Vous est-il déjà arrivé de vous emporter au boulot, de faire un geste que vous regrettez aussitôt, et de vous demander si votre collègue vous en voudra à vie ? Maintenant, imaginez que ça se passe devant des millions de téléspectateurs, sur une pelouse de Premier League, et que votre « collègue » encaisse une gifle en direct. C’est exactement ce qui est arrivé à Idrissa Gana Gueye la semaine dernière.
Et pourtant, quelques jours plus tard, tout le monde rigole. Vraiment. Parce que le football, parfois, c’est plus fort que tout.
Quand la tension devient une leçon d’humanité
On rembobine. Lundi soir, Everton se déplace à Old Trafford. Un match déjà électrique, face à un Manchester United en reconstruction. Les Toffees mènent, tiennent le coup, et puis arrive cette scène. Idrissa Gueye, sous pression, perd ses nerfs et claque une gifle à Michael Keane, son propre partenaire en défense. L’arbitre n’hésite pas : rouge direct. Fin de match pour le Sénégalais, victoire tout de même pour Everton, mais l’image fait le tour du monde.
Sur le moment, on se dit : « Aïe. Ça va laisser des traces dans le vestiaire. » Surtout quand on connaît le tempérament de Keane, pas vraiment du genre à se laisser faire. Et pourtant… ce qui suit est une magnifique démonstration de ce que peut être un vrai groupe.
Le combat de boxe qui a tout changé
Quelques jours après l’incident, au centre d’entraînement de Finch Farm, l’ambiance est détendue. Très détendue même. Thierno Barry, l’attaquant français, sort son téléphone et filme une séquence qui va devenir virale en interne (et un peu à l’extérieur aussi).
Sur la pelouse synthétique, Gueye et Keane sont là. Chacun avec… un seul gant de boxe. Oui, un seul. L’autre main nue. Devant eux, Beto, le grand Brésilien, joue l’arbitre avec le sérieux d’un gamin de 10 ans. Il lève les bras, donne le signal.
Pendant dix secondes, on assiste à un festival de feintes, de petits pas de danse, de regards qui en disent long. Et puis, d’un coup, les deux se jettent dans les bras l’un de l’autre, éclatent de rire, se tapent dans le dos. Fin du « combat ». Message envoyé : c’est réglé.
« Que de l’amour ici »
– Thierno Barry, en légende de sa story
Cette phrase résume tout. En trois mots, le jeune attaquant a capturé l’essence même de ce qui fait la force d’un vestiaire qui vit bien.
David Moyes valide (et assume) la tension
Ce qui est intéressant, c’est que l’entraîneur lui-même n’a pas joué la carte de la sanction lourde ou du sermon moralisateur. Au contraire. Interrogé après le match, David Moyes a surpris pas mal de monde :
« J’aime que mes joueurs se battent entre eux si quelqu’un n’a pas fait ce qu’il fallait. Si vous exigez cette dureté et cette résilience, il faut accepter qu’il y ait parfois des débordements. »
Franchement, ça change. Dans un football où tout est lissé, policé, où on s’excuse à la moindre virgule mal placée, entendre un manager assumer que la passion peut déborder, ça fait du bien. Moyes ne cautionne pas la violence, bien sûr. Mais il comprend que quand on joue sa peau chaque week-end, les nerfs peuvent lâcher.
Et surtout, il sait que dans un groupe sain, ces moments-là se règlent entre hommes. Pas besoin de commission de discipline ou de communiqué lisse. Un regard, une explication, un câlin, un combat de boxe à un gant : et c’est plié.
Pourquoi cette histoire nous touche autant
Parce qu’on y voit du vrai. Du brut. De l’humain.
Dans un sport où les joueurs sont devenus des marques ambulantes, où chaque geste est calculé, où les réseaux sociaux dictent parfois plus que le ballon, voir deux mecs régler leurs différends comme des gamins dans une cour de récré, ça réchauffe le cœur.
Gueye, 36 ans, sénégalais, musulman pratiquant, ancien du PSG, guerrier infatigable. Keane, anglais pure souche, défenseur rugueux, formé à Manchester United. Deux mondes, deux parcours, une même passion. Et en quelques secondes de vidéo, ils nous rappellent que le foot, c’est d’abord des mecs qui se battent ensemble.
- Ils auraient pu s’éviter dans les couloirs pendant des semaines.
- Ils auraient pu faire semblant sur les réseaux.
- Ils auraient pu laisser la presse en faire des tonnes.
Ils ont choisi l’humour. La fraternité. Le respect à l’ancienne.
Ce que ça dit d’Everton version 2025
Everton traverse une période compliquée depuis des années. Rachat, points de pénalité, stade en construction, résultats en dents de scie. Pourtant, cette saison, sous le retour de David Moyes, quelque chose semble prendre.
Cette équipe ne joue pas forcément le plus beau football de la ligue. Mais elle se bat. Elle ne lâche rien. Et dans le vestiaire, on sent une vraie osmose. Des profils différents – le jeune Barry, le roc Tarkowski, le guerrier Gueye, le taulier Keane – qui forment un tout.
Cet épisode, finalement, en dit plus long sur la solidité du groupe que n’importe quelle série de victoires.
Et nous, qu’est-ce qu’on en retient ?
Que le pardon, parfois, passe par un fou rire.
Que la vraie force d’une équipe, ce n’est pas seulement de gagner, c’est de savoir se relever ensemble après une engueulade.
Et que dans un monde où tout est filmé, jugé, commenté, il reste encore des endroits où on règle ses comptes à l’ancienne : avec franchise, humour, et une bonne dose d’amour fraternel.
Alors oui, Gueye a pris rouge. Oui, il s’est excusé publiquement – et sincèrement. Mais ce qu’on retiendra, ce n’est pas la gifle.
C’est l’accolade.
Et ce « Que de l’amour ici » qui résume tout.
Le football, quand il est comme ça, on ne s’en lasse jamais.
