Imaginez-vous face à un dessert qui fait plus de trente-trois mètres de long. Pas une blague, pas un montage photo : un vrai gâteau, pesant plus de cent cinquante kilos, réalisé pour une seule et unique raison : permettre à des musiciens bretons de vivre leur rêve américain. C’est l’histoire complètement dingue qui s’est déroulée un soir de novembre dans une petite commune du Finistère.
Et franchement, quand on aime la Bretagne, la pâtisserie et les belles initiatives, on ne peut qu’applaudir des deux mains.
Quand la mousse chocolat rencontre la cornemuse
Tout commence avec une idée aussi simple que géniale. Un bagad – vous savez, ces formations traditionnelles bretonnes avec bombardes, binious et tambours qui vous font vibrer l’âme – reçoit l’invitation de sa vie : défiler sur la 5e Avenue de New York pour la mythique parade de la Saint-Patrick. Soixante-dix musiciens, un voyage transatlantique, un budget qui donne le vertige. On parle de dizaines de milliers d’euros rien que pour les billets d’avion.
C’est là qu’Émilie, pâtissière dans la boulangerie familiale, a eu le déclic.
« Je me suis dit : pourquoi pas faire comme les autres records de gâteaux géants que j’ai vus passer, mais en reversant absolument tout au bagad ? La culture bretonne, ça se défend aussi avec du sucre et du chocolat ! »
Un record qui ne date pas d’hier dans la famille
Il y a dix-huit ans déjà, son père avait créé un entremets spécial pour célébrer le titre de champion de Bretagne du bagad local. La recette existait donc. Il suffisait de la multiplier… par cent, à peu près. Résultat : une mousse aérienne au chocolat relevée d’une pointe de piment d’Espelette (oui, en Bretagne on ose les alliances), des éclats de framboise qui claquent en bouche et un biscuit pressé croustillant en base.
157 kilos. 33,66 mètres exactement – assez pour battre très largement le précédent record français. Et surtout assez pour couper plus de mille parts.
Une soirée fest-noz qui sent bon le chocolat chaud
Le grand soir, c’est lors du fest-noz annuel du bagad que tout se joue. La salle est pleine à craquer, l’ambiance électrique. Le gâteau arrive comme une star, applaudi, photographié sous tous les angles. Les gens font la queue, billet à la main, déjà prêts à repartir avec leur petite boîte cartonnée.
En quelques heures à peine, les mille parts prévues s’écoulent. Complètement. À tel point qu’on a dû refuser du monde. L’argent récolté ? Directement reversé pour les billets d’avion. Mission plus qu’accomplie.
- Plus de 1 080 parts vendues en une seule soirée
- 157 kg de bonheur chocolaté
- 33,66 mètres certifiés par huissier
- Un budget voyage quasiment bouclé grâce à la gourmandise
Pourquoi ce genre d’histoire nous touche autant
Parce qu’au fond, c’est plus qu’un record culinaire. C’est la preuve que la solidarité locale existe encore. Dans un monde où on entend souvent parler de financements compliqués pour la culture, voir une artisan pâtissière mobiliser tout un territoire autour d’un gâteau, franchement, ça redonne foi en l’humain.
Et puis il y a ce mélange des genres tellement breton : la musique traditionnelle qui rencontre la haute pâtisserie, le piment d’Espelette qui se balade dans une mousse chocolat sous les drapeaux noir et blanc. C’est inattendu, c’est joyeux, c’est généreux.
Et après ? Le gâteau reste au menu
Bonne nouvelle pour les gourmands : la version « taille humaine » de cet entremets est désormais proposée à la boutique toute l’année. Et pour Noël, Émilie a prévu une petite surprise : du sucre pétillant à l’intérieur pour faire péter les papilles en même temps que les cotillons.
Quant au bagad, les valises se remplissent doucement. Mars approche. Bientôt, on verra soixante-dix Bretons faire résonner leurs cornemuses sur la plus célèbre avenue du monde, sous les confettis verts de la Saint-Patrick.
Et quelque part, dans chaque note jouée, il y aura un petit goût de chocolat et de framboise.
Des initiatives comme celle-ci, on en redemande. Elles montrent que même les rêves les plus fous peuvent se financer avec un peu d’imagination, beaucoup de travail et une bonne dose de solidarité. Alors la prochaine fois que vous croiserez un gâteau un peu trop grand dans une fête de village, demandez-vous quelle belle cause il cache peut-être. En Bretagne, en tout cas, on a déjà la réponse : ça peut vous emmener jusqu’à New York.
