Vous souvenez-vous de votre premier club de foot ? Ce terrain un peu défoncé, ces buts rafistolés avec du scotch, ce coach bénévole qui arrivait en courant après son boulot ? Moi oui. Et je parie que la majorité des amoureux du ballon rond aussi. Alors quand on apprend que la Fédération va débloquer 550 millions d’euros sur quatre saisons pour justement ces clubs-là, ceux qu’on appelle le « foot amateur », on se dit que Noël arrive avec un peu d’avance.
Une annonce qui tombe à pic… ou presque
Le président de la FFF l’a lâché calmement, presque en passant, un samedi matin à Clairefontaine devant tous les présidents de ligues et de districts. 106 millions dès la saison prochaine, puis une montée en puissance jusqu’à atteindre près de 140 millions par an en moyenne. Autant dire que ça change la donne. Pour vous donner une idée, le budget total de la Fédération cette année tourne autour de 300 millions. On parle donc d’un effort colossal.
Franchement, ça fait plaisir. Parce que ces dernières années, entre la crise sanitaire, l’inflation sur le matériel et les assurances qui flambent, beaucoup de petits clubs tiraient la langue. Certains ont même failli mettre la clé sous la porte. Cette enveloppe arrive donc au bon moment… même si, soyons honnêtes, elle aurait pu arriver plus tôt.
D’où vient cet argent, déjà ?
Bonne question. En réalité, la Fédération bénéficie toujours des retombées des grandes compétitions (Euro, Coupe du monde) et surtout des droits TV de l’équipe de France. Ajoutez à ça une gestion plus rigoureuse ces derniers temps, et vous obtenez une marge de manœuvre inédite. Autrement dit : ce n’est pas de la magie, c’est simplement que l’argent qui dormait un peu a enfin décidé de bosser pour la base.
« Quand je faisais campagne fin 2024, j’avais pris l’engagement clair d’augmenter massivement le soutien au foot amateur. Aujourd’hui, on passe aux actes. »
Le président de la FFF, ce samedi à Clairefontaine
Le foot féminin, grand gagnant de l’histoire
Parmi les mesures phares : 25 % minimum de l’enveloppe réservés au développement du football féminin. Concrètement, ça veut dire des subventions pour créer des sections filles là où il n’y en a pas, des formations d’éducatrices, du matériel adapté, et même des aides pour les déplacements – parce que oui, une équipe féminine senior qui joue à 200 km un dimanche matin, ça coûte cher en essence.
Et là, je vais me permettre une petite parenthèse perso : enfin ! On a beau avoir une équipe de France féminine qui cartonne, on sait tous que la pyramide en dessous reste fragile. 25 %, ce n’est pas un gadget marketing, c’est un signal fort. Espérons juste que ça ne reste pas un pourcentage sur un PowerPoint et que l’argent arrive vraiment sur le terrain.
- Création de nouvelles sections féminines
- Formation d’éducatrices diplômées
- Achat de tenues et ballons spécifiques
- Prise en charge partielle des déplacements
- Communication locale pour recruter des joueuses
Du « prêt-à-porter » au « sur-mesure » : la révolution des aides
L’une des phrases qui m’a le plus marqué dans l’annonce, c’est celle-ci : on passe d’aides « prêt-à-porter » à du « sur-mesure ». En clair, fini le saupoudrage où tout le monde touche un peu la même chose. Désormais, une partie des fonds (plusieurs millions par an) sera attribuée selon des indicateurs objectifs : nombre de licenciées, qualité de la formation, labellisation jeune, actions éco-responsables, etc.
Exemple concret ? Un club rural qui fait jouer 80 gamins dont 30 filles, qui a monté une école de foot labellisée et qui organise des ramassages de déchets autour du stade pourra toucher nettement plus qu’un club qui se contente d’aligner trois équipes seniors le dimanche. Ça récompense l’engagement. Et ça risque de créer une saine émulation.
| Critère possible | Points attribués (exemple) |
| École de foot labellisée | +30 pts |
| Plus de 30 % de licenciées féminines | +25 pts |
| Actions RSE (développement durable) | +15 pts |
| Formation continue des éducateurs | +20 pts |
| Accueil de jeunes en service civique | +10 pts |
Évidemment, tout ça reste à préciser. Mais l’idée est hyper séduisante.
Et les infrastructures dans tout ça ?
Forcément, la grande question qui brûle les lèvres : est-ce que ces 550 millions vont servir à refaire les vestiaires qui prennent l’eau et les terrains qui ressemblent à des champs de patates en hiver ? La réponse est… partielle. Une grosse partie de l’enveloppe ira bien aux clubs via les ligues et districts, mais une autre sera dédiée à des projets structurants : rénovation de pelouses synthétiques, mise aux normes éclairage, accessibilité PMR, etc.
Petite confidence : dans mon coin, en Bretagne, on attend toujours le synthétique promis depuis 2018. Alors quand on entend « 550 millions », on se met à rêver. Rêver que le gamin du village n’aura plus à jouer avec des chaussures trouées parce que le club n’a pas les moyens d’acheter vingt paires neuves.
Ce que ça change concrètement pour votre club
Imaginons que vous soyez président, comme moi il y a quelques années, trésorier d’un petit club de 150 licenciés. Qu’est-ce que vous allez pouvoir espérer ?
- Une dotation de base augmentée (probablement autour de 8 à 12 000 € par club selon la taille)
- Des bonus si vous remplissez les critères « mérite »
- Des aides spécifiques si vous montez une section féminine
- Peut-être une prise en charge partielle de votre éducateur salarié
- Des kits matériel offerts (goals mobiles, plots, chasubles…)
Bref, pour la première fois depuis longtemps, un président de petit club va pouvoir envisager l’avenir sans avoir la boule au ventre à chaque fin de mois.
Attention aux effets pervers
Parce qu’il faut aussi être lucide : plus d’argent, c’est bien. Mais ça peut aussi créer des jalousies. Le club voisin qui touche 20 000 € de plus parce qu’il a coché trois cases de plus, ça peut tendre les relations. Et puis, il y a le risque bureaucratie : si pour toucher les primes au mérite il faut remplir 40 pages de dossier, beaucoup de bénévoles vont laisser tomber.
Mon petit doigt me dit que les districts et ligues vont avoir un rôle crucial pour simplifier tout ça. Espérons qu’ils soient à la hauteur.
Un modèle à la française qui fait des envieux
Ce qui est fou, c’est que peu de fédérations en Europe peuvent se permettre un tel effort. L’Allemagne a son système ultra-professionnalisé, l’Angleterre a la richesse de la Premier League qui ruisselle un peu, mais la France reste probablement le pays où le lien entre le sommet (l’équipe de France championne du monde) et la base (les 12 000 clubs) est le plus fort. Cette annonce renforce encore ce modèle.
Et quelque part, c’est une forme de justice. Parce que sans ces milliers de bénévoles qui tondent la pelouse le samedi matin et lavent les maillots le dimanche soir, il n’y aurait tout simplement pas de Mbappé, pas de Wendie Renard, pas de Griezmann.
Alors oui, 550 millions, c’est énorme. Mais quand on y pense, c’est aussi le juste retour des choses.
Allez, on croise les doigts pour que l’argent arrive vite et bien. Parce que le foot amateur, c’est le cœur battant du foot français. Et aujourd’hui, ce cœur va enfin pouvoir battre un peu plus fort.
