Vous vous êtes déjà demandé ce que vous toucheriez vraiment à la retraite ? Moi oui, souvent. Et puis un jour, en discutant avec ma mère et ses anciennes collègues, la réalité m’a sauté aux yeux : à parcours équivalent (ou presque), elles touchent bien moins que leurs ex-collègues masculins. Le dernier rapport international vient de le confirmer chiffres à l’appui : en France, l’écart atteint 27 %. C’est énorme. Et franchement, ça interpelle.
Un écart qui ne baisse presque pas
Dans tous les pays développés, les femmes perçoivent des pensions plus faibles. C’est un fait. Mais chez nous, on fait moins bien que la moyenne. L’OCDE parle de 23 % en moyenne pour ses membres, contre 27 % en France. Autrement dit, pour 100 € de retraite d’un homme, une femme en touche 73 €. Et encore, ce sont des moyennes : certaines situations sont bien pires.
On pourrait croire que c’est uniquement à cause des interruptions de carrière pour enfants. Eh bien non, ce n’est pas si simple. Paradoxalement, la France est plutôt généreuse sur ce point-là.
Les pays où c’est presque l’égalité (et ceux où c’est la cata)
Quelques pays s’en sortent avec moins de 10 % d’écart : l’Estonie, la République tchèque, la Slovaquie, la Slovénie ou l’Islande. À l’opposé, le Japon décroche la palme avec 47 %, suivi de près par les Pays-Bas, le Royaume-Uni, l’Autriche et le Mexique (plus de 35 %). La France ? On est dans le peloton de tête des mauvais élèves, juste derrière l’Allemagne et l’Italie.
Pourquoi la France protège (un peu) les mamans… mais pas assez
En France, une mère bénéficie de trimestres validés pour chaque enfant, d’une majoration de pension (10 % dès trois enfants), et parfois même de bonifications sans avoir arrêté de travailler. C’est loin d’être le cas partout. Seuls neuf pays de l’OCDE offrent ce type d’avantage « automatique ». Donc sur le papier, on est bons.
Pourtant, ça ne compense pas tout. Pourquoi ? Parce que les inégalités se creusent ailleurs, et notre système de retraite les amplifie au lieu de les corriger.
« La retraite des mères est bien protégée en France, mais cela ne suffit pas à combler les écarts accumulés durant la carrière. »
Experts internationaux en protection sociale
Les trois grandes causes classiques… où la France s’en sort pas si mal
- Les femmes gagnent moins à l’heure → oui, mais l’écart salarial brut est plutôt dans la moyenne basse OCDE.
- Elles font plus souvent du temps partiel → vrai, mais là encore, on n’est pas les pires.
- Elles ont des carrières plus courtes ou hachées → les bonifications maternité et éducation limitent la casse.
Donc logiquement, l’écart de pension devrait être plus faible chez nous que chez les voisins qui n’ont rien de tout ça. Et pourtant non. Cherchez l’erreur.
Le vrai coupable : notre obsession pour la durée de cotisation
En France, pour toucher une retraite à taux plein, il faut avoir cotisé un nombre précis d’années (43 ans aujourd’hui, bientôt plus). Si vous avez un « trou », même d’un trimestre, décote à vie. Et qui a le plus souvent des carrières incomplètes malgré les bonifications ? Les femmes. Résultat : elles partent plus tard, ou avec décote, alors que les hommes, eux, remplissent plus facilement la durée et touchent même parfois une surcote.
J’ai vu ça chez une amie infirmière de 64 ans : 41 ans de carrière, trois enfants, temps partiels, elle a pris une décote de 12 %. Son mari, ingénieur, même âge, carrière linéaire : surcote de 7 %. L’écart entre leurs deux pensions ? Plus de 1 000 € par mois. À vie.
Le jackpot de la retraite complémentaire pour les hauts salaires
Autre spécificité française : la retraite complémentaire (le régime des cadres et salariés du privé) n’a presque pas de plafond. Plus vous gagnez, plus vous cotisez, plus vous touchez. Et comme les très hauts salaires sont encore majoritairement masculins, ils empilent des points pendant quarante ans et touchent ensuite des pensions complémentaires astronomiques. Dans la plupart des autres pays, les droits sont plafonnés beaucoup plus tôt. Résultat : l’effet « winner takes all » est décuplé chez nous.
Exemple concret : un cadre supérieur homme qui a gagné 10 000 € brut par mois pendant vingt ans peut toucher plus de 4 000 € de complémentaire. Une femme cadre moyen, à 4 500 € brut, même durée validée, sera autour de 1 800 €. Multipliez par vingt ou trente ans de retraite (l’espérance de vie des cadres est plus longue), et vous comprenez l’explosion de l’écart.
Et la réforme de 2023 n’arrange rien
Repousser l’âge légal à 64 ans et accélérer l’allongement de la durée requise pénalise d’abord celles qui ont déjà des carrières morcelées. Elles devront travailler plus longtemps pour éviter la décote, alors que les hommes à carrière complète partiront dès qu’ils auront leur durée. L’OCDE le note gentiment : « l’âge légal français va rejoindre la moyenne, mais l’impact sur l’équité hommes-femmes n’est pas neutre ».
Le seul point positif : on a fait bosser les seniors
Il y a quand même une bonne nouvelle. Depuis 2000, la France a fait un bond spectaculaire sur l’emploi des 60-64 ans : on est passés de presque rien à 42 % d’actifs des deux sexes. C’est énorme. Mais on reste en retard sur la moyenne OCDE (64 % pour les hommes, 49 % pour les femmes). Il y a encore de la marge.
Que faire pour réduire vraiment l’écart ?
Plusieurs pistes sérieuses circulent :
- Revaloriser les petites pensions (minimum vieillesse, pension de réversion plus généreuse).
- Prendre en compte les 25 ou 30 meilleures années au lieu de toute la carrière pour le régime général.
- Mettre un vrai plafond sur les retraites complémentaires très élevées (impensable pour l’instant).
- Continuer à pousser l’égalité salariale et la garde d’enfants (crèches, congé paternité allongé).
- Instaurer une part de retraite par points citoyenne ou universelle (comme certains pays nordiques).
Mais soyons honnêtes : tant que les carrières resteront aussi genrées et que le système valorisera avant tout la durée et le salaire brut, l’écart persistera. Et avec le vieillissement de la population, il risque même de s’aggraver.
Ce qui me frappe le plus, c’est que la France a les outils pour être championne de l’égalité retraite… mais elle choisit de rester moyenne. Dommage. Parce qu’au final, ce sont des millions de femmes qui vivront leurs vieux jours avec nettement moins de moyens. Et ça, ce n’est pas qu’une question de chiffres. C’est une question de dignité.
Et vous, vous en pensez quoi ? Vous avez des exemples autour de vous ? Laissez-moi un commentaire, j’adore lire vos retours d’expérience, ça enrichit toujours le débat.
