Imaginez la scène : les néons de Las Vegas qui dansent sur l’asphalte encore chaud, des milliers de flashs qui crépitent, et au milieu de tout ça, une gamine d’Ivry-sur-Seine, 21 ans à peine, qui lève les bras au ciel en hurlant « je n’arrive pas à y croire ». C’est exactement ce qui s’est passé dans la nuit de samedi à dimanche. Doriane Pin vient de décrocher le titre de championne F1 Academy 2025. Et franchement, on a tous un peu la chair de poule.
Une « Pocket Rocket » qui a mis le feu à la saison
On l’appelle Pocket Rocket. Fusée de poche. Le surnom colle parfaitement à cette pilote menue qui cache une détermination en acier trempé. Deuxième l’an dernier, Doriane n’a pas fait dans la demi-mesure cette année : quatre victoires, huit podiums, jamais plus loin que la sixième place en quatorze courses. Une régularité de métronome dans un championnat où la moindre erreur se paie cash.
À Las Vegas, elle n’avait même pas besoin de gagner la dernière course. Une cinquième place suffisait. Mais quand on a passé toute sa vie à attaquer, freiner tard et dépasser là où personne n’ose, on ne change pas comme ça. Elle a géré, proprement, sans prendre de risques inutiles, pendant que sa rivale directe, la Néerlandaise Maya Weug, tentait le tout pour le tout. Résultat : quinze points d’avance au classement final. Indiscutable.
L’émotion brute sur le podium
Les images parlent d’elles-mêmes. Doriane sort de sa monoplace, enlève son casque, et là… c’est la délivrance. Elle court vers la voie des stands et saute dans les bras de Toto Wolff. Oui, le grand patron Mercedes, celui qui dirige l’une des plus grosses écuries de Formule 1. George Russell et Kimi Antonelli, les deux pilotes officiels, sont là aussi pour la féliciter. On sent que ce n’est pas juste poli. C’est sincère. Cette gosse fait partie de la famille maintenant.
« Je n’arrive pas à y croire ! J’ai travaillé tellement dur avec l’équipe. Ils ont fait partie de mon succès depuis le premier jour, depuis que j’ai rejoint Mercedes. On travaillait uniquement pour que je sois championne… et c’est fait. »
Doriane Pin, juste après avoir été sacrée
Cette phrase, elle l’a répétée plusieurs fois. Et à chaque fois, la voix qui tremble un peu. Parce que derrière le casque et la combi ignifugée, il y a une jeune femme qui réalise que son rêve d’enfant vient de prendre une dimension folle.
Un parcours déjà dingue à seulement 21 ans
Revenons deux minutes en arrière pour ceux qui découvriraient Doriane aujourd’hui. Championne de France de karting à 15 ans. Débuts en monoplace, puis déjà des courses en endurance – oui, elle a roulé aux 24 Heures du Mans, excusez du peu. Cette année, en parallèle de la F1 Academy, elle a disputé huit courses en FRECA (le championnat juste en-dessous de la F3) avec des résultats encourageants.
- 2019 → Championne de France de karting
- 2023 → Débuts en F4 et premières victoires
- 2024 → Vice-championne F1 Academy (à seulement 3 points du titre)
- 2025 → Championne F1 Academy + expérience en WEC et FRECA
Et tout ça avec le soutien de Mercedes depuis plusieurs années. Quand une écurie aussi prestigieuse vous met dans son programme junior, ce n’est pas pour faire de la figuration.
La F1 Academy, c’est quoi exactement ?
Pour ceux qui auraient loupé les épisodes précédents : la F1 Academy, c’est le championnat 100 % féminin créé en 2023 pour accélérer l’arrivée des femmes dans le grand bain de la Formule 1. Des Formule 4 identiques, sept week-ends en support des Grands Prix de F1, et chaque pilote représente une écurie du plateau reine. Doriane courait sous les couleurs Mercedes avec l’équipe italienne Prema, une référence absolue en sport auto.
Le concept fait parfois débat – certains trouvent ça génial, d’autres estiment qu’on devrait mélanger tout le monde dès le plus jeune âge. Moi je trouve que ça marche : on parle enfin de pilotes femmes sans que ce soit exceptionnel. Et quand on voit le niveau cette année, franchement, on se dit que certaines pourraient embêter pas mal de garçons dans les catégories supérieures.
Et maintenant ? Vers la F3, la F2… et pourquoi pas la F1 ?
La grande question que tout le monde se pose : quelle suite pour Doriane ? Chez Mercedes, on ne cache pas qu’on la voit grimper vite. La F3 l’an prochain semble évidente. Peut-être même un programme mixte F3/F2 comme certains garçons du programme. Toto Wolff l’a dit plusieurs fois : « On veut une femme en Formule 1 d’ici 5 à 10 ans ». Et quand le patron parle, généralement, ça se concrétise.
Ce qui est sûr, c’est que Doriane Pin a coché toutes les cases cette saison : vitesse, régularité, mental d’acier, communication parfaite. Les ingrédients qu’il faut pour monter. Et quand on voit à quel point elle est déjà respectée par Russell ou Antonelli, on se dit que le chemin est tracé.
Les femmes en Formule 1 : un peu d’histoire pour mesurer le chemin
On aime bien rappeler que seulement cinq femmes ont pris le départ d’un week-end de Grand Prix en 75 ans d’histoire. Deux ont réellement couru. Une seule a marqué des points (Lella Lombardi, 0,5 point en 1975). C’est dire le désert. Aujourd’hui, avec la F1 Academy, on est en train de construire la génération qui va peut-être faire exploser ces statistiques.
Doriane n’est pas seule : il y a aussi Jamie Chadwick (triple championne W Series), Lia Block, ou encore Abbi Pulling qui a gagné le titre l’an dernier. Elles se tirent toutes la bourre et c’est magnifique à voir.
Pourquoi ce titre fait vibrer la France entière
Parce qu’on a beau avoir eu des champions du monde (Prost, quatre fois quand même), on reste un pays qui adore ses jeunes talents qui cassent la baraque. Doriane, c’est la gamine du Val-de-Marne qui a commencé en karting sur des petites pistes de région parisienne et qui se retrouve aujourd’hui à sauter dans les bras du boss Mercedes sous les lumières de Vegas. C’est le genre d’histoire qui nous fait aimer le sport auto.
Et puis, soyons honnêtes, on en avait besoin. Entre les galères d’Alpine, les saisons compliquées de certains pilotes français en F1, voir une jeune Tricolore tout casser à l’international, ça fait du bien au moral.
Ce titre, c’est aussi un message fort pour toutes les petites filles qui rêvent de pilotage. Oui, c’est possible. Oui, on peut être championne. Oui, on peut viser la Formule 1. Et quand on s’appelle Doriane Pin et qu’on a déjà Mercedes dans le rétro, on se dit que le rêve n’a jamais été aussi proche de la réalité.
Alors bravo championne. Et rendez-vous l’an prochain, quelque part entre la F3 et, qui sait, peut-être déjà quelques tests en F1. Parce que quand une Pocket Rocket est lancée… ça va très très vite.
