Vous arrive-t-il parfois de vous dire que la politique, même à des milliers de kilomètres, ressemble à une série Netflix où tout le monde joue sa survie ? Hier, au Mexique, un épisode particulièrement intense vient de se clôture. Le procureur général, un homme de 86 ans qui semblait intouchable depuis six ans, a rangé ses dossiers. Pas de son plein gré, soyons honnêtes. C’est la nouvelle présidente qui a appuyé sur le bouton « éject ». Et franchement, ça faisait un moment que ça sentait la poudre.
Je vais vous raconter cette histoire comme si on était autour d’un café – parce que les faits bruts, on les trouve partout, mais le goût du dessous des cartes, c’est plus rare.
Un départ qui n’a rien d’une retraite paisible
Jeudi matin, le Sénat mexicain reçoit une lettre. Sobre, presque administrative. Alejandro Gertz Manero, procureur général depuis 2019, annonce qu’il quitte ses fonctions avec effet immédiat. Son mandat courait pourtant jusqu’en 2028. Neuf ans, c’est la règle depuis la réforme de 2018, histoire d’isoler un peu la justice des alternances politiques. Sauf que là, ça n’a pas tenu six ans.
La présidente Claudia Sheinbaum, elle, parle d’une « demande » acceptée. Le mot est poli. Dans les couloirs, on parle plutôt d’un ultimatum. Elle voulait plus de coordination entre le parquet fédéral et ceux des États contre le crime organisé. Lui, apparemment, traînait des pieds. Et quand on sait que le Mexique compte plus de 500 000 morts violentes liées au narco depuis 2006, on comprend que la patience a des limites.
« Nous avons besoin de beaucoup plus de coordination entre les parquets des États et le Parquet général de la République. »
Claudia Sheinbaum, conférence de presse matinale, 27 novembre 2025
Qui est vraiment Alejandro Gertz ?
À 86 ans, Gertz n’est pas n’importe qui. Psychiatre de formation, ancien chef de la police secrète sous Fox, secrétaire à la Sécurité publique, il a traversé tous les gouvernements. Nommé en 2019 par Andrés Manuel López Obrador, il incarnait la promesse d’une justice enfin indépendante. Sauf que très vite, l’image s’est fissurée.
En 2022, scandale familial : il fait arrêter sa belle-mère et sa belle-sœur de 80 et 90 ans, les accusant d’avoir provoqué la mort de son frère. La Cour suprême les libère à l’unanimité. L’accusation d’abus de pouvoir colle à la peau du procureur depuis.
Ensuite, les fuites. Des dossiers sensibles qui sortent dans la presse au pire moment pour le gouvernement. Dernier épisode en date : l’enquête pour trafic d’armes et de drogue visant Raul Rocha, copropriétaire… du concours Miss Univers. Oui, vous avez bien lu. L’affaire a éclaboussé jusqu’aux strass et paillettes. Beaucoup y voient la goutte d’eau.
Sheinbaum : la continuité qui rompt
Claudia Sheinbaum, première femme présidente du Mexique, élue en juin 2024 avec 59 % des voix, n’est pas là pour faire de la figuration. Dauphine d’AMLO, elle a hérité d’une majorité écrasante au Congrès et d’un parti, Morena, en position de force totale. Mais elle doit aussi prouver qu’elle n’est pas juste la « continuité » annoncée.
Ce départ forcé est son premier coup d’éclat. En moins de deux mois de mandat, elle décapite le sommet de la justice. C’est à la fois un message aux barons du système et une manière de reprendre la main sur la sécurité, le talon d’Achille du sexennat précédent malgré les discours.
- Elle parle coordination renforcée avec les États → traduction : fini les baronnies locales
- Elle écarte un procureur jugé trop autonome → traduction : le pouvoir exécutif reprend le volant
- Elle propose à Gertz un poste d’ambassadeur → la carotte classique pour éviter l’humiliation totale
Le vieux procureur a accepté le marché. On parle d’un « pays ami ». On saura bientôt lequel.
Pourquoi c’est plus qu’un simple jeu de chaises musicales
Parce que la justice mexicaine, c’est le nerf de la guerre contre les cartels. 98 % d’impunité, des milliers de disparus, des journalistes assassinés en série… Le parquet général est censé être l’arme lourde. Mais entre un procureur qui jouait solo et des gouverneurs parfois complices des narcos, rien n’avançait.
Sheinbaum veut une chaîne de commandement claire. Elle l’a dit dès sa campagne : la stratégie « abrazos no balazos » (des câlins, pas des balles) d’AMLO n’a pas marché sur le terrain. Elle garde la rhétorique sociale, mais elle semble prête à serrer la vis.
D’ailleurs, le timing n’est pas anodin. On est à quelques semaines du retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Les pressions sur l’immigration et le fentanyl vont reprendre de plus belle. Avoir un procureur aligné, c’est aussi préparer la négociation avec Washington.
Et maintenant ? Qui pour remplacer Gertz ?
Le Sénat doit valider le départ, puis le successeur proposé par la présidente. Avec la supermajorité de Morena, ce sera une formalité. Les noms circulent déjà : des profils plus techniques, moins politiques, mais surtout loyaux.
Certains parient sur une femme – ce serait historique. D’autres sur un juriste issu de la Cour suprême pour calmer les critiques sur l’indépendance. Quoi qu’il en soit, le prochain procureur aura neuf ans devant lui. Et un message clair : on ne dirige plus le parquet comme un royaume personnel.
Ce que ça nous dit du Mexique version Sheinbaum
Franchement, j’ai été surpris par la rapidité du mouvement. On imaginait une cohabitation tendue, pas une décapitation en règle dès le mois de novembre. Ça montre que la nouvelle présidente a les coudées franches et qu’elle n’a pas peur d’utiliser le pouvoir immense que les électeurs lui ont confié.
Est-ce le début d’un virage sécuritaire ? Pas sûr. Elle reste dans la ligne Morena : causes sociales, État fort, militaires dans la rue. Mais elle semble vouloir des résultats concrets. Et pour ça, il faut une justice qui fonctionne enfin.
En attendant, Alejandro Gertz s’en va avec ses cartons. L’homme qui voulait être le Eliot Ness mexicain finit par un poste d’ambassadeur. Ironie du sort ou sortie par la grande porte déguisée, chacun jugera.
Moi, je retiens une chose : au Mexique, en 2025, même les intouchables ne le restent pas longtemps quand la présidente s’appelle Claudia Sheinbaum.
Et vous, vous en pensez quoi ? Est-ce que c’était nécessaire ? Ou un dangereux précédent pour l’indépendance de la justice ? Les commentaires sont ouverts, comme toujours.
