Vous arrive-t-il parfois de tomber sur une histoire tellement rocambolesque qu’elle semble sortie tout droit d’un scénario de film policier ? Un flic respecté qui bascule du mauvais côté, monte des braquages, finit en prison, ressort… et replonge dans une affaire de plusieurs millions. Et pourtant, c’est la vie bien réelle d’un homme qui vient à nouveau de faire parler de lui devant les tribunaux parisiens.
À 69 ans, il aurait pu profiter d’une retraite tranquille. Au lieu de ça, il se retrouve avec un bracelet électronique à la cheville et une addition salée de 270 000 euros. Le plus fou ? Il échappe une nouvelle fois à la prison ferme classique. Bienvenue dans le parcours hors norme de celui que certains appellent encore « le patron du gang du 36 ».
Du héros de la BRB au braqueur le plus célèbre de France
Remontons un peu le temps. Dans les années 80-90, il était l’un des flics les plus brillants de la brigade de répression du banditisme. Des affaires retentissantes, des interpellations spectaculaires, un nom qui faisait trembler les voyous. Et puis, un jour, le vent a tourné. Radicalement.
Traîtrise, corruption, ou simple goût du risque ? Les raisons précises importent peu aujourd’hui. Ce qui reste, c’est qu’il a franché la ligne. Armé, masqué, il a participé à des braquages d’une audace folle. Condamné lourdement, il a passé de longues années derrière les barreaux. À sa sortie, beaucoup pensaient que le chapitre était clos.
Erreur. L’homme n’a jamais vraiment raccroché.
L’affaire de l’immeuble fantôme du 10e arrondissement
Nous sommes en 2013. Un bel immeuble parisien, valeur estimée à près de 2 millions d’euros, appartient à une société italienne. En quelques mois, le bâtiment change de mains. Le produit de la vente ? Disparu dans la nature. Ou plutôt, savamment dispersé.
Comment fait-on pour vendre un bien qui ne vous appartient pas ? C’est là qu’intervient une équipe particulièrement inventive :
- Faux actes notariés
- Comptes bancaires ouverts avec des identités bidons
- Factures fictives pour justifier les mouvements d’argent
- Un réseau de complices allant de l’homme d’affaires respectable au trafiquant notoire
L’argent transite, se fractionne, passe par des agences de voyage, des comptes aux Antilles, et finit en grande partie dans les poches de quelques initiés. Parmi eux, notre ex-policier, déjà bien connu des services de justice.
Un procès où personne ne reconnaît rien
Fin septembre 2025, ils sont sept sur le banc des prévenus. L’ambiance est électrique. Chacun rejette la faute sur l’autre. Les avocats plaident la bonne foi, les erreurs administratives, l’absence de preuves directes.
« Mon client a toujours agi en toute légalité. Il n’a fait que rendre service à des amis. »
– Maître X, avocat de la défense
Le tribunal, lui, n’y croit pas une seconde. Après des heures de débats, le verdict tombe : cinq condamnations, deux relaxes. Et pour l’ancien flic, la peine la plus lourde.
Une peine qui fait débat : 12 mois ferme… à domicile
Trente mois de prison dont douze ferme, 270 000 euros d’amende, et confiscation de biens. Sur le papier, c’est sévère. Dans les faits ? Le condamné purgera sa peine sous bracelet électronique. Autrement dit : chez lui.
Il est vrai que l’homme a 69 ans. Qu’il a déjà passé de nombreuses années en détention par le passé. Que la prison, à son âge, peut poser des questions de santé. Mais tout de même. Quand on pense aux peines planchers, aux discours sécuritaires, cette décision fait grincer des dents.
J’ai moi-même du mal à trancher. D’un côté, on ne va pas remettre un sexagénaire en cellule pour le principe. De l’autre… un délit commis en récidive légale, avec une organisation quasi professionnelle, et une nouvelle fois, pas de prison effective. Ça laisse un goût amer.
Les autres condamnés : un casting haut en couleur
- Un homme d’affaires parisien : 3 ans dont 1 ferme (bracelet aussi)
- Un prétendu écrivain reconverti dans l’immobilier douteux : 18 mois avec sursis
- Un ancien codétenu du prévenu principal : 375 000 euros d’amende, la plus lourde
- Un intermédiaire : 10 mois avec sursis
À l’inverse, deux personnes s’en sortent totalement : un employé de banque qui jurait n’avoir rien vu, et un autre comparse dont le rôle n’a pas été prouvé.
Le bracelet électronique, solution miracle ou cache-misère ?
En France, on aime bien vanter ce dispositif. Moins cher que la prison, moins traumatisant, et censé permettre une réinsertion. Sauf que dans certains cas, on a l’impression que ça devient une porte de sortie systématique pour les cols blancs ou les personnalités « respectables ».
Quand un jeune de banlieue commet un délit mineur, on l’envoie direct en détention provisoire. Quand un ex-flic multimillionnaire récidive dans une affaire à plusieurs millions, on lui met gentiment un boîtier à la cheville. Cherchez l’erreur.
Attention, je ne dis pas que l’âge ou l’état de santé doivent être ignorés. Mais il y a quand même une question d’égalité devant la peine qui se pose cruellement.
Et maintenant ?
Les condamnés ont dix jours pour faire appel. Vu le montant des amendes et la complexité du dossier, il y a de fortes chances que l’histoire ne s’arrête pas là. On risque de revoir tout ce petit monde devant la cour d’appel dans les mois qui viennent.
En attendant, l’ancien policier va pouvoir continuer à vivre dans son appartement, sortir à heures fixes, recevoir ses proches. Une vie quasi normale, en somme. Pendant que les propriétaires italiens, eux, pleurent toujours leurs 1,9 million d’euros.
C’est ça aussi la justice : parfois implacable, parfois étonnamment clémente. Et c’est précisément ce qui fait que ces affaires continuent de nous fasciner, des années après.
Personnellement, ce genre d’histoire me laisse toujours songeur. On parle d’un homme qui a eu deux vies complètement opposées. D’un côté le flic héroïque, de l’autre le criminel retors. Et entre les deux, une zone grise immense où tout a basculé.
Est-ce qu’on naît voyou, ou est-ce qu’on le devient ? La question est vieille comme le monde. Mais quand c’est un ancien grand flic qui passe à l’acte, elle prend une saveur particulière.
Quoi qu’il en soit, l’histoire n’est probablement pas terminée. Et quelque part, c’est aussi pour ça qu’on ne peut pas détourner les yeux.
