Imaginez un jeune homme de 20 ans, travaillant à la chaîne dans une usine de conserves, loin des projecteurs des grandes courses cyclistes. À cet âge, beaucoup auraient abandonné leurs rêves de gloire sportive, mais pas Jordan Jegat. Ce Breton têtu, originaire de Bignan dans le Morbihan, a transformé une passion d’enfance pour le vélo en une ascension fulgurante vers les sommets du cyclisme professionnel. Aujourd’hui, à 26 ans, il est aux portes du top 10 du Tour de France 2025, une prouesse qui force l’admiration. Comment un gars d’usine est-il devenu une étoile montante du peloton ? Plongeons dans son parcours, une histoire de sueur, de choix audacieux et d’une détermination à couper le souffle.
De l’Usine au Peloton : Une Trajectoire Atypique
Jordan Jegat n’a pas suivi le chemin classique des champions précoces. Contrairement à ceux qui dominent dès l’adolescence, il a d’abord vu le vélo comme un loisir, une échappatoire. À Bignan, petite commune bretonne, il pédalait pour le plaisir, sans penser à la gloire. Mais la vie a ses surprises. À l’adolescence, entre l’école et les copains, le vélo passe au second plan. Ce n’est qu’en catégorie junior que la flamme se rallume, portée par un esprit compétitif qui ne demandait qu’à s’exprimer.
Pourtant, le chemin vers le professionnalisme n’a rien d’une promenade. À 20 ans, alors que d’autres coureurs s’entraînaient à plein temps, Jegat enchaînait les jobs d’été et les contrats d’intérim. Usine de conserves, fabrique de gâteaux, poissonnerie… il a connu la fatigue des longues journées de travail. « C’est dur, mais ça forge le caractère », confie-t-on souvent dans les cercles cyclistes. Et pour Jegat, ces années ont été une leçon d’humilité. Chaque heure passée à l’usine lui rappelait que le vélo, même exigeant, était une chance.
Travailler à l’usine m’a appris à relativiser. Rouler des heures sous la pluie ? C’est rien comparé à huit heures dans le froid des surgelés.
– Un coureur professionnel évoquant son passé
Un Tournant Décisif : Le Pari du Professionnalisme
À 21 ans, Jegat se trouve à un carrefour. Ses parents, comme beaucoup, souhaitent qu’il sécurise un emploi stable. Mais lui, il a un rêve en tête : devenir coureur professionnel. « Je me donne un an. Si ça ne passe pas, j’arrête », leur lance-t-il. Ce pari, c’est le début d’une transformation. Il rejoint l’équipe amateur de Nantes, où le manager, un ancien coureur, voit en lui un potentiel brut. « L’objectif, c’est de vous faire passer pro », leur répète-t-on dès le premier jour. Pour Jegat, ces mots résonnent comme un appel.
La route n’est pas sans embûches. En 2020, la pandémie met le sport à l’arrêt. Les courses sont annulées, les rêves suspendus. Jegat retourne à l’usine, mais il ne baisse pas les bras. Il s’entraîne entre deux shifts, optimise son alimentation, perd du poids. Il investit même ses propres économies pour des stages en montagne, convaincu que chaque effort le rapproche de son but. Cette discipline, presque obsessionnelle, fait écho à une maxime bien connue dans le cyclisme : la victoire se construit dans l’ombre.
- Détermination : Jegat s’entraîne sans relâche, même après des journées d’usine.
- Investissement personnel : Il finance ses stages et suit un régime strict.
- Mental d’acier : Les critiques des autres coureurs ne l’arrêtent pas.
Les Premiers Pas dans le Grand Monde
En 2022, l’équipe de Nantes passe au niveau continental, le troisième échelon du cyclisme professionnel. Pour Jegat, c’est l’opportunité de se frotter aux pros. Mais le monde du World Tour est impitoyable. Les coureurs des grandes équipes regardent de haut ces « petits » nouveaux. « Les petites équipes, restez derrière », entend-il souvent. Pourtant, Jegat ne se laisse pas intimider. Il apprend le métier d’équipier, soutient son coéquipier Louis Barré, et commence à se faire un nom sur les Coupes de France.
Sa progression est fulgurante. En 2023, il signe chez TotalEnergies, une équipe au fonctionnement familial, parfaite pour ce coureur discret mais ambitieux. Dès son arrivée, il affiche ses objectifs : participer au Tour de France 2024. Sur un bout de papier, il calcule ses chances. Huit places pour 26 coureurs. Il y croit, et il y arrive. Son premier Tour est une révélation. « Le premier jour, j’étais comme un gamin. Je voulais tout : l’échappée, le maillot à pois… » Mais il apprend vite, se glisse dans les bonnes échappées et termine dans le gruppetto, épuisé mais grandi.
Le Tour, c’est un rêve. Mais c’est aussi une école. Tu apprends à gérer l’effort, la pression, et même l’échec.
– Un directeur sportif expérimenté
Tour de France 2025 : La Confirmation
En 2025, Jegat revient sur le Tour avec une confiance nouvelle. À 26 ans, il n’est plus le novice de l’an dernier. Lors de la 15e étape, il se glisse dans une échappée, frôle le top 10 et termine 11e au général, à seulement 1’06’’ du 10e. Ce n’est pas juste un exploit isolé : c’est le fruit d’années de travail. « Il a une progression linéaire, impressionnante », note un observateur du peloton. Chaque course, chaque entraînement, chaque sacrifice l’a rapproché de ce moment.
Mais qu’est-ce qui fait de Jegat un coureur à part ? Peut-être cette capacité à transformer les obstacles en carburant. La descente du Tourmalet, où il a frôlé la chute, l’a secoué. « Je descendais comme une chèvre », plaisante-t-il. Pourtant, le lendemain, il est de nouveau à l’avant, dans le groupe de contre, prouvant qu’il apprend vite. Ce mental, forgé dans les usines bretonnes, lui permet de rivaliser avec les meilleurs.
| Étape | Performance | Classement général |
| 15e étape (2025) | 8e dans l’échappée | 11e à 1’06’’ du top 10 |
| Tour 2024 | Première participation | Dans le gruppetto |
| Flèche Wallonne 2023 | 14e malgré le froid | Non classé |
Un Caractère Breton, une Ambition Universelle
Si Jegat impressionne, c’est aussi par sa personnalité. Discret, un peu dans son monde, il cache une ambition féroce sous un sourire de plaisantin. « Il est décontracté, mais hyper focus », confie un proche de son équipe. Cette dualité fait de lui un coureur attachant. Les supporters bretons, nombreux à le suivre, voient en lui un symbole de persévérance. « Allez JJ ! Montre-leur qui tu es ! », peut-on lire sur les réseaux sociaux. Et Jegat répond sur la route, pédale après pédale.
Ce qui frappe, c’est sa capacité à tirer des leçons de chaque expérience. La Flèche Wallonne 2023, où il termine 14e dans des conditions glaciales, reste un tournant. « Je pensais à l’usine, au froid des surgelés. Ça m’a poussé à continuer », raconte-t-il. Cette résilience, c’est le fil rouge de sa carrière. Chaque échec, chaque critique l’a renforcé, comme un métal forgé dans le feu.
L’Importance d’un Écosystème Solide
Personne ne réussit seul, et Jegat le sait. Son ascension doit beaucoup à son entourage. À Nantes, son manager a cru en lui dès le premier jour. Chez TotalEnergies, son directeur sportif, Lylian Lebreton, loue son sérieux. Ses coéquipiers, comme Kévin Vauquelin, avec qui il s’entraîne sur la Côte d’Azur, sont des piliers. Ensemble, ils partagent des sorties longues, des discussions tactiques, et cette camaraderie propre au cyclisme.
Mais l’écosystème, c’est aussi la Bretagne. Cette région, berceau de champions comme Bernard Hinault, respire le vélo. Les routes vallonnées, le vent, la pluie : tout prépare au combat. Jegat, formé à Locminé, porte cet héritage. « En Bretagne, on ne lâche rien », aime-t-on dire. Et lui, il incarne cette devise à la perfection.
Le cyclisme breton, c’est une école de vie. Tu apprends à te battre, à respecter la route et à ne jamais abandonner.
– Un ancien coureur breton
Et Maintenant, l’Avenir ?
À 26 ans, Jegat est encore loin de son plafond. Le Tour de France 2025 n’est qu’une étape. Avec sa progression linéaire, il pourrait viser un top 10, voire mieux, dans les années à venir. Mais au-delà des classements, c’est son histoire qui inspire. Dans un sport où les jeunes talents sont souvent formatés dès l’adolescence, Jegat prouve qu’un parcours atypique peut mener au sommet. Il incarne cette idée que le talent, sans travail, ne suffit pas.
Alors, que retenir de cette épopée ? Peut-être que le succès, dans le sport comme ailleurs, est une question de choix. Jegat a choisi de croire en lui, de travailler dur, de ne pas écouter les critiques. Et si son histoire résonne, c’est parce qu’elle parle à chacun de nous. Qui n’a jamais rêvé de transformer une passion en triomphe ? Jegat, lui, l’a fait.
- Persévérance : Ne jamais abandonner, même face aux obstacles.
- Apprentissage : Chaque course est une leçon pour progresser.
- Authenticité : Rester fidèle à ses racines et à ses valeurs.
J’ai toujours trouvé fascinant ces athlètes qui, contre toute attente, gravissent les échelons. Jegat, avec son parcours, me rappelle que le sport est une métaphore de la vie. On tombe, on se relève, on pédale. Et parfois, on arrive au sommet. Où sera-t-il dans cinq ans ? Une chose est sûre : on n’a pas fini d’entendre parler de ce Breton.
