Vous est-il déjà arrivé de voir un joueur rater une occasion toute faite, lever les yeux au ciel une seconde et, l’instant d’après, vous faire lever de votre siège par un geste de génie ? C’est exactement ce que provoque Igor Paixao depuis son arrivée à Marseille. À 25 ans, le Brésilien débarqué de Rotterdam contre un chèque de 35 millions d’euros cristallise tout : le talent brut, la générosité débordante, et cette petite pointe de folie qui rend le football si addictif.
Ce mardi soir, le Vélodrome va encore vibrer pour lui face à Newcastle. Titulaire presque assuré sur l’aile gauche, Paixao porte déjà dans le cœur des supporters une place que peu de recrues obtiennent aussi vite. Mais comment en est-on arrivé là ?
Le sourire qui désarme tout le monde
Il y a des joueurs qui entrent dans un vestiaire et imposent le respect par la froideur ou l’aura. Igor Paixao, lui, passe par la porte avec un sourire XXL et une envie de bosser qui contamine tout le monde. À peine arrivé, il s’est mis à arriver quinze minutes avant chaque entraînement pour jongler, rire, discuter avec les préparateurs physiques. Le genre de détail qui ne trompe pas.
Les anciens de Feyenoord, où il a explosé la saison dernière (16 buts, 10 passes décisives), racontent tous la même chose. Un gamin toujours positif, qui ne se plaint jamais, qui court partout même quand le match est plié. Cette mentalité, il l’a héritée de son père, figure omniprésente dans son parcours. Une éducation stricte, presque militaire sur le terrain, mais trempée dans la joie brésilienne hors des lignes.
« Il était toujours le premier sur le terrain et le dernier à partir. Toujours un mot gentil, toujours un sourire. C’est le genre de garçon que tu adores coacher. »
Un ancien entraîneur néerlandais
Le pari à 35 millions qui fait encore débat
L’été dernier, quand le club phocéen a lâché 35 millions pour un ailier de Feyenoord, pas mal d’observateurs ont haussé le sourcil. Trop cher ? Pas assez constant ? Le début de saison, freiné par une blessure à la cuisse, n’a pas calmé les sceptiques. Et puis il y a eu ce match contre Nice, vendredi dernier.
5-1, festival offensif, et pourtant… À 2-0, Paixao se retrouve en un-contre-un avec le gardien. Au lieu de glisser le ballon à Aubameyang complètement seul à côté de lui, il tente la frappe. Ratée. Le stade retient son souffle une demi-seconde. Et là, la magie opère : personne ne lui en veut vraiment. Parce qu’on sait tous qu’il va se rattraper. Et il se rattrape : quelques minutes plus tard, c’est lui qui conclut une action magnifique, servi… par Aubameyang himself. Classe ultime.
Ce moment résume tout. Oui, il peut être égoïste parfois. Oui, il adore tenter le dribble de trop. Mais sa générosité dans l’effort, sa capacité à presser haut même à la 90e minute, effacent presque tout.
Un style qui rappelle les grands
Lui-même l’a dit un jour, avec cette humilité désarmante : « J’ai un peu les mêmes caractéristiques que Ribéry à ses débuts. » Le culot de dire ça à 25 ans, dans le club où Franck a marqué l’histoire, ça force le respect. Et pourtant, on voit le parallèle. Ce départ balle au pied depuis la gauche, cette frappe enroulée du droit qui part en lucarne, cette façon de provoquer en permanence.
- La frappe lointaine enroulée, son arme fatale (déjà trois fois en Ligue des Champions cette saison)
- Le pressing incessant, même quand ses jambes crient stop
- Les courses sans ballon pour libérer des espaces à Greenwood ou Aubameyang
- Et surtout, cette capacité à faire basculer un match sur un seul éclair
Contre le Sporting Portugal, il y a un mois, il plante une merveille de l’extérieur de la surface. Le genre de but que tu regardes dix fois au ralenti. Le genre de but qui fait taire les derniers sceptiques.
De Zerbi : « Les joueurs de qualité doivent tenter »
Roberto De Zerbi, l’entraîneur marseillais, l’a très bien compris. Il refuse de brider son Brésilien. Après le match contre Bergame où Paixao avait multiplié les pertes de balle, l’Italien avait été clair :
« Igor doit dribbler, rater, et continuer à dribbler. Les joueurs de qualité ne doivent pas penser à éviter l’erreur, mais à tenter. »
Roberto De Zerbi
Cette philosophie colle parfaitement au personnage. Paixao n’est pas là pour gérer. Il est là pour enflammer. Et quand ça passe, le Vélodrome explose. Quand ça ne passe pas, il court deux fois plus pour récupérer le ballon. Simple, efficace, terriblement attachant.
Plus qu’un joueur : un mec en or
Ce qui touche peut-être le plus, c’est l’homme derrière le joueur. À une époque où certains stars se plaignent sur les réseaux à la moindre critique, Paixao reste d’une humilité rare. Il parle souvent de sa famille, de ses origines modestes, de la chance qu’il a de vivre son rêve.
Et puis il y a cette prise de position forte contre le racisme. Au Brésil comme en Europe, il n’hésite pas à monter au créneau. Ce n’est pas du marketing. C’est sincère. Et ça résonne particulièrement dans une ville comme Marseille, où le mélange et la passion ne font qu’un.
J’ai rarement vu un joueur s’intégrer aussi vite dans le cœur des supporters. Même quand il rate, on pardonne. Parce qu’on sent qu’il donne tout. Parce qu’il joue avec le sourire. Parce qu’il représente ce football-là : celui qui fait rêver, qui fait vibrer, qui fait lever les gamins de leur canapé.
Et maintenant ? Le match qui peut tout changer
Ce soir, face à Newcastle, l’OM joue gros en Ligue des Champions. Une victoire et les espoirs de qualification restent intacts. Une défaite et la saison européenne pourrait basculer. Dans ce contexte, Paixao a une carte magnifique à jouer.
On l’attend sur son aile gauche, face à une défense anglaise physique et rapide. On l’attend dans les un-contre-un, dans les appels croisés avec Aubameyang, dans les frappes de loin qui font trembler les filets. On l’attend, tout simplement, pour continuer d’écrire sa belle histoire marseillaise.
Parce qu’au fond, c’est ça Igor Paixao : un mec qui joue comme il vit. Avec le cœur, avec les tripes, avec cette joie communicative qui manque parfois au foot moderne. Et tant pis s’il rate de temps en temps. C’est le prix du spectacle. Et franchement, on est nombreux à trouver que ça vaut largement le coup.
Alors ce soir, quand le Vélodrome entonnera son nom, ce ne sera pas juste pour un joueur. Ce sera pour un gamin qui réalise son rêve et qui nous fait réaliser, nous aussi, pourquoi on aime ce sport plus que tout.
Allez l’OM. Et allez Igor. Continue de nous faire rêver, avec ou sans le ballon dans les pieds.
