Imaginez que vous déposiez votre enfant de cinq ans à l’école, comme tous les matins, avec le sourire et un bisou sur le front. Et qu’un jour, tout s’effondre. Une autre maman vous appelle, tremblante, pour vous dire que votre fille a peut-être été victime d’attouchements. C’est ce qui est arrivé à Juliette, dans le 11e arrondissement de Paris. Et son histoire est malheureusement loin d’être isolée.
Ce n’est pas juste un fait divers de plus. C’est le genre d’histoire qui vous retourne l’estomac et qui vous fait douter de tout le système censé protéger nos enfants. Alors je vais vous raconter ça, pas comme un simple compte-rendu, mais comme si on était assis autour d’un café et qu’on essayait de comprendre ensemble comment c’est possible en 2025.
Quand le mauvais pressentiment devient réalité
Juliette n’avait jamais vraiment aimé cet animateur. Vous savez, ce genre de feeling qu’on a parfois, sans pouvoir l’expliquer. Quand elle venait chercher sa fille Léa à la sortie du périscolaire, elle le voyait trop proche, trop tactile. « Une proximité anormale », dit-elle aujourd’hui. Mais bon, on se dit qu’on exagère, qu’on est parano, qu’on voit le mal partout. Surtout quand il s’agit d’enfants.
Puis un soir de printemps 2025, le téléphone sonne. Une autre maman. Sa propre fille vient de parler. Et le nom de Léa sort. Tout de suite, Juliette sait. « J’ai tout de suite su de qui il s’agissait », raconte-t-elle. Et là, c’est la descente aux enfers. Tous les petits signaux qu’elle avait remarqués chez sa fille depuis des mois prennent soudain un sens terrifiant.
« Immédiatement, on comprend tout. Tous les comportements de notre fille qui nous inquiétaient depuis la rentrée. »
Juliette, mère de Léa
Les signaux que personne n’a voulu voir
Les troubles alimentaires. Les crises de larmes en rentrant de l’école. Les maux de ventre à répétition. Cette soudaine réticence à aller en classe. Léa qui se roulait par terre certains soirs. Juliette et son mari pensaient à un caprice, à une phase difficile, peut-être à la séparation. Jamais ils n’avaient imaginé l’impensable.
Et pourtant, ces signaux, ce sont ceux que tous les spécialistes connaissent. Les enfants de cet âge-là ne savent pas toujours mettre des mots sur ce qu’ils vivent. Ils expriment leur souffrance avec leur corps, avec leurs comportements. Et là, personne n’a su lire entre les lignes.
- Refus soudain d’aller à l’école
- Crises de colère inexpliquées
- Troubles du sommeil et cauchemars
- Régression (pipi au lit, succion du pouce…)
- Douleurs somatiques sans cause médicale
Quand on y repense, c’est déchirant. Parce que Léa essayait de dire, à sa manière. Et personne ne l’a entendue.
Un animateur déjà signalé… et simplement déplacé
Et là, le pire. On apprend que cet homme de 35 ans avait déjà été signalé l’année précédente. Pour des faits similaires. Sur d’autres enfants. Et qu’est-ce qu’on a fait ? On l’a juste changé de section. De la petite section à la moyenne section. Comme si ça suffisait. Comme si déplacer le problème le faisait disparaître.
Le directeur de l’école avait alerté. Des mails avaient été envoyés. En chaîne. Et rien. Aucune suite. Ni par la hiérarchie, ni par la justice. On se renvoie la balle, on se dédouane. Et pendant ce temps, d’autres enfants croisent sa route.
Franchement, quand on entend ça, on a envie de hurler. Comment est-ce possible qu’un signalement pour des faits aussi graves n’ait entraîné aucune mesure sérieuse ? Comment peut-on prendre le risque de laisser un adulte soupçonné près d’enfants ?
« Le directeur avait renvoyé la balle au responsable éducatif de la Ville qui n’avait pas jugé bon d’en informer sa hiérarchie ni la justice. »
Sept victimes identifiées, dont cinq enfants
Au total, sept victimes ont été recensées. Cinq enfants de maternelle, et deux adultes collègues qui ont dénoncé du harcèlement sexuel. L’homme devait être jugé pour agressions sexuelles sur mineurs de moins de 15 ans. Mais l’audience a été reportée. Faute d’avocat. Encore un coup dur pour les familles qui attendent justice.
Et Juliette a dû le revoir, au tribunal. Cet homme qui a brisé quelque chose en sa fille. « Ça a été très difficile », confie-t-elle. Elle n’écoute même pas sa défense. Parce que pour elle, il n’y a pas de doute. Elle croit sa fille. Et les autres enfants qui ont parlé aussi.
Un système qui protège plus les adultes que les enfants
Ce qui révolte le plus Juliette, c’est le sentiment d’abandon. Par l’école. Par la Ville. Par tout le système périscolaire. Elle parle d’un discours « déshumanisé », très loin de la souffrance des enfants et des parents.
Et pourtant, mi-novembre 2025, un grand plan de lutte contre les violences sur mineurs a été annoncé. Beau sur le papier. Mais dans les faits ? Les signalements explosent. Les affaires se multiplient. Et les mêmes erreurs se répètent.
J’ai l’impression – et je pense que beaucoup de parents partagent ce sentiment – qu’on est face à un système qui préfère étouffer les affaires plutôt que de les affronter. Parce que reconnaître qu’un prédateur a pu agir pendant des mois, sous le nez de tout le monde, c’est admettre une faille immense.
Et maintenant ? La longue route de la reconstruction
Léa a cinq ans. Elle est toujours dans la même école. Ses parents ont longuement hésité. Changer d’établissement ? Rester pour ne pas la déraciner ? Ils ont choisi de rester. Mais une chose est sûre : plus jamais d’activités périscolaires. « Plus jamais », dit Juliette.
La petite fille est suivie psychologiquement. Elle parle, peu à peu. Elle dessine parfois des choses qui font mal au cœur. Mais elle va mieux. Lentement. Très lentement.
Et ses parents ? Ils portent une culpabilité immense. Celle de n’avoir pas vu. De n’avoir pas su protéger. Même si, objectivement, ils n’avaient aucun moyen de savoir.
Ce qu’il faut retenir, vraiment
Cette histoire n’est pas qu’un drame individuel. C’est le symptôme d’un problème beaucoup plus large. Tant qu’on continuera à minimiser les signalements, à déplacer les problèmes plutôt que de les traiter, à privilégier la tranquillité administrative sur la sécurité des enfants, ça recommencera.
- Écouter les enfants, même quand ils ne parlent pas avec des mots
- Prendre au sérieux tous les signalements, sans exception
- Former vraiment les personnels, pas juste cocher des cases
- Mettre en place des procédures claires et rapides
- Arrêter de protéger l’institution avant de protéger les enfants
Juliette termine son témoignage en disant qu’elle a confiance en la justice. Moi, je ne sais pas si j’aurais cette force. Mais une chose est sûre : des mamans comme elle, il en faudrait plus. Qui osent parler. Qui osent déranger. Parce que tant qu’on restera dans le silence poli, les enfants continueront de payer le prix.
Et vous, vous déposeriez encore votre enfant la boule au ventre ?
(Article basé sur un témoignage public recueilli en novembre 2025. Les prénoms ont été modifiés pour protéger l’anonymat des victimes.)
