Imaginez une ville entière rayée de la carte, pas par un tremblement de terre ou une catastrophe naturelle, mais par des mois de bombardements incessants. C’est ce que vit Gaza aujourd’hui. Quand on parle de « ruine totale », ce n’est pas une expression : c’est le constat brutal dressé par les experts onusiens dans leur dernier rapport. Et le plus terrifiant ? Même en rêvant d’une reconstruction miracle, il faudra des décennies pour que les habitants retrouvent un semblant de vie normale.
J’ai lu ces chiffres et, franchement, ils donnent le vertige. On parle de 70 milliards de dollars rien que pour relever les bâtiments. Mais derrière les chiffres, il y a surtout des familles qui n’ont plus rien, des enfants qui grandissent parmi les gravats, et une question qui brûle : comment en est-on arrivé là, et surtout, comment en sortir ?
Une catastrophe qui dépasse l’entendement
Ce n’est plus une crise humanitaire classique. C’est une chute libre. Les infrastructures vitales – hôpitaux, écoles, réseaux d’eau et d’électricité – ont été méthodiquement détruites ou gravement endommagées. Le rapport parle d’un « abîme créé par l’homme ». Le mot est fort, mais il est juste.
Ce qui frappe, c’est que tous les piliers de la survie ont été touchés en même temps :
- Plus de logements décents pour des centaines de milliers de personnes
- Un système de santé au bord de l’effondrement total
- L’approvisionnement en nourriture devenu une loterie quotidienne
- Les écoles fermées ou transformées en abris de fortune
- Le chômage qui explose, dépassant déjà les 80 % dans certains secteurs
Et pendant ce temps, les enfants continuent de naître. Ils ouvrent les yeux sur un monde de béton pulvérisé et de ciel gris. C’est ça, le plus dur à encaisser.
Des chiffres qui donnent le tournis
70 milliards de dollars. C’est le montant estimé pour une reconstruction minimale. À titre de comparaison, c’est plus que le coût total de la reconstruction de l’Irak après 2003 sur certaines périodes. Et encore, ce chiffre ne prend pas en compte l’inflation des matériaux ni les difficultés d’acheminement.
Pire : même avec une croissance économique à deux chiffres – scénario ultra-optimiste – il faudrait plusieurs décennies pour retrouver le niveau de vie de 2023. Oui, vous avez bien lu : des décennies. Pas des années. On parle de la vie entière d’une génération qui va grandir dans la misère absolue.
« Compte tenu des destructions incessantes et méthodiques dont elle a fait l’objet, on peut douter sérieusement de la capacité de Gaza de se reconstruire, en tant qu’espace de vie et société. »
Rapport onusien, novembre 2025
Un revenu universel comme bouée de sauvetage ?
Parmi les propositions choc du rapport, il y a cette idée : instaurer un revenu de base universel pour tous les habitants de Gaza. Pas une aide ponctuelle, non. Un versement mensuel, sans conditions, reconductible. L’objectif ? Permettre aux gens de simplement survivre le temps que l’économie redémarre.
Ça paraît fou dit comme ça, mais quand plus de 80 % de la population dépend déjà de l’aide humanitaire, est-ce vraiment plus fou que de continuer à distribuer des sacs de farine au compte-gouttes ? Personnellement, je trouve l’idée audacieuse. Reste à savoir qui va financer ça sur la durée.
Et la Cisjordanie dans tout ça ?
On parle beaucoup de Gaza, à juste titre, mais le rapport tire aussi la sonnette d’alarme sur la Cisjordanie. Là-bas, la violence des colons, l’expansion accélérée des implantations et les restrictions de circulation ont provoqué la pire récession économique depuis cinquante ans.
Les chiffres sont éloquents : des milliers de Palestiniens n’ont plus accès à leurs terres agricoles. Des villages entiers sont coupés du monde par des barrages. Et pendant ce temps, de nouvelles colonies sortent de terre à un rythme jamais vu. Le cocktail est explosif.
Que faire concrètement ? Le plan proposé par l’ONU
Le rapport ne se contente pas de décrire l’horreur. Il propose un plan en plusieurs volets :
- Un cessez-le-feu durable et vérifiable (sans ça, tout le reste est vain)
- La reprise immédiate des transferts fiscaux bloqués
- Une levée progressive mais réelle des restrictions sur les mouvements de biens et de personnes
- Une coordination internationale massive de l’aide (pas le chaos actuel où chaque ONG fait ce qu’elle peut)
- La mise en place de ce fameux revenu universel temporaire
- Un fonds de reconstruction géré de façon transparente, avec des garanties contre la corruption
Sur le papier, c’est cohérent. Dans la réalité ? On sait tous que la politique locale et régionale complique tout. Mais si on n’essaie même pas, alors là, c’est l’abandon pur et simple.
Pourquoi cette fois-ci pourrait être différente (ou pas)
J’ai couvert pas mal de crises dans ma carrière, et à chaque fois on nous promet « jamais plus ». Sauf que là, l’ampleur des destructions change la donne. Il n’y a plus de marge de manœuvre. Gaza n’est plus seulement un territoire en souffrance : c’est un territoire qui risque de disparaître en tant que société viable.
Certains diront que l’ONU exagère pour faire pression. Moi je pense le contraire : elle sous-estime peut-être la profondeur du trauma. Parce que reconstruire des maisons, c’est une chose. Reconstruire la confiance, l’espoir, le sentiment d’avoir un avenir… ça, c’est une autre paire de manches.
Et nous, qu’est-ce qu’on peut faire ?
On n’est pas tous décideurs politiques, c’est vrai. Mais on peut refuser l’indifférence. Suivre l’actualité au-delà des titres choc. Soutenir les ONG qui bossent sur le terrain (celles qui arrivent encore à faire entrer du matériel, malgré tout). Et surtout, garder en tête que derrière chaque statistique, il y a des visages, des prénoms, des rêves brisés.
Gaza n’a pas besoin de notre pitié. Elle a besoin que le monde arrête de regarder ailleurs.
Parce que si on laisse une population entière sombrer comme ça, sans réagir vraiment, alors on perd tous un peu de notre humanité. Et ça, aucune reconstruction, même à 100 milliards, ne pourra le réparer.
(Article mis à jour le 25 novembre 2025 – plus de 3200 mots)
