Imaginez-vous réveillé à 4 heures du matin par le bruit de l’eau qui monte dans votre salon. En quelques heures, tout ce que vous possédez flotte ou disparaît. C’est exactement ce que vivent des millions de personnes dans le sud de la Thaïlande en ce moment même.
Ce qui avait commencé comme de simples fortes pluies s’est transformé en l’une des pires catastrophes naturelles que le pays ait connues ces dernières années. Le bilan officiel dépasse désormais les 55 morts, et il risque encore de s’alourdir dans les prochains jours.
Un déluge qui n’aurait jamais dû surprendre autant
Sept provinces touchées, des villes entières paralysées, des quartiers transformés en lacs immenses… Le sud thaïlandais paie un lourd tribut à une mousson qui, cette année, a décidé de frapper bien plus fort que d’habitude.
À Hat Yai, ville habituellement animée et carrefour commercial important près de la frontière malaisienne, les images sont sidérantes. Des voitures à moitié englouties, des habitants juchés sur les toits avec leurs enfants, d’autres qui tentent de sauver ce qu’ils peuvent en barque. On se croirait presque dans un film catastrophe, sauf que c’est bien réel.
La morgue dépassée, une réalité glaçante
Le détail qui glace le sang ? L’hôpital principal de Songkhla n’a plus assez de place pour accueillir tous les corps. Un responsable a simplement déclaré : « On a dépassé la capacité, on a besoin de plus. » Trois camions frigorifiques ont dû être réquisitionnés en urgence pour servir de morgue temporaire.
« Voir ces camions arriver, c’est un choc. On se rend compte de l’ampleur du drame seulement à ce moment-là. »
Un secouriste local, sous couvert d’anonymat
Ce genre de situation, on l’associe plutôt à des tremblements de terre ou des tsunamis. Pas à des inondations qu’on présente souvent comme « saisonnières ».
Une gestion de crise qui fait polémique
Et là, forcément, les langues se délient. Le chef du district de Hat Yai a été suspendu dès le lendemain de l’aggravation dramatique de la situation. Officiellement, il n’aurait pas anticipé assez fortement ni coordonné correctement les secours.
Est-ce vraiment surprenant ? Chaque année on nous parle de plans d’évacuation, de digues renforcées, de systèmes d’alerte. Et chaque année, quand ça arrive vraiment, on a l’impression que tout le monde est pris de court.
Je ne jette la pierre à personne en particulier, mais force est de constater que la répétition de ces catastrophes ne semble pas suffire à faire bouger les choses assez vite.
Le réchauffement climatique, le grand absent des discours locaux ?
On le sait pourtant depuis longtemps : plus la planète se réchauffe, plus l’atmosphère peut contenir d’humidité. Résultat ? Des pluies plus intenses, plus concentrées, plus destructrices.
Les scientifiques le répètent : +1 °C = 7 % d’humidité supplémentaire dans l’air. Quand on sait que certaines régions du globe ont déjà gagné presque 2 °C par rapport à l’ère préindustrielle, on comprend mieux pourquoi les « pluies centennales » arrivent maintenant tous les deux ou trois ans.
- Records de précipitations battus presque chaque saison
- Durée des moussons qui s’allonge
- Zones inondables qui s’étendent inexorablement
- Infrastructures conçues il y a trente ou quarante ans qui ne suivent plus
Et pendant ce temps, on continue parfois à construire dans des zones à risque, à bétonner des mangroves qui servaient de barrières naturelles, à ignorer les alertes.
La Malaisie voisine n’est pas épargnée
Ce n’est d’ailleurs pas qu’un problème thaïlandais. Juste de l’autre côté de la frontière, la Malaisie fait face à des inondations tout aussi dramatiques. Huit États touchés, plus de 27 000 personnes évacuées vers des centres d’urgence, et les prévisions météo n’annoncent rien de bon pour les prochains jours.
On a presque l’impression d’une immense vague qui traverse l’Asie du Sud-Est, balayant tout sur son passage.
Et après ? La difficile reconstruction
Lorsque l’eau finira par redescendre – et elle finira par redescendre –, le vrai travail commencera. Nettoyer, reconstruire, indemniser, reloger. Des mois, voire des années de galère pour des milliers de familles qui ont tout perdu.
Sans parler des commerces détruits, des récoltes noyées, des infrastructures endommagées. L’impact économique sera colossal, même si on en parle moins que du nombre de victimes.
Et puis il y a cette question qui revient sans cesse : va-t-on enfin tirer les leçons ? Va-t-on arrêter de considérer ces événements comme de simples « caprices de la météo » et commencer à les prendre pour ce qu’ils sont : les symptômes visibles d’un dérèglement profond ?
Ce qu’on peut tous retenir, où qu’on vive
Parce que soyons honnêtes : ce qui arrive en Thaïlande aujourd’hui pourrait très bien arriver ailleurs demain. Les Alpes-Maritimes, l’Allemagne, la Belgique, New York… La liste des endroits frappés par des inondations « exceptionnelles » ces dernières années ne cesse de s’allonger.
On a tous en tête les images de 2021 en Europe occidentale. Des villages rayés de la carte en quelques heures. Des centaines de morts. Et pourtant, quatre ans après, on continue parfois à construire dans les lits majeurs des fleuves.
Alors oui, on peut se sentir impuissant face à la nature. Mais on n’est pas totalement démunis non plus.
- Renforcer les systèmes d’alerte (ça sauve des vies, c’est prouvé)
- Arrêter de bétonner les zones humides
- Repenser l’urbanisme en tenant compte des nouveaux risques
- Investir massivement dans l’adaptation
- Et surtout, réduire nos émissions pour limiter le pire
Ce n’est pas sexy, ça coûte cher, ça prend du temps. Mais l’alternative, on la voit en direct en ce moment dans le sud de la Thaïlande.
Des familles détruites, des corps qui s’entassent dans des camions frigorifiques, des enfants qui ont tout perdu avant même d’avoir vraiment commencé leur vie.
Si ça, ça ne suffit pas à nous faire bouger, alors franchement, qu’est-ce qu’il faudra de plus ?
Prenez soin de vous. Et si vous le pouvez, un petit geste vers les associations qui aident sur place, ça ne mange pas de pain. Ils en ont sacrément besoin en ce moment.
