Vous souvenez-vous encore de cette époque, pas si lointaine, où le G20 semblait être la solution miracle à tous les problèmes planétaires ? Crise financière de 2008, coordination des politiques monétaires, grands discours sur le climat… On avait presque l’impression que vingt dirigeants suffisaient à remettre le monde d’aplomb. Et puis, patatras. Ce samedi 22 novembre 2025, à Johannesburg, un constat brutal est tombé, presque comme une sentence.
Le président français n’a pas mâché ses mots. Devant ses homologues (ou du moins ceux qui avaient daigné faire le déplacement), il a parlé d’un possible « déclin » du G20. Pire : il a évoqué la fin d’un cycle. Quand on connaît le goût d’Emmanuel Macron pour les formules qui font mouche, on comprend que ce n’était pas une simple figure de style. C’était un signal d’alarme.
Le G20 est-il en train de mourir à petit feu ?
Franchement, la question mérite d’être posée sans détour. Depuis quelques années, j’observe avec une certaine inquiétude cette lente érosion du principal forum de gouvernance mondiale. Et je ne suis clairement pas le seul. Ce qui se passe à Johannesburg n’est pas un accident. C’est le symptôme d’une maladie bien plus profonde.
Un boycott qui en dit long
Prenez déjà l’absence remarquée de certains leaders. Quand le président des États-Unis décide de snober purement et simplement le sommet, on ne peut pas parler d’un simple contretemps d’agenda. C’est un choix politique assumé. Et ça change tout.
Le G20, à l’origine, c’était justement cette idée géniale : réunir autour de la même table les puissances établies et les émergentes, l’Occident et le reste du monde. Mais quand l’une des deux superpuissances actuelles tourne le dos à la photo de famille, le message est violent. On passe d’une gouvernance partagée à une forme de diplomatie bilatérale musclée, où chacun négocie directement avec qui il veut, quand il veut.
« On vit un moment de notre géopolitique où nous avons beaucoup de mal à régler autour de cette table, ensemble, les grandes crises internationales »
– Emmanuel Macron, le 22 novembre 2025 à Johannesburg
Des crises qui s’accumulent sans solution collective
Regardons les faits en face. Quelles sont les grandes crises du moment ? La guerre en Ukraine qui s’enlise, les tensions au Proche-Orient, la fragmentation économique entre blocs, le changement climatique qui accélère… Et sur chacun de ces dossiers, qu’a produit le G20 ces dernières années ? Des communiqués lénifiants, des engagements jamais tenus, des photos de groupe où tout le monde fait semblant de s’entendre.
Je me souviens encore du sommet de Bali en 2022. On avait salué comme une victoire le fait que la Russie n’ait pas bloqué le communiqué final sur l’Ukraine. Sérieusement ? C’est ça, notre ambition maintenant ? Se féliciter qu’un pays agresseur accepte de ne pas faire capoter complètement la réunion ? On est loin des ambitions initiales.
- Crise climatique : les engagements de réduction des émissions patinent partout
- Endettement des pays pauvres : le cadre commun reste lettre morte
- Régulation financière : les crypto-monnaies et l’IA financière échappent totalement au radar
- Tensions commerciales : on assiste à un retour du protectionnisme décomplexé
La liste est longue. Et accablante.
Le grand écart entre les membres
Ce qui frappe le plus, c’est le fossé qui s’est creusé entre les membres. D’un côté, vous avez encore des pays qui croient au multilatéralisme comme valeur en soi. De l’autre, des puissances qui n’y voient plus qu’un outil parmi d’autres, à utiliser ou à ignorer selon leurs intérêts du moment.
Et entre les deux ? Un vide immense. Le G20 n’a plus de centre de gravité. L’Europe essaie bien de jouer les médiateurs, mais soyons honnêtes : quand vous représentez à peine 7 % de la population mondiale et que votre poids économique relatif décline, votre voix porte moins loin.
L’Afrique du Sud, qui assure la présidence cette année, tente vaillamment de remettre l’Afrique au centre des débats. Belle intention. Mais quand les deux plus grosses économies du G20 (États-Unis et Chine) sont soit absentes, soit en mode minimaliste, ça ressemble surtout à un combat d’arrière-garde.
Et pourtant, personne ne propose vraiment d’alternative
C’est peut-être ça le plus paradoxal. Tout le monde constate la faiblesse du G20… mais personne n’a de plan B crédible.
Un G21 avec l’Union africaine ? L’idée est sur la table depuis un moment. Sympa sur le papier. Mais est-ce que ça résout le problème de fond ? Pas sûr. Ajouter une chaise ne change rien si les principaux convives refusent de s’asseoir.
Retour au G7 ? C’est la tentation de certains en Occident. Mais ce serait officiellement entériner la fracture du monde en deux blocs. Et puis, franchement, un club de pays riches qui décide pour la planète en 2025, ça passe difficilement le test de la légitimité.
L’appel de Macron : dernier sursaut ou chant du cygne ?
Quand le président français parle de « remobilisation collective autour de quelques priorités », il sait très bien qu’il prêche dans le désert. Mais il le fait quand même. Parce qu’il reste convaincu – et il n’est pas le seul – que sans un minimum de coordination internationale, on court tout droit vers le chaos.
Et là, je dois dire que je partage une partie de son diagnostic. On peut critiquer la forme, les effets de manche, le côté « moi je » parfois agaçant. Mais sur le fond ? Il a raison de sonner l’alarme.
« Nous devons tous être lucides sur le fait que le G20 est en risque si nous ne nous remobilisons pas collectivement vers quelques priorités »
Cette phrase-là, elle reste en tête. Parce qu’elle dit tout. Le G20 n’est pas encore mort. Mais il est en sursis.
Vers quelle gouvernance mondiale en 2030 ?
Alors, à quoi va ressembler le monde dans cinq ans ? Plusieurs scénarios se dessinent, et aucun n’est franchement réjouissant :
- Le maintien d’un G20 en mode zombie : on continue les sommets pour la forme, mais plus rien de substantiel n’en sort
- La fragmentation totale : chaque bloc organise ses propres réunions (BRICS étendu, G7 resserré, etc.)
- Une réforme improbable mais pas impossible : recentrage sur 5-6 sujets vraiment stratégiques, avec des processus de décision plus souples
Personnellement, je mise plutôt sur le scénario 1 ou 2. La réforme profonde demanderait une confiance entre grandes que nous n’avons plus depuis longtemps.
Ce qui est sûr, c’est que le monde d’après-2025 ne ressemblera pas à celui d’avant. Le G20 a été une belle idée. Peut-être était-ce une idée de son temps. Et ce temps est en train de s’achever sous nos yeux, à Johannesburg, en ce mois de novembre 2025.
Le plus inquiétant dans tout ça ? Ce n’est même pas la fin du G20 en tant que telle. C’est ce que cela dit de notre capacité collective à nous mettre d’accord sur quoi que ce soit d’important. Parce que si même sur des sujets comme le climat ou la stabilité financière on n’arrive plus à s’aligner… alors, franchement, on est mal barrés.
À suivre. De très près.
