Vous est-il déjà arrivé de pleurer devant un animal ? Franchement, moi oui. Et ce dimanche 23 novembre 2025, à Saint-Aignan dans le Loir-et-Cher, je n’étais visiblement pas le seul.
Imaginez la scène : une pluie froide qui n’en finit pas, des parapluies noirs qui s’entrechoquent, et pourtant plus de 200 personnes massées devant l’enclos des pandas. Pas pour voir un concert ou un match, non. Juste pour dire au revoir à deux boules de poils qui ont marqué toute une génération de visiteurs.
Le dernier goûter avant le grand départ
Le ZooParc de Beauval avait organisé un « dernier goûter » officiel. L’idée était simple : offrir au public une ultime occasion de voir Huan Huan et Yuan Zi avant leur départ prévu mardi matin vers la Chine. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que l’appel a été entendu.
Il y avait de tout. Des familles venues de Marseille pour l’anniversaire d’une petite Julia qui rêvait de voir « son animal préféré » une dernière fois. Un couple de Bordelais, Patrice et Véronique, arrivés la veille, habillés intégralement en panda – oui, même les chaussettes et le bob. Ils m’ont avoué être venus « plus de mille fois » depuis 2012. Mille fois. Laissez ça poser.
« Ce sont les premiers pandas qu’on a connus. On voulait absolument être là pour leur dire au revoir. »
Patrice, venu spécialement de Bordeaux
Un départ anticipé qui surprend tout le monde
À la base, le couple devait rester jusqu’en 2027. Alors pourquoi ce retour précipité ? La réponse est à la fois technique et touchante : Huan Huan, la femelle, souffre d’une insuffisance rénale. Rien de dramatique pour l’instant, mais à 17 ans – un âge déjà respectable pour un panda géant – les vétérinaires et les autorités chinoises ont préféré jouer la sécurité.
Le directeur du parc l’a expliqué sans détour : « On anticipe pour son bien-être. » Un choix responsable, même si, je vous l’avoue, ça serre le cœur.
Des adieux dignes de chefs d’État
Mardi matin, le départ sera digne d’un film. Escorte policière renforcée, convoi jusqu’à Roissy-Charles-de-Gaulle, vol spécial vers le centre de conservation de Chengdu. Parce que oui, les pandas géants ne voyagent jamais en classe éco. Ils sont bien plus que des animaux : ils sont des ambassadeurs.
Depuis les années 1970, la Chine utilise la « diplomatie du panda » pour sceller ou entretenir ses relations avec d’autres pays. Seuls une vingtaine de zoos dans le monde ont l’honneur d’en accueillir. Beauval fait partie de ce club très fermé depuis 2012. Et franchement ? On comprend pourquoi tout le monde se bat pour eux.
L’héritage reste à Beauval
Mais rassurez-vous, l’histoire n’est pas finie. Les deux petites dernières, les jumelles nées en 2021, restent au parc au moins jusqu’en 2027. Et le directeur est déjà en pourparlers pour prolonger l’aventure bien au-delà.
- Yuan Meng, le premier bébé panda né en France (2017) → déjà reparti en Chine
- Les jumelles Huanlili et Yuandudu → restent à Beauval
- Huan Huan et Yuan Zi → retour Chengdu mardi
En clair : on ne dit pas adieu aux pandas à Beauval. On dit juste au revoir à un couple qui a écrit une sacrée page d’histoire.
Pourquoi on s’attache autant ?
Soyons honnêtes deux minutes. Un panda, ça ne fait rien d’extraordinaire. Il mange du bambou 12 heures par jour, dort le reste du temps et roule plus qu’il ne marche. Et pourtant… pourtant on pleure quand ils partent.
Peut-être parce qu’ils sont l’incarnation parfaite de la vulnérabilité adorable. Une espèce menacée (moins de 1900 à l’état sauvage), des bébés qui ressemblent à des chaussettes roses à la naissance, des adultes qui font des galipettes maladroites… Tout est fait pour qu’on craque.
Mais il y a plus profond. Les pandas de Beauval, c’est aussi toute une génération qui a grandi avec eux. Les premières sorties scolaires, les premiers émerveillements d’enfants, les selfies de couples, les anniversaires fêtés devant l’enclos… Ils font partie du patrimoine émotionnel collectif.
« On veut montrer à nos enfants qu’il faut sauver les espèces en danger. Les pandas, c’est concret. »
Une maman venue de Marseille
Les soigneurs, les vrais héros de l’ombre
Si le public pleure, imaginez les soigneurs. Delphine, l’une d’entre eux, avait les larmes aux yeux en parlant du départ. Ils ont vécu la première naissance française, les nuits blanches, les premiers pas des bébés… Une relation qui va bien au-delà du professionnel.
Et mardi, quand le camion s’éloignera, il y aura probablement plus de larmes derrière les grilles qu devant.
Et maintenant ?
Le parc ne compte pas laisser le vide. Les installations pandas sont parmi les plus belles du monde, et l’équipe est déjà tournée vers l’avenir. Nouvelles arrivées possibles ? Prolongation du prêt des jumelles ? Tout est sur la table.
Une chose est sûre : l’engouement du public ce dimanche prouve que les pandas ont encore de beaux jours devant eux en France. Et quelque part, c’est plutôt réconfortant.
Alors oui, mardi, deux places seront vides dans l’enclos. Mais dans nos mémoires ? Elles seront occupées pour très très longtemps.
Et vous, vous irez dire au revoir aux jumelles avant 2027 ? Moi, je sais déjà que j’y retournerai. Parce qu’on n’a jamais fini de dire merci à ceux qui nous ont fait rêver.
(Article écrit après avoir passé l’après-midi sous la pluie à Beauval – et zéro regret.)
