Vous souvenez-vous du premier jouet qui vous a vraiment fait rêver petit ? Moi, c’était une petite voiture rouge qui faisait « vroum vroum » quand on la poussait. Trente ans plus tard, dans une petite ville de Normandie, des centaines d’enfants vont encore vivre cette émotion grâce à une initiative qui refuse de prendre une ride.
Parce que oui, offrir un cadeau à Noël quand on galère déjà à remplir le frigo, c’est souvent mission impossible. Et pourtant, personne ne devrait avoir à choisir entre manger et faire plaisir à ses gosses.
Trente ans déjà : l’histoire d’une belle idée qui ne s’essouffle pas
C’était il y a trois décennies. Le maire de Honfleur, toujours en poste aujourd’hui, regarde autour de lui et se rend compte que même dans une ville touristique aussi jolie, certaines familles n’arrivent plus à boucler les fins de mois. Le quotidien est déjà compliqué, alors imaginer acheter des jouets pour Noël… Autant demander la lune.
Il a donc une idée toute simple : et si la ville organisait une collecte de jouets ? Pas de grande campagne nationale, pas de stars en couverture des magazines. Juste les habitants qui donnent ce qu’ils peuvent, et la mairie qui centralise, et le Père Noël (ou plutôt les lutins municipaux) qui distribue discrètement avant les vacances.
À l’époque, beaucoup pensaient que ce serait une opération ponctuelle. « Une fois, pour dépanner », disaient certains. Trente ans plus tard, la collecte est toujours là. Plus forte, même. Preuve que la précarité, elle, n’a pas pris de vacances.
Un « petit plus » qui change tout
Aurore – prénom d’emprunt – est maman de trois enfants. L’an dernier, son petit dernier a reçu un grand bateau pirate avec plein de figurines. Ses yeux brillèrent quand il a déballé le paquet. Pour elle, c’était un énorme soulagement.
« Déjà, la nourriture coûte cher. Les jouets, c’est minimum 30 euros par enfant, souvent plus. L’année dernière, grâce à la collecte, il a eu un vrai beau cadeau. Cette année… je ne sais même pas si je pourrai en acheter un seul. »
Comme Aurore, des dizaines de familles passent par l’épicerie sociale de la ville. On y vient pour les courses à prix réduits, parfois pour un coup de pouce alimentaire. Mais les jouets ? Ça, c’est le bonus qui fait toute la différence.
Car Noël, ce n’est pas qu’un jour férié. C’est aussi la cour de récré en janvier où les enfants comparent leurs trésors. Et personne n’a envie que son enfant soit celui qui répond « moi, j’ai rien eu ».
Comment ça marche concrètement ?
C’est assez simple, et c’est ça qui est beau. Deux points de collecte principaux : un sapin à la mairie, un autre à la gare routière. Cette année, un troisième point ouvre au lycée professionnel – parce que oui, les ados aussi ont droit à leur surprise.
- Vous apportez des jouets en bon état (ou neufs, c’est encore mieux)
- Les bénévoles trient, nettoient si besoin, emballent
- Les familles inscrites à l’épicerie sociale ou au CCAS font leur petite liste au Père Noël municipal
- Juste avant les vacances, les paquets sont remis en main propre ou déposés discrètement
L’an dernier, ce sont 59 enfants de 30 familles qui ont été gâtés via l’épicerie sociale, et un peu plus encore via le CCAS. Des chiffres qui augmentent doucement chaque année.
Les enfants donnent aussi… et c’est magnifique
Ce qui m’a particulièrement touché en découvrant cette initiative, c’est le tiers des dons qui vient… des enfants eux-mêmes. Oui, vous avez bien lu.
Des petits Honfleurais qui trient leur chambre et choisissent de donner les jouets dont ils se séparent pour qu’un autre enfant soit heureux. Certains écrivent même des petits mots. « J’espère que tu t’amuseras bien avec mon garage » ou « Je te donne ma poupée parce qu’elle est trop belle ».
C’est une leçon de générosité que les parents n’ont même pas besoin de donner : les gosses la comprennent tout seuls.
Toute une ville se mobilise
Évidemment, les enfants ne sont pas les seuls. Les associations locales, le supermarché, les forains qui passent par là et qui arrivent avec des peluches géantes, l’exploitant de bus qui met à disposition des points de collecte… Même les lycéens s’y mettent.
On est loin de l’image froide de l’administration. Ici, tout le monde met la main à la pâte. Et ça fonctionne parce que c’est local, humain, sans chichi.
« On soutient les familles discrètement. Les enfants peuvent parler de leur jouet à l’école comme les autres. C’est important pour leur confiance. »
– Une élue en charge des affaires sociales
Un besoin qui ne faiblit pas… au contraire
L’élue le dit sans détour : « Personne n’est à l’abri. Un accident de vie, une séparation, une maladie… et on peut basculer très vite. »
Et elle a raison. L’inflation, la hausse des prix de l’énergie, des courses… Tout ça pèse lourd. Les associations caritatives le répètent chaque année : la précarité touche de plus en plus de familles avec enfants.
Dans ce contexte, une collecte comme celle de Honfleur devient plus qu’un geste sympa. C’est une bouffée d’oxygène. Un moyen de garder un peu de magie dans un quotidien parfois gris.
Et vous, vous pouvez aider jusqu’au 5 décembre
Si vous habitez dans le coin ou passez par Honfleur avant les fêtes, sachez que la collecte est ouverte jusqu’au 5 décembre. Un jouet en bon état, un livre, un jeu de société… Tout est bienvenu.
Et si vous êtes loin, rien ne vous empêche de lancer la même chose chez vous. Une boîte dans le hall de la mairie, un message aux voisins, quelques affiches… Et hop, la magie opère.
Parce qu’au fond, c’est ça le plus beau dans cette histoire qui dure depuis 30 ans : elle montre qu’on n’a pas besoin d’être riche ou célèbre pour changer les choses. Juste d’avoir un peu de cœur et d’organisation.
Alors cette année, si on redonnait un peu de lumière aux yeux des enfants ?
Personnellement, je trouve que ces initiatives locales ont quelque chose de profondément réconfortant. Dans un monde où tout va trop vite, où les mauvaises nouvelles s’enchaînent, voir une petite ville de Normandie tenir bon pendant trente ans sur un geste de solidarité, ça fait du bien.
Et qui sait… peut-être que dans trente ans, un enfant qui aura reçu un bateau pirate ou une poupée grâce à cette collecte racontera à son tour cette histoire à ses propres enfants.
La boucle serait bouclée. Et la magie, intacte.
