Vous êtes-vous déjà demandé qui accepte encore de devenir maire d’une petite commune en 2025 ? Quand on entend parler de démissions en cascade, de burn-out et de listes incomplètes, on pourrait croire que le job est maudit. Et pourtant, il y a ce gars de 27 ans qui, lui, semble nager en pleine forme au milieu de la tempête.
Je l’ai croisé un vendredi de novembre, dans un village de l’Essonne qui compte à peine plus d’habitants que mon immeuble parisien. Il sortait d’une réunion avec des agriculteurs, les bottes encore pleines de terre, et m’a accueilli avec cette énergie qu’on n’associe pas forcément à quelqu’un qui gère les eaux pluviales, les conseils municipaux houleux et les subventions à décrocher au compte-gouttes.
Pierre Vallée, l’ovni politique qui n’a pas prévu de redescendre
À 27 ans, il est toujours le plus jeune maire de toute l’Île-de-France. Il a pris l’écharpe en 2021, à 22 ans seulement, après une élection partielle provoquée par une série de démissions. Autant dire que le cadeau était empoisonné. Beaucoup auraient fui. Lui a dit oui.
Et non, il ne vient pas d’une dynastie politique. Pas de grand-père ancien maire, pas de père conseiller départemental. Juste un gamin du coin, ingénieur agronome de formation, qui cultive ses propres terres et court des marathons quand il a cinq minutes.
Quand la politique locale devient un sport d’endurance
Il rit quand on lui parle d’épuisement. « Tant que je ne serai pas essoré, je continuerai », lâche-t-il entre deux gorgées de café. La phrase est devenue sa marque de fabrique. On la retrouve dans toutes les conversations avec ceux qui le connaissent.
« La crise des vocations, elle n’est pas que générationnelle. Elle touche tout le monde. Mais nous, les jeunes, on arrive avec l’envie de faire autrement. »
Pierre Vallée, maire sans étiquette
Et il a raison. Partout en France, les petites mairies galèrent à remplir les listes. Parfois, c’est même la préfecture qui nomme une délégation spéciale parce qu’il n’y a plus personne pour gérer la commune. Dans ce contexte, voir un jeune de 27 ans tenir la barre avec le sourire, ça fait presque figure d’exploit.
Un quotidien à 100 à l’heure… et sans filet
Levé à 5 h 30 pour les bêtes, travail d’ingénieur à distance ou sur le terrain, réunions le soir, week-end souvent consacrés aux manifestations communales ou aux courses à pied longue distance. Franchement, rien que d’y penser, j’ai mal pour lui. Lui, non.
- Il cultive 70 hectares en bio avec son associé
- Il court des marathons en moins de 3 heures
- Il gère une commune de 800 habitants
- Et il dort… on ne sait pas trop quand
Ce qui frappe, c’est qu’il ne se plaint jamais. Même quand on évoque les nuits courtes, les dossiers administratifs interminables ou les habitants qui frappent à la porte à toute heure. « C’est le deal quand on est maire d’une petite commune », dit-il simplement.
Pourquoi les jeunes reviennent (ou restent) au village
Il y a quelques années, on nous expliquait que les moins de 30 ans fuyaient les campagnes. Télétravail ou pas, la tendance semble s’inverser. Pierre Vallée fait partie de cette génération qui choisit – oui, choisit – de vivre et de s’engager là où elle est née.
Pas par manque d’ambition. Plutôt par envie de maîtrise. « À Paris, tu es un numéro. Ici, tu peux vraiment changer les choses », explique-t-il. Et il a des projets plein la tête pour 2026 : nouvelle cantine bio, rénovation de la salle des fêtes, piste cyclable, installation de jeunes agriculteurs… Rien de révolutionnaire sur le papier, mais tout change quand c’est porté par quelqu’un qui a encore de l’énergie à revendre.
La crise des vocations ? Une opportunité déguisée
On entend beaucoup parler du désintérêt pour la politique locale. Moins de candidats, plus de démissions, des mairies fermées faute de combattants. Et si c’était justement le moment pour une nouvelle génération de prendre la place ?
Pierre Vallée en est convaincu. Il voit arriver dans son conseil municipal des trentenaires, des parents jeunes, des gens qui n’auraient jamais osé il y a dix ans. « Quand les anciens partent, ça laisse de la place. Il faut juste oser », résume-t-il.
« On n’a pas besoin d’avoir 60 ans et vingt ans de mandat derrière soi pour savoir ce qui est bon pour notre village. »
Et les habitants semblent suivre. Lors des dernières fêtes du village, j’ai vu des gamins de 10 ans venir lui parler de leur projet de city-stade comme s’il était leur grand frère. Le lien est là. Pas artificiel, pas calculé. Juste naturel.
2026 : rempiler ou passer la main ?
Officiellement, il n’a encore rien annoncé. Mais quand on discute cinq minutes, on comprend vite que l’idée de lâcher l’affaire ne l’effleure même pas. « Si les habitants me font encore confiance, je serai candidat », glisse-t-il avec ce petit sourire qui en dit long.
Et franchement, qui pourrait lui en vouloir ? Dans un paysage où beaucoup jettent l’éponge après six mois, voir quelqu’un tenir la route avec cette envie intacte, ça redonne presque foi en la politique de proximité.
Ce qu’on peut tous apprendre de ce maire marathonien
Au-delà de l’anecdote, l’histoire de ce jeune maire pose une vraie question : et si la solution à la crise des vocations passait justement par des profils comme le sien ? Des gens ancrés dans le réel, avec une vie à côté, qui ne font pas de la politique leur unique raison de vivre.
Pas besoin d’être un retraité disponible à 100 % pour gérer une commune. Parfois, il suffit d’avoir envie. Vraiment envie.
En repartant de ce petit village de l’Essonne, je me suis surpris à penser que, peut-être, l’avenir des mairies de France ne passera pas par plus de moyens ou plus de statut, mais par plus de gars (et de filles) comme lui. Des jeunes qui disent oui quand tout le monde dit non.
Et quelque part, ça fait du bien.
(Article rédigé après plusieurs jours passés dans la commune et de nombreuses discussions avec le maire, ses adjoints et des habitants. Toutes les citations sont authentiques, recueillies en novembre 2025.)
Et vous, pensez-vous qu’on verra plus de maires de moins de 30 ans en 2026 ? La relève est peut-être déjà en train de se préparer dans votre village…
