Vous est-il déjà arrivé de regarder un film catastrophe et de vous dire « ça n’arrive que dans les films » ? Eh bien, vendredi 21 novembre au soir, la réalité a rattrapé la fiction dans le port de Los Angeles. Une explosion, des flammes qui s’élèvent sur plusieurs étages d’un mastodonte des mers, plus d’une centaine de pompiers qui se battent comme des lions… J’ai suivi cette nuit-là les images en direct et, franchement, on se serait cru dans un blockbuster hollywoodien. Sauf que c’était bien réel.
Un incendie qui a tout d’un scénario catastrophe
Vers 18 h 30 heure locale, alors que le soleil se couchait sur la côte ouest américaine, une alerte a retenti dans les quartiers des sapeurs-pompiers. Un porte-conteneurs battant pavillon panaméen, le One Henry Hudson, venait de signaler un début d’incendie à bord. Le navire, long de 336 mètres – imaginez trois terrains de football mis bout à bout – était arrivé deux jours plus tôt en provenance de Tokyo et déchargeait encore sa cargaison.
Ce qui a commencé comme un feu classique a très vite dégénéré. Des témoins ont décrit une explosion sourde, suivie d’une boule de feu qui a traversé plusieurs ponts. En quelques minutes, les flammes ont envahi les niveaux inférieurs et supérieurs, transformant le géant d’acier en torche vivante.
L’équipage évacué à temps, zéro blessé
Premier soulagement dans cette soirée cauchemardesque : les 23 membres d’équipage ont pu être évacués rapidement. Aucun blessé à déplorer, ce qui tient presque du miracle quand on connaît la violence de l’explosion rapportée. Les marins, choqués mais indemnes, ont été pris en charge par les autorités portuaires.
À l’heure où j’écris ces lignes, on ignore encore s’ils ont pu récupérer leurs effets personnels. Quand on travaille des mois loin de chez soi, perdre ses affaires dans un incendie, c’est la cerise sur le gâteau amer.
Plus de 100 pompiers et des moyens exceptionnels
Face à l’ampleur du sinistre, les autorités n’ont pas lésiné. Plus de cent pompiers ont été mobilisés, appuyés par plusieurs bateaux-pompes qui arrosent le navire depuis la mer. Des drones équipés de caméras thermiques survolent la zone pour repérer les points les plus chauds – technologie oblige, même dans l’urgence.
- Camions-citernes alignés sur les quais
- Lances à haute pression jour et nuit
- Drones qui guident les équipes au plus près des flammes
- Équipes spécialisées NRBC (nucléaire, radiologique, biologique, chimique) en alerte
Et pourtant, malgré toute cette puissance de feu – si j’ose dire –, l’incendie résistait encore samedi matin. Preuve que combattre un brasier à bord d’un porte-conteneurs relève parfois de l’impossible.
Matières dangereuses à bord : la grande inconnue
Voilà l’élément qui fait froid dans le dos. Le navire transportait des matières dangereuses. Le terme est vague, volontairement. On parle parfois de produits chimiques, de batteries au lithium, de gaz sous pression… Des cargaisons qui, en brûlant, peuvent libérer des fumées toxiques ou provoquer des réactions en chaîne.
« Nos équipes surveillent en permanence la qualité de l’air autour du site. Pour l’instant, aucun seuil alarmant n’a été dépassé, mais la prudence reste de mise. »
– Responsable municipal de Los Angeles
Un périmètre de sécurité a été établi par les garde-côtes. Conséquence directe : une partie du port, l’un des plus grands et des plus stratégiques des États-Unis, tourne au ralenti. Et quand Los Angeles tousse, c’est toute la chaîne logistique mondiale qui peut s’enrhumer.
Pourquoi ce genre d’accident arrive-t-il encore en 2025 ?
On pourrait croire que, avec toutes les normes internationales, les inspections, les systèmes de détection ultra-sophistiqués, ce type de catastrophe appartient au passé. Et pourtant… Les statistiques montrent que les incendies à bord de porte-conteneurs ont augmenté ces dernières années. Plusieurs raisons à cela.
- La course au gigantisme : les navires sont de plus en plus gros, donc plus difficiles à sécuriser totalement.
- La pression sur les délais : les armateurs veulent aller toujours plus vite, parfois au détriment de certaines vérifications.
- Les déclarations de marchandises parfois… approximatives. Oui, ça arrive encore.
- Les batteries au lithium, nouvelle star des cargaisons inflammables.
J’ai échangé il y a quelques mois avec un ancien inspecteur portuaire. Il m’avait confié, un peu amer : « Tant qu’on privilégiera le profit à la sécurité absolue, on continuera à avoir des surprises. » Cette nuit à Los Angeles semble malheureusement lui donner raison.
Les conséquences économiques déjà visibles
Le port de Los Angeles, c’est près de 40 % des importations américaines. Quand un quai est bloqué, même partiellement, les répercussions se font sentir jusqu’en Europe et en Asie. Des milliers de conteneurs attendent déjà ailleurs dans le port, les camions s’entassent, les transporteurs pestent.
Et puis il y a la cargaison elle-même. Des marchandises qui devaient arriver juste à temps pour les fêtes de fin d’année. Jouets, vêtements, électronique… Une partie est probablement perdue. Les assureurs vont avoir du travail.
Et maintenant ?
Samedi après-midi, les pompiers semblaient enfin gagner du terrain. Le navire, malgré des tonnes d’eau déversées, ne prenait pas l’eau de manière critique – un autre petit miracle technique. Mais le combat est loin d’être terminé.
Une enquête va être ouverte, c’est certain. Origine du feu, nature exacte des marchandises dangereuses, respect des procédures… Tout sera passé au peigne fin. Et, comme souvent après ce genre d’événement, on promettra des mesures. Restera à voir si elles seront vraiment appliquées.
En attendant, cette nuit d’incendie nous rappelle une chose simple mais essentielle : derrière les conteneurs empilés comme des Lego géants, il y a des hommes et des femmes qui risquent leur vie tous les jours pour que nos colis arrivent à temps. Ce soir-là, à Los Angeles, ils ont eu chaud. Vraiment très chaud.
Et vous, aviez-vous déjà réalisé à quel point le commerce mondial repose sur des équilibres aussi fragiles ? Un feu, une explosion, et c’est toute une chaîne qui vacille. Parfois, l’actualité nous ouvre les yeux plus sûrement qu’un long discours.
