Imaginez-vous partir nager au petit matin, l’eau encore fraîche, le soleil qui pointe à peine à l’horizon. Une baignade comme on en rêve en vacances. Et puis, d’un seul coup, tout bascule. C’est exactement ce qui est arrivé à deux jeunes touristes, la vingtaine à peine, jeudi dernier sur une plage de la côte est australienne. Elle n’en est pas revenue. Lui, grièvement blessé, doit sa survie à des inconnus qui ont agi avec un sang-froid incroyable.
Cette histoire m’a littéralement scotché quand je l’ai lue. Parce qu’au-delà du drame, il y a cette réaction humaine, brute, héroïque, qui redonne foi en l’espèce humaine même dans les moments les plus terrifiants.
Un matin qui tourne au cauchemar
Il était à peine 6 h 30. La plage de Crowdy Bay, en Nouvelle-Galles du Sud, est encore déserte ou presque. Le couple décide de piquer une tête avant que la chaleur ne monte. L’eau est claire, calme. Rien ne laisse présager le drame.
Puis, sans aucun signe avant-coureur, un requin-bouledogue surgit et les attaque. Lui est touché à la jambe, très gravement. Elle est mordue de manière fatale. En quelques secondes, la scène paisible devient un cauchemar.
Ce qui frappe, c’est la violence et la rapidité de l’attaque. Les requins-bouledogues ne préviennent pas. Ils foncent, mordent, et repartent. Parfois plusieurs fois. Et là, c’est exactement ce qui s’est passé.
Des témoins qui deviennent des héros
Fort heureusement, quelques personnes étaient déjà sur la plage. Et là, franchement, je tire mon chapeau. Au lieu de paniquer ou de filmer avec leur téléphone, elles ont agi.
« Le courage de certains témoins est incroyable. S’exposer ainsi est très héroïque et cela nous a donné le temps d’atteindre ce patient. »
Un responsable des forces de l’ordre sur place
Un homme, en particulier, a fabriqué un garrot avec ce qu’il avait sous la main – probablement sa ceinture ou un bout de tissu – et l’a serré autour de la cuisse du jeune homme pour stopper l’hémorragie. Les autres ont appelé les secours et ont maintenu la pression jusqu’à l’arrivée des premiers sauveteurs.
Sans eux, il serait probablement mort vidé de son sang en quelques minutes. L’hélicoptère l’a emmené à l’hôpital dans un état stable. Un miracle, quand on sait la violence de ce type de blessures.
Le requin-bouledogue, un prédateur redoutable et imprévisible
On parle souvent du grand blanc, star des films d’horreur. Mais en réalité, dans les eaux côtières australiennes, c’est le bull shark – le requin-bouledogue – qui fait le plus de victimes.
- Il tolère l’eau douce et remonte souvent les estuaires
- Il est agressif et territorial
- Il chasse surtout à l’aube et au crépuscule
- Il peut attaquer sans raison apparente
- Il est responsable de la majorité des attaques près des grandes villes côtières
Des spécialistes en écologie marine expliquent que c’est assez rare qu’un requin morde deux personnes en même temps. Mais ça arrive, surtout quand il est en mode « chasse active ». Dans ce genre de situation, il peut mordre plusieurs fois pour écarter toute concurrence autour de sa proie. Glauque, mais c’est la réalité.
Et non, le requin ne « confond » pas forcément l’humain avec un phoque ou une tortue. Parfois, il sait très bien ce qu’il fait. Il teste, il attaque, point.
La réaction immédiate des autorités
La plage a été fermée 24 heures. Des drones ont été déployés pour surveiller la zone. Des patrouilles en bateau aussi. Classique, mais nécessaire.
On a aussi posé des filets temporaires et renforcé la surveillance. En Australie, ce genre de protocole est rodé. Le pays enregistre malheureusement plusieurs attaques chaque année.
Depuis janvier 2025, on compte déjà cinq décès liés à des requins. C’est énorme quand on sait que la moyenne tourne autour de un ou deux par an ces dernières années. 2025 s’annonce particulièrement meurtrière.
Comment expliquer cette recrudescence ?
Plusieurs facteurs entrent en jeu, et franchement, aucun n’est vraiment rassurant :
- Le réchauffement des eaux attire les requins plus au sud
- La protection des espèces a permis aux populations de requins de se reconstituer
- Plus de monde à la plage toute l’année (été prolongé, tourisme)
- Plus d’activités nautiques (surf, paddle, etc.)
- Les appâts utilisés par les pêcheurs attirent parfois les prédateurs près des côtes
Résultat ? Les interactions homme-requin augmentent mécaniquement. Et quand ça tourne mal, ça tourne très mal.
Que faire quand on se fait mordre ? Les gestes qui sauvent
Les témoins de Crowdy Bay ont parfaitement appliqué les bases. Voici ce qu’il faut retenir si, malheur, vous êtes confronté à ça un jour (ou si vous êtes témoin) :
- Sortez la victime de l’eau le plus vite possible
- Compressez la plaie avec tout ce que vous avez (serviette, tee-shirt)
- Faites un garrot au-dessus de la blessure si l’hémorragie est massive
- Appelez les secours immédiatement
- Maintenez la personne consciente et au chaud
Ces gestes, enseignés dans les formations de secourisme en Australie, ont clairement fait la différence ce jour-là.
Et nous, voyageurs, qu’est-ce qu’on doit en tirer ?
Je voyage beaucoup, et chaque fois qu’un drame comme ça arrive, je me repose la question : est-ce que je prends assez au sérieux les consignes de sécurité ? Franchement, non. On a tous tendance à se dire « ça n’arrive qu’aux autres ».
Pourtant, en Australie, les règles sont claires :
- Éviter de nager à l’aube ou au coucher du soleil
- Ne pas nager seul
- Rester près du bord
- Éviter les zones où il y a des pêcheurs ou des poissons
- Respecter les panneaux d’alerte (et oui, ils sont là pour une raison)
On se moque parfois des Australiens et de leur prudence « excessive ». Mais quand on voit ce genre d’histoire, on comprend mieux pourquoi.
Un drame qui nous rappelle notre place dans la nature
Au fond, ce qui me touche le plus dans cette histoire, c’est le contraste. D’un côté, la beauté sauvage de l’océan australien. De l’autre, sa brutalité absolue. On n’est jamais vraiment chez nous dans l’eau. On y est tolérés, pas plus.
Ce couple voulait juste profiter d’un moment simple, romantique peut-être. Ils n’ont rien fait de mal. Ils étaient juste au mauvais endroit, au mauvais moment, face à un animal qui faisait ce pour quoi la nature l’a conçu.
Et pourtant, grâce à la solidarité de parfaits inconnus, l’histoire a une lueur d’espoir. Lui va pouvoir raconter. Embrasser sa famille. Vivre.
Elle, malheureusement, restera à jamais dans cette eau qu’elle aimait sans doute.
Prenez soin de vous là dehors. L’océan est magnifique, mais il ne faut jamais l’oublier : il n’a pas d’amis.
