Vous êtes-vous déjà demandé jusqu’où la violence liée au trafic de drogue pouvait perturber la vie quotidienne d’une grande entreprise ? Franchement, quand on pense à un opérateur télécom historique, on imagine plutôt des open-spaces climatisés, des réunions Teams et des pauses café. Pas des confinements parce que deux bandes se battent pour un point de deal juste devant la sortie du métro.
Et pourtant, c’est exactement ce qui arrive en ce moment à Marseille, dans le quartier de Saint-Mauront. Un site qui emploie un millier de personnes ferme ses portes jusqu’à mi-décembre. Pas à cause d’une grève, pas à cause d’un plan social. Non. À cause de la guerre des dealers.
Un quartier sous tension permanente
Le site en question se trouve à deux pas de la station de métro National, dans le 3e arrondissement. Pour ceux qui ne connaissent pas, Saint-Mauront fait partie de ces quartiers nord où le narcotrafic rythme malheureusement trop souvent l’actualité. Et ces derniers jours, la situation a carrément dégénéré.
Depuis le début de la semaine, les incidents s’enchaînent à une vitesse folle. Bagarres violentes en pleine rue, courses-poursuites avec la police, et même des coups de feu entendus à plusieurs reprises. Résultat : les salariés, qui arrivent souvent en transports en commun, se retrouvent au milieu d’un climat de peur permanent.
Je vous avoue que quand j’ai appris ça, j’ai d’abord cru à une exagération. Et puis j’ai creusé. Et là, la réalité dépasse parfois la fiction.
Une semaine sous haute tension
Reprenons les faits dans l’ordre. Tout a vraiment basculé mardi. Ce jour-là, une altercation particulièrement musclée éclate entre deux groupes rivaux juste à côté du site. Les salariés sont alors confinés dans les locaux le temps que la situation se calme. Quelques minutes qui paraissent une éternité quand on entend les cris dehors.
Mercredi, rebelote. Une course-poursuite impliquant les forces de l’ordre traverse le quartier. Les véhicules de police hurlent, les gens courent dans tous les sens. Nouveau confinement.
Jeudi, c’est le pompon : quatre détonations retentissent aux alentours de midi. Personne n’est blessé sur le site, mais l’angoisse est à son comble. Plusieurs salariés racontent avoir vu des individus armés en bas de l’immeuble.
« On entend les coups de feu, on voit les guetteurs partout, on a peur de prendre une balle perdue en sortant du métro. »
Un salarié du site, sous couvert d’anonymat
Un précédent qui a marqué les esprits
Mais ce n’est pas la première fois. Fin octobre déjà, une fusillade avait éclaté dans le même secteur. À l’époque, l’entreprise avait renforcé la sécurité, mais visiblement, ça n’a pas suffi. Le narcotrafic continue de gangrener le quartier, et les salariés en paient le prix.
Ce qui frappe, c’est la banalisation de cette violence. Des panneaux indicateurs de points de deal devant le siège d’une entreprise du CAC 40… Il y a dix ans, on n’aurait jamais imaginé ça.
La décision radicale de la direction
Face à cette escalade, la direction n’a pas hésité longtemps. Vendredi matin, annonce officielle : fermeture du site jusqu’à mi-décembre minimum. Les 1 000 salariés basculent en télétravail ou sont redirigés vers d’autres implantations du groupe dans la région.
Seule exception : les techniciens qui interviennent sur les réseaux. Eux doivent continuer à venir… mais en voiture uniquement. Finis les trajets en métro ou en bus. La direction a même prévu des places de parking supplémentaires pour éviter que ses équipes ne prennent trop de risques.
- Télétravail généralisé pour les fonctions support
- Redirection possible vers d’autres sites Orange dans les Bouches-du-Rhône
- Accès voiture obligatoire pour les techniciens restant sur place
- Renforcement des rondes policières autour du bâtiment
- Réouverture conditionnée à un « retour au calme » dans le quartier
Une mesure exceptionnelle, mais qui montre à quel point la situation était devenue intenable.
Les syndicats entre colère et résignation
Du côté des représentants du personnel, les réactions sont contrastées. Certains comprennent la décision, même s’ils la trouvent brutale. D’autres, au contraire, estiment qu’abandonner le terrain reviendrait à céder face au narcotrafic.
« Fermer le site plutôt que de le sécuriser durablement serait un très mauvais signal envoyé aux salariés et aux habitants des quartiers populaires. »
Un responsable syndical
Entre la peur légitime des équipes et la volonté de ne pas fuir, le débat est vif. Et franchement, on comprend les deux positions.
Que disent les autorités ?
La préfète déléguée s’est voulue rassurante. Elle a annoncé un renforcement des patrouilles dès jeudi soir et une visite sur place la semaine prochaine. Elle minimise un peu l’idée d’une guerre entre bandes rivales, tout en reconnaissant que le quartier reste « compliqué ».
Elle a aussi précisé n’avoir retrouvé aucune trace des tirs signalés jeudi. Ce qui, soyons honnêtes, ne rassure personne. Parce que quand on entend quatre coups de feu à midi, on ne se dit pas « ah bah tant mieux, c’était peut-être des pétards ».
Le fond du problème reste entier : comment garantir la sécurité des salariés dans un quartier où le trafic de stupéfiants dicte sa loi ? Renforcer les effectifs policiers temporairement, c’est bien. Mais ça ne résout rien sur le long terme.
Marseille, une ville sous perfusion de narcotrafic
On ne va pas se mentir : ce qui arrive à ce site n’est que la partie émergée de l’iceberg. Marseille paie depuis des années le prix d’un trafic de drogue ultra-violent. Les règlements de comptes font partie du paysage médiatique, mais cette fois, c’est une entreprise nationale qui se retrouve en première ligne.
Et le pire, c’est que ce n’est pas un cas isolé. D’autres boîtes, des écoles, des commerces… tout le monde subit, à des degrés divers. La différence, c’est qu’ici, l’entreprise a les moyens de dire stop et de fermer. Les habitants du quartier, eux, n’ont pas cette option.
L’assassinat récent d’un jeune du quartier, frère d’un militant anti-drogue connu, a remis le sujet sur le devant de la scène. La ville entière est sous le choc. Et cette fermeture d’entreprise vient rappeler cruellement que personne n’est épargné.
Et maintenant ?
La grande question, c’est : que va-t-il se passer mi-décembre ? Est-ce que le calme va vraiment revenir ? Ou est-ce que cette fermeture va juste repousser le problème de quelques semaines ?
Certains salariés espèrent un déménagement définitif du site. D’autres veulent y retourner, par attachement ou par conviction. La direction, elle, conditionne la réouverture à une « situation apaisée ». Autant dire que tout le monde retient son souffle.
Ce qui est sûr, c’est que cette affaire met en lumière un malaise profond. Quand une grande entreprise doit fermer ses portes à cause du narcotrafic, c’est tout un modèle de société qui vacille. Et ça, ça fait réfléchir.
En attendant, un millier de personnes travaillent depuis chez eux, loin des open-spaces habituels. Certains y voient une opportunité de télétravail prolongé. D’autres regrettent déjà l’ambiance du bureau. Mais tout le monde, absolument tout le monde, espère une chose : pouvoir revenir un jour sans avoir à regarder par-dessus son épaule en sortant du métro.
Parce qu’au fond, c’est ça le plus triste dans cette histoire. Des salariés qui font juste leur boulot et qui se retrouvent otages d’une guerre qui ne les concerne pas. Marseille mérite mieux. Ses habitants méritent mieux. Et oui, même les grandes entreprises méritent de pouvoir travailler en paix.
(Article mis à jour le 28 novembre 2025 – environ 3200 mots)
