Franchement, quand on ouvre le placard à produits vaisselle, on ne s’attend pas à tomber sur une petite révolution industrielle. Et pourtant, c’est exactement ce qui est en train de se passer sous nos yeux, quelque part entre Vannes et Lorient.
Un lave-vaisselle 100 % français, conçu pour être réparé facilement, fabriqué en Bretagne et déjà réservé à 60 000 exemplaires avant même sa sortie officielle : ça ressemble à un rêve un peu fou, non ? Eh bien ce rêve a un nom : Albert. Et il pourrait bien changer pas mal de choses dans nos cuisines… et dans l’industrie française tout court.
Le grand retour du made in France dans le gros électroménager
Avouez-le : la dernière fois que vous avez acheté un lave-vaisselle, vous avez probablement choisi entre une marque allemande ultra-fiable, une italienne design ou une chinoise au prix imbattable. Le « fabriqué en France », on n’y croyait plus trop. À part quelques exceptions qui se comptent sur les doigts d’une main, le gros électroménager tricolore semblait appartenir au passé.
Et puis arrive cette petite start-up lancée en 2019, EverEver, qui se dit : pourquoi pas nous ? Objectif : créer le lave-vaisselle le plus durable possible, réparable pendant des années et assemblé dans l’Hexagone. Pas juste un gadget marketing, mais un vrai projet industriel.
Pourquoi maintenant ? Parce que tout converge
Il y a quelques années, l’idée aurait peut-être fait sourire. Aujourd’hui, elle tombe au meilleur moment. Entre la prise de conscience écologique, les tensions sur les chaînes d’approvisionnement mondiales et la volonté politique de relocaliser, les planètes sont alignées.
Les consommateurs, eux, ont changé. On veut bien payer un peu plus cher si on sait que l’objet durera plus longtemps et qu’il a été fabriqué dans des conditions décentes. D’ailleurs, les chiffres parlent d’eux-mêmes : le marché de l’électroménager reconditionné et réparable explose. Les gens en ont marre de jeter tous les cinq ans.
« L’intérêt, ce n’est pas d’avoir le mix énergétique le plus décarboné du monde si, derrière, on importe tous nos objets du bout de la planète. »
– Un industriel breton qui résume parfaitement l’esprit du projet
Albert, c’est quoi exactement ?
Albert, ce n’est pas juste un nom rigolo (clin d’œil à Einstein, parce qu’il est malin, paraît-il). C’est un lave-vaisselle pensé dès le départ pour durer. Pièces standardisées, vis au lieu de colle, schémas de montage disponibles, indice de réparabilité affiché fièrement au-dessus de 9/10 : tout est fait pour qu’on puisse le réparer soi-même ou par n’importe quel dépanneur.
Et côté performances ? On est au niveau des meilleurs allemands : silence, efficacité énergétique A, consommation d’eau maîtrisée. Mais avec un bonus non négligeable : la plupart des composants viennent d’Europe, certains même de France. Le bilan carbone fond comme neige au soleil.
- Conçu pour être réparé 15 à 20 ans minimum
- 80 % des pièces recyclables ou recyclées
- Production locale = empreinte transport réduite de 90 % par rapport à l’Asie
- Partenariat avec des fournisseurs français et européens
- Garantie 10 ans pièces et main-d’œuvre
Une usine bretonne qui redonne le sourire à toute une région
L’usine choisie se trouve dans le Morbihan. Un territoire qui a connu son lot de fermetures ces dernières décennies. Quand on annonce une nouvelle ligne de production avec plusieurs dizaines d’emplois à la clé, ça fait du bien au moral.
Et ce n’est pas que symbolique. Les formations ont déjà commencé, les machines arrivent, les premiers prototypes tournent en « tests de vieillesse accélérée » (j’adore cette expression). En clair, on fait tourner l’appareil 24 h/24 pendant des mois pour simuler 15 ans d’utilisation. Histoire d’être sûr que la promesse tient la route.
Le plus fou ? Une grande enseigne nationale a déjà signé pour 60 000 unités. Autant dire que la production 2026 est quasi vendue avant même d’avoir commencé. Ça, mes amis, ça s’appelle un beau succès d’estime.
L’économie circulaire, enfin appliquée au gros électroménager
On parle beaucoup d’économie circulaire, mais dans le gros électroménager, c’est encore assez théorique. Là, on passe aux actes. EverEver a tout repensé :
- Reprise de l’ancien appareil (quel que soit la marque)
- Recyclage des composants encore bons pour un second cycle
- Possibilité de louer son lave-vaisselle plutôt que de l’acheter
- Programme de pièces détachées garanti 15 ans
Résultat ? On sort du modèle « acheter – jeter – racheter » qui nous plombe depuis trente ans. Et financièrement, ça devient intéressant : un appareil qui dure deux fois plus longtemps, c’est moitié moins de dépenses sur la durée.
Et les concurrents dans tout ça ?
Évidemment, les géants regardent ça de près. Certains sourient jaune, d’autres commencent à verdir leurs gammes à la hâte. Parce que oui, quand un petit Français arrive à faire aussi bien (voire mieux) en étant plus vert et plus réparable, ça pose question.
J’ai discuté avec des professionnels du secteur récemment. Beaucoup pensent que ce genre d’initiative va forcer tout le monde à bouger. Un peu comme quand les constructeurs automobiles ont dû suivre Tesla sur l’électrique. Là, c’est la même chose, mais dans nos cuisines.
Ce que ça dit de la France de 2025
Au-delà du lave-vaisselle, il y a quelque chose de plus grand qui se joue. Une forme de reconquête industrielle, mais version XXIe siècle. On ne va pas concurrencer la Chine sur les prix, on va jouer sur la qualité, la proximité et la responsabilité.
Et ça marche. Partout en France, des projets similaires émergent : des vélos à Saint-Étienne, des chaussettes à Troyes, des meubles en Normandie… Petit à petit, on reconstitue un tissu industriel cohérent. Albert n’est qu’un exemple parmi d’autres, mais il est particulièrement symbolique.
Parce que soyons honnêtes : un lave-vaisselle, tout le monde en a un (ou presque). Si même cet objet du quotidien peut redevenir français et durable, alors tout est possible.
Et vous, prêt(e) à franchir le cap ?
La grande question maintenant : quand Albert arrivera dans les magasins début 2026, est-ce que vous serez prêt(e) à mettre quelques centaines d’euros de plus pour un appareil fabriqué à 300 km de chez vous plutôt qu’à 10 000 ? Pour ma part, la réponse est oui. Pas par patriotisme béat, mais parce que ça fait simplement sens.
Après, je ne vais pas vous mentir : il y aura toujours des modèles d’entrée de gamme à 299 € fabriqués loin. Mais de plus en plus, on voit apparaître une clientèle prête à payer le prix juste pour un objet qui dure. Et cette clientèle grandit tous les jours.
Albert n’est peut-être que le début. Le début d’une vraie vague française dans l’électroménager durable. Et quelque part, ça fait du bien de se dire que oui, on peut encore fabriquer des choses chez nous. Des belles choses. Des choses qui durent.
Alors la prochaine fois que vous lancerez votre programme éco à 45 °C, pensez-y : peut-être que bientôt, votre machine s’appellera Albert. Et qu’elle aura été assemblée par un gars ou une fille du Morbihan qui est fier de son boulot.
Moi, ça me fait sourire. Et franchement, ça fait un bien fou.
(Article rédigé après avoir suivi pendant plusieurs mois le développement de ce projet. Toutes les informations sont vérifiées auprès des équipes concernées. Sortie prévue premier semestre 2026 – on a hâte.)
