Vous est-il déjà arrivé de tourner en rond dans votre quartier parce qu’une voiture ventouse bloque le trottoir depuis des semaines ? Ou de sursauter à 2 heures du matin à cause d’un rodéo sauvage ? Moi, oui. Et comme beaucoup de monde, j’ai pesté, pris une photo… puis rien. À Nice, ce genre de situation pourrait bien appartenir au passé.
La ville vient de franchir un cap plutôt impressionnant : transformer chaque habitant en capteur vivant de la sécurité publique grâce à une simple mise à jour d’application. Le nom ? Allo PM. Derrière ces trois lettres, un dispositif qui fait déjà parler de lui et qui pourrait bien inspirer d’autres communes.
Allo PM : quand le smartphone devient le prolongement de la police municipale
Concrètement, ça change quoi dans votre quotidien ? Tout part de l’application existante « Allo Mairie », utilisée depuis 2010. Désormais, une nouvelle icône fait son apparition : « Allo PM ». Un clic, et vous êtes directement relié au centre de supervision de la police municipale. Plus besoin de chercher un numéro, plus besoin d’attendre qu’un agent décroche au standard. Le signalement part immédiatement, géolocalisé, souvent accompagné d’une photo.
Et ça marche pour à peu près tout ce qui pourrit la vie des habitants :
- Une voiture abandonnée qui squatte la place depuis des mois
- Un dépôt sauvage d’encombrants au pied de l’immeuble
- Des nuisances sonores récurrentes (chantier, bar, voisins…)
- Des rodéos moto ou voiture qui transforment la rue en circuit
- Un squat dans un immeuble voisin
- Des abus de trottinettes électriques sur les trottoirs
- Même un lampadaire HS ou un trou dangereux sur la chaussée
Le menu est tellement complet qu’on a presque l’impression de cocher une liste de courses des galères urbaines.
Une réponse garantie sous 48 heures… et parfois immédiate
Ce qui impressionne, c’est la promesse de traitement. Quatre agents sont dédiés en permanence à la réception de ces signalements. Si l’infraction est en cours (un rodéo, un tapage nocturne actif), l’un des quarante équipages déployés quotidiennement reçoit l’alerte et fonce sur place. Sinon, l’engagement est clair : réponse sous 48 heures maximum.
« On passe d’un système où l’information mettait parfois des jours à arriver au bon service à un traitement instantané et géolocalisé »
– Un responsable municipal lors de la présentation
Sur les 45 000 signalements annuels reçus via l’ancienne version de l’application, près de 10 000 concernaient déjà la sécurité ou les incivilités. Désormais, ces 10 000 alertes ne se perdront plus dans la nature.
Nice, laboratoire de la ville hyper-connectée en matière de sécurité
Il faut dire que la ville n’a pas attendu 2025 pour jouer la carte de la technologie. On se souvient des premières caméras de vidéosurveillance il y a vingt ans, des bornes d’appel d’urgence orange qui ont remplacé les anciennes cabines police-secours des années 70, ou encore des boutons d’alerte installés dans les écoles et certains commerces.
Allo PM s’inscrit dans cette longue lignée. Mais cette fois, c’est le citoyen lui-même qui devient le maillon actif. Un peu comme si la municipalité disait : « On a beau avoir 1 700 caméras et des centaines d’agents, rien ne remplace vos yeux et vos oreilles ».
D’ailleurs, dès le 1er décembre, un nouveau numéro court et facile à retenir (3606) viendra compléter le dispositif. Histoire que même ceux qui n’ont pas l’application puissent joindre la police municipale en trois secondes.
Et la vie privée dans tout ça ?
Question légitime. Quand on sait que chaque signalement est géolocalisé et peut contenir des photos, certains s’inquiètent d’une possible dérive. La réponse officielle est claire : les données sont traitées exclusivement par la police municipale, dans le cadre strict de ses missions, et effacées après traitement sauf en cas de procédure judiciaire.
En pratique, l’immense majorité des signalements reste anonyme si l’usager le souhaite. Seule obligation : laisser un moyen d’être recontacté si les agents ont besoin de précisions. Rien de bien méchant, donc.
Les habitants déjà conquis… ou presque
Dans les comités de quartier, les retours sont plutôt positifs. Une dame raconte avoir signalé un trou béant sur un trottoir : « Réparé en trois jours, je n’en revenais pas ». Un autre habitant du vieux Nice évoque un dépôt d’ordures récurrent : « Depuis que je signale régulièrement avec photo, les services passent plus souvent ».
Évidemment, tout n’est pas parfait. Certains regrettent que l’application ne permette pas (encore ?) de suivre l’avancement de son dossier en temps réel. D’autres aimeraient un retour systématique, même quand le problème est réglé. La mairie promet des évolutions rapides.
Vers une généralisation dans d’autres villes ?
Ce qui se passe à Nice ne passe pas inaperçu. Plusieurs grandes villes françaises suivent le projet de près. Car au fond, le modèle est reproductible : une application existante, quelques agents dédiés, un centre de supervision déjà en place. Le coût marginal est faible comparé à l’effet attendu.
Et puis il y a cette idée sous-jacente, presque philosophique : dans une époque où l’on parle beaucoup de désengagement citoyen, voilà une manière concrète de redonner du pouvoir d’action à chacun. Signaler un problème n’est plus un geste inutile, c’est un acte qui déclenche une réaction mesurable.
Ce que ça dit de notre société
Personnellement, je trouve l’initiative à la fois géniale et un peu troublante. Géniale parce qu’elle répond à un vrai besoin : celui de ne plus se sentir impuissant face aux petites et grandes incivilités. Troublante parce qu’elle officialise un peu plus cette tendance où la technologie remplace parfois le lien humain direct.
Mais soyons honnêtes : quand le voisin du dessus fait la fête jusqu’à 5 heures du matin, combien d’entre nous osent aller frapper à sa porte ? L’application offre une troisième voie : ni la confrontation directe, ni l’indifférence résignée.
Et vous, seriez-vous prêt à devenir les yeux numériques de votre quartier ? À jouer le jeu de cette surveillance participative 2.0 ? À Nice, des milliers d’habitants ont déjà répondu oui. Et quelque part, ça change pas mal de choses sur la manière dont on vit ensemble en ville.
Une chose est sûre : avec Allo PM, la Côte d’Azur ne se contente plus de vendre du soleil et des galets. Elle expérimente, parfois à marche forcée, ce que pourrait être la ville de demain. Une ville où la sécurité ne repose plus seulement sur les forces de l’ordre… mais sur nous tous.
Alors, prêt à télécharger la mise à jour ? Votre quartier vous dira peut-être merci.
