Vous êtes-vous déjà demandé ce qu’il se passe quand un stade mythique comme le Vélodrome affiche complet pour chaque match, peu importe l’adversaire ? À Marseille, la ferveur autour de l’OM est telle que les places pour assister aux rencontres s’arrachent comme des petits pains. Mais derrière cette passion dévorante se cache un phénomène bien moins romantique : la revente parallèle des billets, souvent loin des circuits officiels du club. Ce marché, à la fois discret et florissant, soulève des questions brûlantes : comment fonctionne-t-il, qui en profite, et pourquoi suscite-t-il autant de débats parmi les supporters ?
Un Marché Parallèle en Pleine Effervescence
À Marseille, le football n’est pas qu’un sport, c’est une religion. Chaque match à domicile remplit les 67 000 places du Vélodrome, un record que peu de clubs européens peuvent égaler. Avec 49 000 abonnés – un chiffre historique – la demande dépasse largement l’offre. Résultat ? Une partie des billets et abonnements se retrouve sur un marché parallèle, où les prix s’envolent et où la passion des supporters croise parfois la logique du profit.
J’ai toujours trouvé fascinant de voir à quel point l’amour pour un club peut se mêler à des pratiques plus… pragmatiques. Ce n’est pas nouveau : la revente de billets existe depuis que le foot attire les foules. Mais à Marseille, elle prend une ampleur particulière, alimentée par la ferveur locale et l’attractivité du Vélodrome.
Comment S’organise la Revente ?
Le marché parallèle des billets OM opère à plusieurs niveaux, des échanges informels entre supporters aux réseaux bien organisés. Les abords du stade, notamment autour du Boulevard Michelet, sont un lieu emblématique pour ces transactions. Les jours de match, il n’est pas rare de croiser des revendeurs proposant des places en virage nord ou sud, souvent à des tarifs bien supérieurs à ceux du club.
« J’ai déjà vu des places en virage sud, vendues 90 € par le club, partir à 160 € en revente. C’est du simple au double ! »
– Un supporter marseillais
Mais les transactions ne se limitent pas aux abords du stade. Les réseaux sociaux, notamment des plateformes comme Snapchat ou Twitter, sont devenus des hubs pour les annonces de revente. Des comptes dédiés, parfois quasi professionnels, proposent des places pour chaque match, avec des prix variant selon l’adversaire. Par exemple, pour un choc comme OM-PSG, les tarifs peuvent grimper jusqu’à 250 € pour une place en tribune, contre 40 € pour un match moins prestigieux.
Le club a pourtant mis en place une plateforme officielle de revente, où les abonnés peuvent céder leurs places avec une commission prélevée par l’OM. Mais cette solution, bien que légale, est souvent boudée. Pourquoi ? Parce que les marges y sont encadrées, et beaucoup préfèrent maximiser leurs profits ailleurs.
- Revente physique : Autour du stade, avec des intermédiaires souvent bien connus des habitués.
- Réseaux sociaux : Annonces sur Twitter, Snapchat ou Instagram, parfois via des comptes spécialisés.
- Plateforme officielle : Moins utilisée, car moins lucrative pour les revendeurs.
Les Acteurs du Marché : Qui Revend et Pourquoi ?
Les profils des revendeurs sont variés. D’un côté, il y a les supporters occasionnels, comme cet abonné qui cède son abonnement à 40 € pour un match qu’il ne peut pas voir, laissant une boutique locale gérer la logistique pour une petite marge. De l’autre, des réseaux plus organisés, parfois liés à des groupes de supporters, qui profitent de la rareté des places pour faire grimper les prix.
Certains ultras, par exemple, se retrouvent au cœur de ce système. Si la majorité des supporters rejettent l’idée de faire du profit sur leur club, d’autres y voient une opportunité. Un membre d’un groupe d’ultras confie :
« Revendre une place peut financer un déplacement. Aller supporter l’OM à l’extérieur, ça coûte cher. »
– Un ultra anonyme
Ce raisonnement divise. Pour certains, c’est une manière de soutenir la ferveur en finançant des tifos ou des voyages. Pour d’autres, c’est une dérive qui éloigne les vrais supporters du stade, surtout dans une ville comme Marseille, où le football est un pilier culturel.
J’ai toujours trouvé ça paradoxal : le foot, c’est la passion, l’émotion brute, mais il suffit de gratter un peu pour voir que l’argent s’infiltre partout. Est-ce vraiment un problème si un supporter revend sa place pour financer sa passion ? Ou est-ce que ça transforme le Vélodrome en un marché où seuls les plus offrants ont leur place ?
Les Supporters Face à la Revente : Entre Frustration et Résignation
Pour beaucoup de supporters, la revente parallèle est une source de frustration. Les prix exorbitants excluent ceux qui n’ont pas les moyens de payer 150 € pour un match. Un jeune supporter marseillais raconte son expérience : il a payé 45 € pour une place qui, après vérification, était une invitation gratuite. Ce genre d’anecdote alimente la colère de certains, qui dénoncent un système où la passion est éclipsée par le profit.
« Avant, on filait son abo à un pote pour un apéro. Aujourd’hui, on te demande 100 € pour un virage. Où est passée la ferveur ? »
– Un supporter sur les réseaux sociaux
Pourtant, d’autres adoptent une approche plus pragmatique. Un habitué du Vélodrome m’a confié que, tant que les prix restent accessibles pour certains matchs, il n’y voit pas de mal. « Si personne ne voulait payer 150 €, le marché s’effondrerait, non ? » m’a-t-il lancé avec un sourire. Cette résignation reflète une réalité : à Marseille, la demande est si forte que le marché parallèle prospère, quoi qu’en pensent les puristes.
| Type de match | Prix officiel | Prix revente parallèle |
| Match amical | 20-50 € | 50-100 € |
| Ligue 1 (adversaire moyen) | 30-90 € | 80-160 € |
| Choc (OM-PSG, Ligue des champions) | 50-150 € | 150-250 € |
Le Rôle du Club : Réguler ou Profiter ?
L’OM n’est pas un simple spectateur de ce phénomène. Le club sanctionne les revendeurs pris sur le fait et poursuit en justice les réseaux non autorisés. Mais il tire aussi profit de la revente via sa plateforme officielle, où une commission de 18 % est prélevée. Pour un match contre Lorient, par exemple, près de 6 000 billets étaient disponibles sur cette plateforme, avec des frais allant jusqu’à 73,80 € par place.
Cette stratégie a du sens : elle permet de limiter le no-show (les places vides) tout en générant des revenus supplémentaires. Mais elle ne satisfait pas tout le monde. Certains supporters estiment que le club pourrait faire plus pour encadrer les prix ou faciliter l’accès aux places pour les fans les plus modestes.
Je me souviens d’un match où j’ai vu des gradins clairsemés malgré un guichet fermé. Ça m’a fait réfléchir : si le club arrive à remplir le stade grâce à sa plateforme, pourquoi tant de supporters se tournent-ils vers le marché parallèle ? Peut-être parce que l’offre officielle ne répond pas à la frénésie marseillaise.
Les Ultras : Entre Passion et Business
Les groupes d’ultras, comme les South Winners ou les Fanatics, jouent un rôle ambigu dans ce système. Si certains refusent de monétiser leur passion, d’autres n’hésitent pas à revendre des places, parfois à des prix exorbitants. À Rennes, pour un match de Ligue 1, des billets en parcage OM se sont vendus à 120 €, contre 10 € à l’achat. En Ligue des champions, les tarifs ont même dépassé 200 €.
Ce phénomène ne se limite pas à Marseille. Des sections de supporters basées hors de la ville prennent des abonnements pour les revendre, profitant de la rareté des places en déplacement. Un ultra explique : « Certains ne savent même pas ce qu’est un tifo, mais ils ont des dizaines de cartes en main. »
« En tant qu’ultra, je ne peux pas faire du fric sur l’OM. Mais je comprends ceux qui le font pour financer la cause. »
– Un membre d’un groupe de supporters
Ce clivage entre passion et business est au cœur des tensions. Les ultras sont souvent vus comme les gardiens de l’âme du club, mais leur implication dans la revente alimente les critiques. Est-ce une trahison de l’esprit du foot, ou simplement une adaptation à un monde où tout a un prix ?
Et Après ? Vers une Régulation Plus Stricte ?
La question de la revente parallèle ne semble pas prête de s’éteindre. Tant que la demande dépassera l’offre, les revendeurs auront un terrain fertile. Mais des solutions existent. Certains clubs européens, comme en Allemagne, imposent des contrôles d’identité stricts pour limiter la revente. À Marseille, une telle mesure pourrait-elle fonctionner, ou risquerait-elle d’éloigner les supporters ?
Pour ma part, je pense qu’il faut trouver un équilibre. La passion des supporters ne devrait pas être un luxe réservé aux plus offrants. Peut-être que le club pourrait envisager des abonnements à prix réduits pour les jeunes ou des systèmes de redistribution plus équitables. Mais dans une ville où le foot est roi, la tentation du profit sera toujours là.
- Renforcer les contrôles : Vérifications d’identité pour limiter les reventes non autorisées.
- Réduire les prix : Offrir des places à tarif préférentiel pour les jeunes ou les habitants locaux.
- Sensibiliser : Campagnes pour rappeler l’esprit du foot, au-delà du business.
Le Vélodrome reste un lieu unique, où chaque match est une célébration. Mais pour que cette fête reste accessible, il faudra peut-être repenser la manière dont les billets circulent. En attendant, le marché parallèle continue de prospérer, entre passion, profit et polémique.
