Vous est-il déjà arrivé de vous demander à quel point un pays neutre pendant deux siècles peut changer quand il se sent vraiment menacé ? Moi, oui. Et quand j’ai appris que la Suède venait de faire participer son roi et sa princesse héritière à un exercice de simulation de guerre – le premier du genre depuis plus de trente ans – j’ai compris que quelque chose de profond était en train de se jouer au nord de l’Europe.
Ce n’est pas tous les jours qu’un gouvernement annonce avoir mis en scène une guerre fictive avec la famille royale à la table des décisions. Et le détail qui m’a fait hausser les sourcils ? Le communiqué officiel a été traduit en russe. Pas en anglais, pas en français… en russe. Coïncidence ? Je vous laisse juges.
Un exercice pas comme les autres
Imaginez la scène : dans un lieu tenu secret, le souverain suédois, la princesse Victoria, des généraux en uniforme, des ministres et des hauts fonctionnaires se retrouvent pour jouer le pire scénario possible – une attaque armée contre le royaume. Ordres d’évacuation, rupture des communications, pénurie d’énergie, cyberattaques… Tout y passe. L’idée ? Tester la résilience totale du pays, ce concept typiquement scandinave qui implique chaque citoyen, chaque institution, y compris la monarchie.
Ce qui frappe, c’est la date. Depuis les années 1990 et la fin de la Guerre froide, jamais un exercice d’une telle ampleur n’avait réuni tous ces acteurs. À l’époque, la Suède misait encore sur sa neutralité comme bouclier. Aujourd’hui, membre de l’OTAN depuis 2024, elle regarde la carte et voit la Russie à quelques centaines de kilomètres de ses côtes, avec Kaliningrad, les manœuvres en mer Baltique et les survols réguliers d’avions militaires.
« Pas à pas et exercice après exercice, nous renforçons la défense totale et la résilience de la Suède. »
Le Premier ministre, dans le communiqué officiel
Pourquoi impliquer la famille royale ?
En Suède, la monarchie est avant tout symbolique, mais elle reste le ciment de l’unité nationale. En cas de crise grave, le roi est constitutionnellement le chef suprême des forces armées (même si le pouvoir réel est entre les mains du gouvernement). Le faire participer à un exercice, c’est envoyer un message clair : personne n’est à l’abri, personne n’est spectateur.
La princesse héritière Victoria, future reine, a déjà montré qu’elle prenait ces questions au sérieux. On l’a vue visiter des régiments, s’entraîner au tir, suivre des formations de survie. La voir autour de la table avec les stratèges militaires n’est donc pas si surprenant… mais ça reste puissant.
Le communiqué traduit en russe : provocation ou pédagogie ?
Voici le passage qui fait jaser. Après le texte en suédois et en anglais, on trouve une version complète en russe. Officiellement, c’est pour informer les nombreuses personnes russophones vivant en Suède (plus de 100 000). Mais soyons honnêtes : dans le contexte actuel, ça ressemble furieusement à un message direct à Moscou.
Du genre : « Nous nous préparons. Nous sommes unis. Et nous ne sommes plus seuls. » Parce que derrière la Suède, il y a maintenant l’article 5 de l’OTAN. Une attaque contre Stockholm serait une attaque contre Washington, Paris, Berlin ou Ankara. Et ça, ça change tout le calcul stratégique.
- Population formée à la résistance civile dès l’école
- Réserves alimentaires stratégiques pour plusieurs mois
- Abri anti-aérien pour près de 7 millions de personnes
- Retour progressif de la conscription (hommes et femmes)
- Budget défense qui va passer à plus de 2,5 % du PIB d’ici 2030
La Suède ne fait pas que parler. Elle agit. Et cet exercice en est la preuve la plus visible à ce jour.
Un air de déjà-vu dans les pays nordiques et baltes
La Finlande voisine a fait exactement la même chose il y a quelques années : exercices avec le président et le gouvernement en bunker, brochures distribuées à tous les foyers (« En cas de guerre ou de crise »). Les pays baltes, eux, vivent avec cette menace depuis 2014 et l’annexion de la Crimée. La Norvège renforce ses bases dans l’Arctique.
On assiste à une véritable remilitarisation mentale du nord de l’Europe. Les populations, longtemps bercées par la paix, redécouvrent que la sécurité n’est jamais acquise.
Et nous, en Europe de l’Ouest, on en est où ?
La question me trotte dans la tête depuis que j’ai lu cette info. Pendant que les Suédois s’entraînent avec leur roi, nous, on débat encore du nombre de chars à envoyer ou pas. Il y a quelque chose d’à la fois impressionnant et un peu gênant dans cette discipline nordique.
Ils ne crient pas, ils ne font pas de grandes déclarations tonitruantes. Ils préparent, ils s’organisent, ils s’entraînent. Et quand ils parlent à l’adversaire potentiel, ils le font dans sa langue. C’est froid, c’est calculé, c’est efficace.
Alors oui, cet exercice peut sembler anodin vu de loin. Une simulation parmi d’autres. Mais quand vous mettez bout à bout l’adhésion à l’OTAN, la hausse massive des dépenses militaires (300 milliards de couronnes sur dix ans, soit environ 27 milliards d’euros), le retour de la conscription et maintenant la famille royale autour de la table de crise… vous comprenez que la Suède a tourné une page définitive.
Et quelque part, ça nous rappelle à tous que la paix en Europe n’est plus une évidence. Elle se défend. Jour après jour. Exercice après exercice.
Personnellement, je trouve cette nouvelle à la fois inquiétante et étrangement réconfortante. Inquiétante parce qu’elle montre que même les pays les plus pacifiques se préparent au pire. Réconfortante parce qu’elle prouve qu’on peut encore agir, anticiper, se préparer ensemble.
Et vous, pensez-vous que votre pays serait prêt si, demain, le pire scénario devenait réalité ?
