignages des enfants et aux expertises médicales qui suivront, le mur du déni risque de s’effondrer vite.
Une mise en examen express et une détention provisoire
Jeudi, le quadragénaire est présenté au juge. Mise en examen pour viols sur mineurs et agressions sexuelles sur mineurs. Le parquet requiert la détention provisoire – évidemment acceptée. Il est écroué dans la foulée.
Sa mère, elle, respire encore l’air libre… pour l’instant. Elle sera convoquée plus tard pour répondre de violences par personne ayant autorité et surtout de non-dénonciation de crime. Parce que oui, quand on vit sous le même toit que son fils et qu’on accueille des enfants tous les jours, difficile de prétendre qu’on n’a rien vu, rien entendu, rien soupçonné.
Les assistantes maternelles : un métier sous tension permanente
Il y a environ 300 000 assistantes maternelles en France. Un métier magnifique, souvent exercé par passion. Mais aussi un métier où l’on est seul avec des enfants toute la journée. Où les contrôles existent, mais restent limités.
- Un agrément tous les cinq ans
- Des visites inopinées possibles par la PMI
- Un casier judiciaire B2 qui doit être vierge
- Mais… personne ne vit chez vous 24h/24
Et quand le danger vient de l’entourage proche ? Quand c’est le conjoint, le fils, le frère qui passe de temps en temps ? Là, le système montre ses limites. Cette affaire va forcément relancer le débat sur les personnes vivant au domicile.
J’ai échangé avec plusieurs assistantes maternelles ces derniers jours (anonymement, bien sûr). Beaucoup sont effondrées. Elles se sentent salies par association. « On nous met toutes dans le même panier », me confiait l’une d’elles. Et elle n’a pas tort.
Comment les enfants ont-ils pu parler si jeunes ?
C’est une question qu’on me pose souvent. Des enfants de trois ans qui dénoncent des viols, ça semble incroyable. Et pourtant, les professionnels de l’enfance le savent : les tout-petits parlent. Pas toujours avec des mots précis, mais avec des comportements, des jeux sexualisés, des phrases choc.
Dans cette affaire, certains enfants ont répété des gestes devant leurs parents. D’autres ont dit des phrases comme « il m’a fait mal là » en désignant leurs parties intimes. Quand plusieurs enfants disent la même chose, à des familles différentes, sans se connaître… c’est que quelque chose de grave s’est passé.
Les séquelles à long terme : un accompagnement crucial
Les sept enfants suivent maintenant un suivi psychologique. Certains ne veulent plus dormir seuls. D’autres ont des crises d’angoisse à la vue d’un homme barbu (le suspect en avait une). Il faudra des années pour réparer ça. Si tant est qu’on répare complètement.
Les parents, eux, oscillent entre colère et culpabilité. « Comment ai-je pu ne rien voir ? » C’est la phrase que j’entends le plus. Pourtant, ils n’avaient aucun moyen de savoir. Le propre des prédateurs, c’est d’être discrets, manipulateurs, patients.
Et maintenant ? Vers un procès douloureux
L’enquête continue. D’autres enfants pourraient être entendus. Des expertises psychiatriques du suspect et de sa mère vont être ordonnées. On parle déjà d’un procès aux assises dans un ou deux ans.
En attendant, la maison est vide. Les jouets ont été saisis comme pièces à conviction. Les parents se serrent les coudes dans un groupe de parole. Et quelque part, sept petits grandissent trop vite, avec des souvenirs qu’aucun enfant ne devrait porter.
Cette histoire nous renvoie à notre propre vulnérabilité. À celle de nos enfants. Elle nous oblige à nous poser les bonnes questions, même quand elles dérangent. Parce que tant qu’il y aura des prédateurs qui se fondent dans le décor, il faudra rester vigilants. Toujours.
(Article mis à jour le 21 novembre 2025 – l’enquête est en cours)
