Franchement, quand on regarde l’AS Monaco version 2025-2026, on a parfois l’impression de voir un puzzle dont la moitié des pièces principales ont disparu. Huitièmes de Ligue 1 après une série noire, un match décisif à Chypre qui sent déjà la poudre, et surtout cette question qui revient en boucle : mais où sont passés les tauliers ? Ceux qui devaient tirer l’équipe vers le haut quand ça tangue ?
Parce que oui, on peut toujours pointer les blessures – et elles sont nombreuses, presque suspectes à force – mais il y a autre chose. Une forme d’irrégularité chronique chez les joueurs censés être les piliers. Et quand tes cadres ne répondent plus présent, le bateau prend l’eau de partout.
Un effectif record… mais sans colonne vertébrale
Premier constat chiffré qui fait mal : Monaco est, avec Lille, l’équipe qui a utilisé le plus de joueurs différents depuis le début de saison. 28 noms déjà alignés. Marseille fait à peine pire avec 29. Dit comme ça, on pourrait y voir une profondeur d’effectif intéressante. Sauf que dans les faits, ça ressemble davantage à une équipe qui cherche désespérément sa base.
Ni sous Adi Hütter, ni sous Sébastien Pocognoli depuis mi-octobre, personne n’a réussi à installer une équipe type durable. Et quand tes leaders passent plus de temps à l’infirmerie qu’avec le ballon, forcément, ça coince.
Les blessures : un fléau qui touche pile les cadres
Denis Zakaria, capitaine, patron du milieu la saison dernière ? Huit semaines out pour les adducteurs. Il revient, se fait expulser à Rennes, et redevient indisponible en championnat. Lamine Camara, la pépite qui devait exploser ? Entorse à la cheville dès septembre, retour repoussé, on a même failli prendre un joker médical.
En défense, c’est la même chanson. Vanderson absent six semaines (ischios), Christian Mawissa stoppé net dans son ascension, Eric Dier qui enchaîne les pépins physiques… Même Lukas Hradecky, le gardien, a raté deux mois et demi sur une blessure au genou. À un moment, on se demande si le staff médical n’a pas une part de responsabilité.
« Les blessures, on ne peut pas les gérer. J’essaie d’être le plus pro possible et malheureusement, ça arrive quand même. »
Denis Zakaria, de retour à 100 %… mais suspendu
Phrase sincère, mais qui ne console personne. Car quand tes tauliers tombent les uns après les autres, le collectif devient une succession de pansements.
Changement d’entraîneur, changement de statut
Le départ d’Adi Hütter et l’arrivée de Pocognoli ont forcément créé des gagnants et des perdants. Folarin Balogun, par exemple, revit : 4 buts en 7 matchs sous le nouveau coach. Bonne nouvelle ? Oui. Sauf que dans le même temps, d’autres cadres historiques se retrouvent sur le banc ou en tribune.
Takumi Minamino en est le symbole parfait. Intouchable avec Hütter, connu depuis Salzbourg, il n’a été titularisé que trois fois en huit matchs par Pocognoli. Son profil ne colle plus, dit-on dans l’entourage. Résultat : le Japonais, déjà irrégulier la saison passée, végète.
Alexandre Golovine, doyen de l’effectif depuis 2018, subit le même sort. Sorti à la pause contre Lens lors de la claque 1-4, même pas entré en jeu à Rennes malgré le score fleuve. Son match héroïque à Bodø/Glimt (1-0) semble déjà loin. Le Russe paie peut-être le retour en masse des milieux après blessures. Mais quand même, voir un joueur de son standing mis à l’écart comme ça, ça interroge.
L’attaque : du feu de paille et beaucoup de fumée
Devant, c’est le festival… ou plutôt l’oasis dans le désert. Le 5-3 à Nantes fin octobre reste le seul match où l’attaque monégasque a vraiment brillé sous Pocognoli. Depuis ? Cinq petits buts en sept rencontres. Pas de quoi effrayer grand monde.
- Maghnes Akliouche : technique au-dessus, activité permanente, mais seulement décisif deux fois sur ses treize derniers matchs.
- Ansu Fati : début tonitruant (six buts, dont trois penalties), puis retour sur terre, gêné par des pépins de santé.
- Mika Biereth : artisan de la qualif’ en C1 l’an dernier, complètement perdu cette saison (deux buts seulement).
Le coach le dit lui-même à propos d’Akliouche :
« Il va falloir confirmer en continuant ce qui avait été bien fait en octobre. Ne pas trop se poser de questions et grandir sans trop se projeter. »
Belle phrase. Mais en attendant, les statistiques parlent : Monaco ne marque presque plus. Et quand tes joueurs offensifs les plus talentueux traversent tous une panne en même temps, ce n’est plus de la malchance. C’est structurel.
Paphos, le match de la dernière chance ?
Mardi soir, l’ASM se déplace à Chypre avec l’obligation de ramener quelque chose. Une défaite et la phase de groupes de Ligue des Champions pourrait déjà sentir le sapin. Face à une équipe de Paphos certes modeste, mais qui joue sans pression, tout peut arriver.
Et c’est peut-être là que tout se joue. Si les cadres – ceux qui restent valides – ne se réveillent pas maintenant, la saison risque de basculer définitivement. Car en Ligue 1, la 8e place actuelle commence à ressembler à un plafond de verre. Et on sait tous comment ça finit quand une équipe perd ses repères en novembre.
Et maintenant ?
J’ai ma petite idée : le problème n’est pas seulement physique ou tactique. Il est mental. Monaco a construit un effectif jeune, talentueux, mais sans vrai leader de vestiaire capable de secouer tout le monde quand ça va mal. Zakaria a le brassard, mais il est trop souvent absent. Golovine est discret de nature. Qui prend la parole ? Qui tape du poing sur la table ?
Le retour de Paul Pogba, même symbolique pour l’instant, montre aussi à quel point le club cherche des personnalités fortes. Mais on ne recrée pas un leadership en quelques matchs.
Alors oui, il y a du talent à revendre sur le Rocher. Oui, Pocognoli mérite du temps. Mais si les tauliers ne retrouvent pas rapidement de la constance – et de la santé –, Monaco risque de vivre une saison bien plus compliquée que prévu. Et là, même le soleil de la Principauté n’y pourra rien.
Mercredi soir à 18h45, on aura déjà une partie de la réponse. Espérons que les cadres seront enfin au rendez-vous. Parce que pour l’instant, ils brillent surtout par leur absence.
