Il y a des matins où l’on préférerait ne jamais ouvrir les yeux sur certaines nouvelles. Mercredi, dans un coin tranquille de l’Isère, une simple fumée au loin a révélé l’horreur absolue.
Une voiture qui brûle au bord d’une départementale, en contrebas, presque cachée par les arbres. À l’intérieur, ce qui reste d’une jeune femme de 27 ans. Et très vite, une certitude : quelqu’un a voulu faire disparaître un crime.
Un féminicide qui glace le sang
Zaïa avait 27 ans. Aide-soignante dans un Ehpad, elle incarnait cette génération de soignantes discrètes qui se lèvent tôt pour prendre soin des autres. Personne n’imaginait que sa propre vie allait s’arrêter dans une violence aussi brutale.
Quand les pompiers arrivent sur place, à Saint-Marcel-Bel-Accueil, il est déjà trop tard. Le véhicule est entièrement la proie des flammes. Les gendarmes, eux, remarquent immédiatement des détails qui ne collent pas avec un simple accident.
Des indices qui ne trompent pas
Aucune trace de freinage, pas de choc visible, pas de sortie de route classique. Et surtout, cette odeur caractéristique qui flotte encore : un produit accélérateur a été utilisé. L’hypothèse d’un geste désespéré, d’un suicide par le feu, est balayée en quelques heures seulement.
L’enquête bascule alors en homicide volontaire. Les militaires de la section de recherches de Grenoble prennent le relais. Ils savent qu’ils ont affaire à quelque chose de particulièrement sordide.
Quand on retrouve un corps calciné dans une voiture sans aucun impact, on sait déjà que l’histoire qu’on va découvrir ne sera pas belle.
Un enquêteur expérimenté, sous couvert d’anonymat
Le compagnon dans le viseur dès le premier jour
Très rapidement, un nom revient sans cesse : celui de l’homme avec qui elle vivait. Un employé d’un crématorium – ironie tragique – qui appelle lui-même les gendarmes en milieu de matinée, prétendant avoir été prévenu par d’anciens collègues.
Il est entendu en audition libre l’après-midi même. Chemise impeccable, calme apparent. On lui prend ses vêtements, son téléphone. Rien ne semble l’accuser à ce moment-là. Il repart libre.
Mais pendant ce temps, les enquêteurs épluchent le portable de la victime. Et là, les incohérences s’accumulent. Des messages, des horaires qui ne collent pas, des zones d’ombre. Le puzzle commence à prendre forme.
L’interpellation et les premiers aveux
Vendredi, 6 heures du matin. Coup de bélier chez lui, à Bourgoin-Jallieu. Cette fois, c’est la garde à vue pour de bon. Et dès la fin de la matinée, selon plusieurs sources concordantes, il craque.
Ses mots sont glaçants. Une dispute dans la nuit. Une violence qui dégénère. Puis la panique. Face au corps sans vie, il décide de faire disparaître les traces. Il transporte la jeune femme dans sa propre voiture, l’asperge d’essence ou d’un autre liquide inflammable, et met le feu.
- Une dispute qui tourne mal
- Un geste fatal
- La tentative désespérée d’effacer le crime
- L’idée, peut-être, de faire croire à un suicide
Il avait déjà un passé judiciaire pour violences. Une condamnation en 2019. Rien qui, à l’époque, ne laissait présager un tel déchaînement.
Un Ehpad en deuil
Dans l’établissement où elle travaillait, c’est la sidération. Sur les réseaux sociaux, ses collègues publient des messages déchirants. « Tu prenais soin de nos résidents avec tellement de douceur », écrit l’un d’eux. « Tu avais toujours le sourire, même après une garde de nuit. »
Ces mots-là, on les lit trop souvent. Cette impression terrible que la victime était quelqu’un de lumineux, de bienveillant, et que c’est précisément cette lumière qu’on a voulu éteindre.
Les féminicides, cette litanie sans fin
On en est où, en 2025 ? Franchement, parfois j’ai l’impression qu’on recule. Une femme tous les trois jours, c’est la statistique qu’on nous ressort année après année. Et pourtant, chaque fois, on a ce sentiment d’impuissance.
Zaïa est devenue, malgré elle, un nouveau nom sur cette liste macabre. Un nom qu’on oubliera peut-être dans quelques semaines, remplacé par un autre drame, dans une autre région.
Mais pour sa famille, pour ses collègues, pour ses amis, le temps s’est arrêté mercredi matin, dans ce bois de Saint-Marcel-Bel-Accueil.
Ce que l’enquête doit encore établir
Les gendarmes travaillent maintenant à reconstituer la chronologie exacte. Où la dispute a-t-elle eu lieu ? Dans l’appartement du couple ? Chez elle ? Y a-t-il eu préméditation ou un simple emballement fatal ? L’idée de maquiller le crime en suicide était-elle présente dès le départ ?
Le parquet s’est dessaisi au profit du pôle criminel de Grenoble. La garde à vue a été prolongée. Un juge d’instruction va être saisi. Probablement pour meurtre sur conjoint, avec la circonstance aggravante de la cruauté.
Et nous, qu’est-ce qu’on fait ?
À chaque fois, c’est la même question qui revient. Comment en arrive-t-on là ? Comment des disputes, même violentes, peuvent-elles déboucher sur une telle barbarie ?
Il y a les signaux qu’on n’a pas vus. Les proches qui disent après coup : « Elle avait changé ces derniers temps », « Il était possessif », « Elle voulait partir mais elle avait peur ».
Et puis il y a cette culture de l’entre-soi, du silence, de la honte. Cette idée qu’on ne parle pas des problèmes de couple. Que ça reste dans la sphère privée.
Jusqu’à ce que ça explose. Et là, il est trop tard.
Derrière chaque féminicide, il y a des alertes qui n’ont pas été prises au sérieux. Des plaintes classées, des mains courantes, des « il va changer ».
Zaïa n’est pas qu’une victime de plus. Elle est le visage d’une génération de femmes qui croyaient pouvoir aimer sans risquer leur vie.
Et quelque part, dans ce bois de l’Isère, il reste encore un peu de fumée qui monte dans le ciel froid de novembre. Comme un rappel. Comme un cri qu’on n’a pas su entendre à temps.
(Article mis à jour le 22 novembre 2025 – l’enquête est en cours, de nouveaux éléments pourraient émerger dans les prochains jours)
