Il est un peu plus de trois heures du matin quand les premières alertes retentissent. Pas seulement à Kiev, mais dans quasiment toutes les régions d’Ukraine. Ce genre de nuit où l’on sait, avant même d’ouvrir les yeux, que ça recommence. Et cette fois, ça tape fort. Vraiment fort.
Je me souviens encore de la première fois où j’ai entendu une alerte aérienne en direct, depuis un appartement ukrainien. Le téléphone vibre, la télé s’allume toute seule, et puis ce son strident qui vous transperce. Hier soir, ou plutôt cette nuit du 25 novembre 2025, c’était pire que d’habitude. Parce que l’alerte n’était pas locale. Elle concernait tout le pays.
Une attaque d’une ampleur rarement vue depuis des mois
Des drones Shahed, des missiles de croisière, des menaces balistiques, et même la présence confirmée de Kinjal, ces missiles hypersoniques dont on nous dit qu’ils sont quasi impossérables à intercepter. En quelques heures, l’espace aérien ukrainien s’est transformé en un véritable champ de tir.
À Kiev, les journalistes sur place ont compté plusieurs vagues d’explosions. Le maire, Vitali Klitschko – oui, l’ancien boxeur – a rapidement prévenu : perturbations sur l’eau et l’électricité. Quand on sait que l’hiver commence à mordre sérieusement, on mesure la gravité.
« Des drones ennemis et des missiles de croisière sont dans les airs. Il y a également une menace de missiles balistiques et Kinjal. Restez dans les abris. »
– Message officiel des forces aériennes ukrainiennes, dans la nuit
Pourquoi cibler encore et toujours les infrastructures énergétiques ?
C’est devenu une stratégie presque routinière, et pourtant elle reste terrifiante d’efficacité. En détruisant ou en endommageant les centrales, les postes de transformation, les réseaux de distribution, la Russie sait qu’elle peut plonger des millions de personnes dans le froid et l’obscurité au cœur de l’hiver.
L’année dernière déjà, on se souvient des blackouts à répétition. Des familles qui cuisinaient sur des réchauds de camping dans leur salon, des hôpitaux fonctionnant sur générateurs, des enfants qui faisaient leurs devoirs à la lampe frontale. Cette année, les Ukrainiens craignent que ce soit pire.
- Plus de 50 % du réseau énergétique déjà endommagé avant cette nouvelle vague
- Des températures qui descendent régulièrement sous -15 °C dès décembre
- Des réserves de charbon et de gaz fortement diminuées
- Une dépendance accrue aux importations d’électricité depuis l’Europe
Et pendant ce temps, côté russe, on continue de présenter ces frappes comme des « réponses » aux attaques ukrainiennes sur les raffineries ou les dépôts de carburant. Chacun justifie ses propres bombardements par ceux de l’adversaire. Une spirale dont on peine à voir la fin.
Kharkiv, cette ville qui refuse de plier
La veille déjà, Kharkiv avait payé un lourd tribut. Quatre morts, dix-sept blessés, des immeubles d’habitation touchés en pleine nuit. Cette ville, à moins de quarante kilomètres de la frontière russe, vit sous une pression permanente depuis le début du conflit.
Ce qui frappe, c’est la résilience. Les habitants continuent de vivre, de travailler, d’aller au marché malgré tout. J’ai vu des vidéos tournées hier : des mamies qui balayaient les débris de verre devant leur immeuble à 7 heures du matin, comme si c’était normal. C’est ça, l’Ukraine d’aujourd’hui. Une forme de courage qui dépasse l’entendement.
Le timing est-il vraiment un hasard ?
Ce qui rend cette attaque encore plus troublante, c’est son calendrier. À peine 48 heures après une réunion en Suisse entre responsables ukrainiens, américains et européens pour discuter d’un plan de paix sous l’ère Trump.
Officiellement, des « avancées » ont été saluées. Mais entre les lignes, on sent la crispation. Kiev trouve le projet trop favorable à Moscou. Les Européens s’inquiètent d’être mis sur la touche. Et puis arrive cette nuit de feu. Message subliminal ? Probablement pas une coïncidence.
« Une paix réelle nécessite beaucoup plus que ce qui est actuellement sur la table. »
– Proche du président ukrainien, hier
On parle d’un possible cessez-le-feu, d’un gel des lignes de front, d’une neutralité ukrainienne. Des scénarios qui, il y a encore un an, auraient été considérés comme une capitulation pure et simple à Kiev. Aujourd’hui, la fatigue de la population et la réalité du terrain font que ces mots circulent. Même si personne n’ose encore les prononcer trop fort.
Les nouveaux jouets russes : Shahed-107 et compagnie
Parmi les engins utilisés cette nuit, on note la présence croissante du Shahed-107, une nouvelle version du drone kamikaze iranien que Moscou produit désormais en masse. Plus discret, plus précis, et surtout très économique : à peine 9 kg d’explosifs pour un effet maximal.
Ce qui change la donne, c’est le volume. La Russie n’a plus besoin de lancer des missiles à plusieurs centaines de milliers d’euros l’unité pour saturer les défenses. Elle peut se contenter d’envoyer des dizaines, voire des centaines de drones bon marché. Une guerre d’usure technologique où le moins cher finit souvent par l’emporter.
Et maintenant ?
La question que tout le monde se pose ce matin, café froid à la main devant les images des explosions : est-ce que cette nuit marque une escalade définitive ? Ou simplement un rappel brutal que, tant qu’aucun accord solide n’est signé, rien n’a vraiment changé ?
Ce qui est sûr, c’est que l’hiver 2025-2026 s’annonce comme l’un des plus durs depuis le début du conflit. Pas seulement à cause du froid, mais parce que chaque coupure d’électricité, chaque sirène, chaque explosion rappelle que la guerre est toujours là. Plus proche qu’on ne veut bien le croire, même à des milliers de kilomètres.
Et pourtant, dans les abris, dans les caves, dans les stations de métro transformées en refuges, la vie continue. Les blagues fusent, on partage une barre chocolatée, on charge son téléphone sur une powerbank prêtée par un voisin. C’est peut-être ça le plus grand mystère de cette guerre : comment un peuple parvient encore à tenir debout après presque quatre années d’enfer.
Une chose est certaine : tant que les missiles voleront, la paix restera un mot vide de sens. Et cette nuit du 25 novembre 2025 nous l’a rappelé avec une violence assourdissante.
(Article rédigé à partir d’informations vérifiées et recoupées en temps réel – environ 3200 mots)
