Vous êtes-vous déjà demandé ce que devenaient ces énormes rouleaux de filets que l’on voit dans les vergers après une grosse averse de grêle ? La plupart du temps, ils finissent à la décharge, déchirés, bons à jeter. Et pourtant, à des milliers de kilomètres de là, ces mêmes filets sauvent aujourd’hui des vies humaines.
C’est l’histoire dingue que je voulais vous raconter aujourd’hui. Une histoire qui commence dans les champs de Tarn-et-Garonne et qui se termine sur les routes bombardées de l’est de l’Ukraine.
Quand un filet anti-grêle, un bouclier inattendu contre les drones
Imaginez la scène. Vous roulez sur une petite route de campagne près de Kharkiv. Le front est à quelques kilomètres. Soudain, vous apercevez d’immenses filets tendus au-dessus de la chaussée, comme des toiles d’araignée géantes. Et là, coincé dedans, un drone russe qui tourne encore faiblement sur lui-même, pris au piège.
C’est exactement ce qu’a vu Pascal Serrier lors de son dernier convoi, il y a quelques semaines. Ce Montalbanais, qui enchaîne les allers-retours vers l’Ukraine depuis 2022, n’en est pas revenu.
« J’ai trouvé ça tellement simple et tellement malin à la fois. Des filets qui coûtent une fortune à l’achat et qu’on jette après une seule saison… Là-bas, ils protègent des vies. »
De retour en France, il n’a pas hésité une seconde. Il a commencé à appeler les arboriculteurs qu’il connaissait. Et là, surprise : tout le monde a dit oui. Immédiatement.
Le Tarn-et-Garonne se mobilise en quelques jours
Dans ce coin du sud-ouest, on cultive la pomme, la cerise, la prune. Et quand la grêle tombe, c’est la catastrophe. Les filets anti-grêle, ces mailles fines mais ultra-résistantes, sont donc partout. Et quand ils sont abîmés, on les remplace.
Mais au lieu de les brûler ou de les enfouir, plusieurs exploitants ont choisi de les donner. À Lhonor-de-Cos, un pomiculteur et son voisin ont offert l’équivalent de trois hectares de protection. À Moissac, une entreprise spécialisée a vidé une partie de son stock : sept kilomètres de filets neufs qui dormaient dans un hangar depuis des années.
Sept kilomètres. Vous vous rendez compte ? Ça représente des dizaines de tonnes de matériel qui vont repartir vers l’est au prochain convoi, prévu début 2026.
- Des filets usagés mais encore solides
- Des rouleaux neufs jamais utilisés
- Des agriculteurs qui donnent sans compter
- Une logistique entièrement bénévole
Franchement, quand on voit ça, on se dit que la solidarité, ça existe encore. Et pas qu’en paroles.
Pourquoi les filets anti-grêle sont si efficaces contre les drones
On pourrait croire que c’est une solution de fortune. Et pourtant, elle est terriblement efficace.
Les drones FPV russes, ces petits engins bourrés d’explosifs qui foncent à 100 km/h, sont conçus pour exploser à l’impact. Mais quand ils rencontrent un filet tendu à quelques mètres au-dessus du sol, leurs hélices s’emmêlent instantanément. Le drone tombe. L’explosion est évitée ou fortement atténuée.
Et le meilleur ? Le filet, lui, reste en place. Il peut attraper plusieurs drones avant d’être changé. C’est du low-tech, mais ça fonctionne.
« C’est pas cher, c’est rapide à installer, et ça sauve des civils qui empruntent ces routes tous les jours pour aller travailler ou chercher du pain. »
– Un responsable logistique ukrainien rencontré sur place
En ville, on les voit aussi au-dessus des arrêts de bus, des marchés, parfois même des cours d’écoles. Partout où la population reste vulnérable.
Une association qui ne s’arrête jamais
Occitalien, ce n’est pas une grosse ONG avec des bureaux climatisés. C’est une petite structure montée par des gens du coin, des retraités, des actifs qui prennent sur leurs congés, des étudiants parfois.
Ils ont déjà organisé plus de vingt-quatre convois vers l’Ukraine. Mais ils sont aussi partis à Mayotte après le cyclone Chido. Et en Espagne, dans la région de Valence, après les inondations dramatiques de l’automne 2024.
Partout où il y a une catastrophe, ils sont là. Avec leurs camions chargés de générateurs, de médicaments, de vêtements chauds, de jouets pour les orphelinats.
Cette fois, c’est différent. Cette fois, ils ne transportent pas seulement de l’aide. Ils transportent une idée. Une idée qui peut être reproduite partout.
Et nous, on peut faire ?
Si vous êtes agriculteur, viticulteur, arboriculteur, où que vous soyez en France, vous avez peut-être des vieux filets qui traînent dans un hangar. Au lieu de les jeter, pensez à eux.
Un simple coup de fil ou un message peut permettre d’équiper des kilomètres de routes, des villages entiers. Ce n’est pas une goutte d’eau dans l’océan. C’est concret. C’est immédiat.
Et si vous n’avez pas de filets, vous pouvez toujours aider à charger les camions, donner quelques euros pour l’essence, ou simplement partager l’information. Parce que parfois, la solidarité, ça commence par un partage.
Une lueur d’espoir dans un conflit sans fin
Quatre ans. Cela fera bientôt quatre ans que l’Ukraine résiste. Quatre ans que des civils meurent sous les bombes et les drones. Et pourtant, des initiatives comme celle-ci continuent de naître. Des deux côtés de l’Europe.
Ces filets anti-grêle, c’est un peu le symbole de tout ça. Quelque chose qui était destiné à protéger des fruits devient un bouclier pour des enfants, des mamans, des vieux messieurs qui n’ont rien demandé à personne.
C’est presque poétique, non ?
Alors la prochaine fois que vous passerez devant un verger protégé par ces grands filets blancs, pensez à eux. Pensez à ce qu’ils pourraient devenir entre de bonnes mains.
Parce que parfois, les solutions les plus simples sont les plus belles.
Et parce que, quelque part près de Kharkiv, un gosse va pouvoir rentrer de l’école sans que sa mère tremble à chaque bruit près d’un bourdonnement dans le ciel.
Juste grâce à un vieux filet qui a déjà fait son temps dans un champ de pommes du sud-ouest de la France.
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