Vous est-il déjà arrivé de sentir que le calendrier jouait contre vous ? Imaginez un peu : vous lancez une enquête sensible sur la chaîne d’information numéro un en France… et paf, elle tombe exactement au moment où une commission parlementaire passe au peigne fin la neutralité de votre propre maison. C’est précisément ce qui se passe en ce moment dans les couloirs du service public.
Je ne vais pas tourner autour du pot : le prochain numéro de cette émission d’investigation bien connue risque de faire des étincelles. Et pas seulement à l’antenne.
Un timing qui tombe… comme par hasard
Ce jeudi soir, les téléspectateurs découvriront un portrait sans concession de la première chaîne info du pays. Un travail commencé il y a presque un an, avec des témoignages rares, des anciens qui parlent, des séquences tournées discrètement. Tout ça pour un sujet qui, soyons honnêtes, sent la poudre depuis longtemps.
Mais voilà, le hasard fait parfois très mal les choses. Ou très bien, selon le camp où l’on se trouve.
Pendant que les équipes peaufinent le montage final, une commission d’enquête parlementaire démarre ses auditions sur… la neutralité, le fonctionnement et le financement de l’audiovisuel public. Vous avez dit gênant ? Certains cadres du groupe public n’hésitent pas à le dire tout bas : « Le calendrier ne nous arrange vraiment pas… »
Quand l’enquête devient un boomerang
Ce qui rend la situation cocasse – ou tragique, c’est selon – c’est que le service public vient à peine de porter plainte contre plusieurs médias privés pour dénigrement. Quelques jours plus tard, il diffuse une enquête à charge contre l’un d’eux. Vous voyez le paradoxe ? Dans les couloirs adverses, on ne se prive pas de sourire jaune.
« Un mardi ils nous attaquent pour dénigrement, le jeudi suivant ils balancent une émission qui tape à bras raccourcis. Ils sont bizarres, non ? »
La phrase circule, attribuée à des proches du groupe propriétaire de la chaîne visée. Et franchement, on peut comprendre l’ironie.
Des témoignages qui pèsent lourd
Ce n’est pas une émission de plus. Les journalistes ont recueilli des confidences internes qui font mal. Un ancien qui raconte comment, pendant la campagne présidentielle, on lui demandait de « faire que du muslim, muslim, muslim ». Un autre qui explique les pressions pour favoriser très clairement un candidat. Des séquences tournées au palais de justice après certaines condamnations. Bref, du lourd.
Et comme toujours dans cette émission, il y a cette séquence finale culte : les fameux fauteuils rouges. L’invitation à venir s’expliquer face caméra. D’après mes informations, les animateurs vedettes et même le patron de l’information ont tous été contactés. À l’heure où j’écris ces lignes, personne n’a accepté. Étonnant ? Pas vraiment.
Une direction qui fait confiance… ou qui n’a pas le choix
On murmure que certains espèrent un coup de frein de dernière minute. Que la patronne du groupe public, connue pour son sens politique, pourrait intervenir. Sauf que, officiellement, elle ne voit jamais les sujets avant diffusion. Principe de confiance absolue envers les rédactions. Elle ne l’a pas fait pour des enquêtes sur des ministres en exercice, ni sur de très hauts personnages de l’État. Alors pourquoi le ferait-elle maintenant ?
À mon avis, ce serait prendre le risque d’un précédent dangereux. Refuser de diffuser reviendrait à reconnaître que l’enquête est trop explosive. Et ça, politiquement, ce serait peut-être pire que de la diffuser.
La commission qui plane comme une épée de Damoclès
Revenons à cette fameuse commission. Elle n’est pas née par hasard. Elle fait suite à plusieurs affaires récentes qui ont mis le feu aux poudres sur la question de la neutralité dans les médias publics. Et dès le premier jour, les auditions commencent fort avec le régulateur de l’audiovisuel.
Autant dire que l’émission de jeudi va tomber comme un pavé dans la mare. Les parlementaires de tous bords – surtout ceux qui ont poussé pour cette commission – vont avoir du grain à moudre. On imagine déjà les questions : « Comment expliquer que le service public enquête sur une chaîne privée au moment même où on examine son impartialité ? »
- Des images choc risquent d’être projetées en boucle
- Des extraits de témoignages diffusés dans l’hémicycle
- Une récupération politique quasi inévitable
Et pourtant… est-ce que cela justifie de ne pas diffuser ? Personnellement, je ne le pense pas. Une enquête sérieuse, étayée, mérite l’antenne, quel que soit le calendrier.
Une guerre des médias qui ne date pas d’hier
Soyons lucides : cette tension n’est que la partie émergée de l’iceberg. Depuis plusieurs années, deux visions de l’information s’affrontent frontalement en France. D’un côté, un pôle privé qui assume une ligne éditoriale marquée, de l’autre un service public qui se veut garant du pluralisme mais qui est régulièrement accusé de biais inverses.
Entre les deux, les coups volent bas. Plaintes, communiqués assassins, petites phrases dans la presse. On en est là.
Ce qui change aujourd’hui, c’est que le débat sort des rédactions pour entrer dans l’arène parlementaire. Et ça, c’est nouveau. Ça donne une dimension institutionnelle à ce qui ressemblait jusqu’ici à une guerre de tranchées médiatiques.
Et le téléspectateur dans tout ça ?
C’est peut-être la question la plus importante. Au milieu de ces batailles d’ego, de ces stratégies de communication et de ces calculs politiques, il reste nous. Ceux qui allument la télé le soir pour essayer de comprendre le monde.
Est-ce qu’on a encore le droit d’avoir des chaînes qui assument leurs opinions ? Est-ce que le service public doit être un miroir neutre ou un contre-feu idéologique ? Et surtout : qui décide de ce qui est acceptable ou pas ?
Je vous pose la question parce que, franchement, je n’ai pas de réponse toute faite. Ce qui est sûr, c’est que jeudi soir, beaucoup de gens vont regarder cette émission avec un mélange d’excitation et d’appréhension. Et peut-être que, pour une fois, on parlera plus du fond que de la forme.
Ce qu’il faut retenir
Pour résumer cette semaine qui s’annonce électrique :
- Une enquête très attendue va être diffusée malgré un timing explosif
- La direction du service public marche sur des œufs
- Une commission parlementaire va se régaler (ou s’en servir)
- Les principaux intéressés refusent de venir s’expliquer
- Et nous, on va regarder tout ça avec des popcorns
Parce qu’au fond, c’est aussi ça la démocratie médiatique française en 2025 : un grand spectacle parfois, une vraie bataille d’idées souvent, et toujours cette question lancinante : qui surveille les surveillants ?
Jeudi soir, on aura peut-être quelques éléments de réponse. Ou de nouvelles questions. Probablement les deux.
En attendant, une chose est sûre : personne ne va s’ennuyer.
