Vous souvenez-vous de votre première sonnerie de téléphone en cours ? Ce petit « bzzz » qui faisait sursauter toute la classe et valait un regard noir du prof ? Aujourd’hui, cette scène appartient presque au folklore. Parce que, soyons honnêtes, les smartphones sont devenus bien plus qu’un outil : ils sont le prolongement de la main de nos adolescents. Et c’est précisément pour ça que l’idée d’une interdiction totale au lycée fait autant parler.
Une mesure qui pourrait arriver dès septembre 2026
Ce n’est plus une hypothèse lointaine. Lors d’un déplacement dans les Vosges, le chef de l’État a été très clair : le ministre de l’Éducation travaille activement sur l’extension de l’interdiction du téléphone portable aux lycées. Ce qui était expérimental au collège il y a quelques années est devenu la règle partout en France depuis la dernière rentrée, et le bilan semble convaincre l’exécutif.
« Ça fonctionne plutôt bien », a-t-il lâché. Et quand on voit les retours de terrain, on comprend pourquoi. Moins de distractions visibles, des cours plus fluides, des professeurs qui respirent un peu mieux… même si, évidemment, tout n’est pas parfait.
Pourquoi maintenant ?
La question mérite d’être posée. On parle depuis des années du temps passé devant les écrans, de la difficulté croissante des jeunes à se concentrer plus de quelques minutes, du harcèlement qui se déplace sur les réseaux en dehors des heures de cours mais qui pollue quand même l’ambiance en classe. Ajoutez à cela les études qui tombent régulièrement : les ados français passent en moyenne plus de 4 heures par jour sur leur téléphone. Quatre heures. Autant dire qu’un lycée sans portable, c’est presque une cure de désintox forcée.
« Le lycée, ce n’est pas le lieu où l’on doit scroller sans fin, c’est le lieu où l’on apprend et où l’on échange vraiment. »
Emmanuel Macron, novembre 2025
Cette phrase résume assez bien la philosophie derrière la mesure. On ne parle plus seulement de discipline, on parle de reconquérir l’attention, le temps des cours.
Ce qui a changé au collège (et pourquoi ça peut inspirer les lycées)
Depuis 2018, la loi interdit déjà le téléphone de la maternelle à la troisième. Mais tout le monde sait que, jusqu’à récemment, c’était souvent lettre morte. Les élèves le laissaient en mode silencieux dans la poche et continuaient à checker leurs notifs entre deux exos de maths.
Le vrai tournant, c’est la généralisation de la « pause numérique » : l’appareil doit être éteint ou rangé dans un casier, une mallette ou une pochette fermée dès l’entrée dans l’établissement. Et là, surprise : ça marche. Les chefs d’établissement rapportent moins de conflits liés aux photos prises en douce, moins de tensions liées aux groupes WhatsApp qui s’enflamment à la récré, et surtout plus de calme en classe.
- Moins d’interruptions en cours (les profs le confirment à 80 % selon plusieurs enquêtes internes)
- Baisse notable des incidents de harcèlement visibles dans l’enceinte scolaire
- Amélioration de la qualité des échanges entre élèves pendant les pauses (oui, ils se parlent vraiment)
- Meilleure concentration globale, même si certains enseignants restent prudents
Évidemment, il y a toujours des élèves qui trichent, des téléphones cachés dans les chaussettes ou des Apple Watch qui vibrent discrètement. Mais globalement, le message est passé : le collège n’est plus un terrain de jeu numérique permanent.
Les lycéens, c’est une autre paire de manches
Voilà le vrai défi. Au collège, les élèves ont entre 11 et 15 ans, beaucoup n’ont pas encore de smartphone personnel ou sont encore sous contrôle parental assez strict. Au lycée, on parle d’ados de 15 à 18 ans, souvent avec leur propre forfait illimité, des groupes Snapchat qui tournent 24 h/24 et une vraie dépendance émotionnelle à leur appareil.
Je me souviens d’une discussion avec une lycéenne de terminale l’an dernier : « Sans mon téléphone, j’ai l’impression d’être coupée du monde. » C’est violent, mais c’est la réalité d’une génération qui a grandi avec les réseaux sociaux dans la poche.
Alors oui, on peut imposer des casiers et des pochettes. Mais comment fait-on quand l’élève a besoin de son téléphone pour rentrer chez lui (trajet en transports, coordination avec les parents) ? Comment gère-t-on les lycées professionnels où les apprenants vont en stage et ont besoin d’être joignables ? Et surtout, est-ce que brider ainsi les lycéens ne va pas créer un effet rebond encore plus fort le soir venu ?
Les arguments des défenseurs de la mesure
Ils sont nombreux, et pas seulement dans les rangs du gouvernement.
- Santé mentale : les études montrent que plus le temps d’écran est élevé, plus le risque d’anxiété et de dépression augmente chez les ados.
- Égalité : tout le monde n’a pas le dernier iPhone. Retirer les téléphones réduit la pression sociale et les « marques » et les stories parfaites.
- Concentration : même en mode silencieux, la simple présence du téléphone sur la table diminue les performances cognitives (effet bien documenté).
- Sécurité : moins de photos prises à l’insu, moins de vidéos qui finissent sur TikTok, moins de cyberharcèlement pendant les heures de cours.
Et ceux qui sont contre ?
Ils existent aussi, et leurs arguments ne sont pas idiots.
Certains parents s’inquiètent de ne plus pouvoir joindre leur enfant en cas d’urgence. D’autres estiment que l’apprendre à gérer son téléphone fait partie de l’éducation du XXIe siècle : autant leur apprendre la responsabilité plutôt que l’interdiction brute. Enfin, il y a la question pratique : qui va financer les casiers sécurisés dans tous les lycées de France ?
Personnellement, je penche plutôt pour la mesure, mais avec des aménagements. Par exemple, autoriser l’usage dans la cour ou pendant la pause méridienne pour les lycéens. Ou créer des « zones libres » dans l’établissement. Une interdiction totale risque de créer de la frustration inutile.
Une campagne nationale à venir
L’exécutif ne veut pas seulement interdire, il veut aussi expliquer. Une grande campagne de communication et de prévention est annoncée pour accompagner la mesure. L’idée : faire comprendre aux jeunes (et à leurs parents) que ce n’est pas une punition, mais une protection.
On parlera probablement sommeil, lumière bleue, dopamine, addiction aux likes… Tous ces sujets que les ados connaissent déjà, mais qu’ils ont parfois du mal à relier à leur propre comportement.
Et après ? Vers une société sans smartphone en public ?
On peut sourire, mais la question n’est pas si absurde. Certains pays ont déjà interdit le téléphone dans toutes les écoles jusqu’à 18 ans. D’autres testent des « journées sans écran » dans les entreprises. L’idée que l’on puisse vivre des moments entiers sans être connecté revient en force.
Peut-être que, dans quelques années, on regardera avec nostalgie cette époque où l’on passait son temps à checker son téléphone toutes les cinq minutes. Ou peut-être que les jeunes trouveront toujours un moyen de contourner les règles – après tout, ils sont nés avec un clavier dans les mains.
Une chose est sûre : la décision qui sera prise pour les lycées français dans les prochains mois dira beaucoup de la société que nous voulons construire. Une société qui protège ses enfants de la surconnexion, ou une société qui leur fait confiance pour apprendre à s’autoréguler ?
Le débat ne fait que commencer. Et vous, vous en pensez quoi ?
