Il y a des soirs où le rugby redevient magique. Samedi, au Stade de France, transi de froid, Louis Bielle-Biarrey a réchauffé tout un pays en l’espace de quatre actions. Deux essais, deux passes décisives, des accélérations qui laissent les défenseurs sur place et ce petit par-dessus devenu sa signature. À 22 ans seulement, l’ailier bordelais a rappelé qu’il n’était pas juste un phénomène : il est déjà un monstre.
Le retour du facteur X
Revenons deux semaines en arrière. Contre l’Afrique du Sud, puis les Fidji, l’homme au casque rouge restait muet. Zéro essai, zéro éclat, presque invisible. On commençait à entendre les murmures habituels : « Il est trop surveillé », « Il a perdu sa fraîcheur », « C’est la fin de série ». Huit matchs consécutifs avec au moins un essai, douze pions en tout, et soudain plus rien pendant 197 minutes. Ça piquait.
Mais ceux qui connaissent un peu le bonhomme savaient que ça n’allait pas durer. Parce que Louis, quand on lui met la pression, il répond toujours de la même façon : en appuyant sur l’accélérateur.
La 31e minute : l’œuvre d’art
31e minute, le tableau d’affichage indique 17-13 pour les Bleus. Ballon récupéré dans nos 40 mètres. LBB prend l’intervalle sur son aile gauche, fixe son vis-à-vis, tape ce petit coup de pied par-dessus millimétré… et va plus vite que le ballon. Récupération, crochet extérieur, crochet intérieur, dernier défenseur australien assis par terre. Essai.
Le Stade de France explose. Moi, devant ma télé, je hurle comme un fou. Parce que ce n’est plus du rugby, c’est de la poésie en mouvement.
« Sur un ballon, il peut se passer tout et n’importe quoi »
Jonathan Wisniewski, consultant rugby
Et il n’avait pas tort.
Impliqué sur quatre des sept essais français
- 9e minute : percée plein champ, choix parfait de la passe intérieur pour Nicolas Depoortere qui marque son premier essai
- 31e minute : le par-dessus légendaire et son premier essai personnel
- 52e minute : nouvelle passe décisive laser pour le doublé de Depoortere
- 72e minute : relais supersonique avec Kalvin Gourgues et sprint final pour son deuxième essai, index levé avant même d’aplatir
Quatre actions, quatre cadeaux pour le public. Et pourtant, ce n’est même pas tout. Il y a eu ces courses où il attire deux, trois défenseurs, ces retours intérieur où il se propose sans cesse, cette capacité à être toujours là où on ne l’attend pas.
Franchement, quand tu vois ça, tu te dis que le gamin joue déjà dans une autre catégorie.
20 essais en 22 sélections : les chiffres qui font peur
À 22 ans et 22 capes, il vient de planter son 20e essai en Bleu. Faites le calcul. C’est du jamais-vu à ce rythme. Vincent Clerc, le recordman historique, avait mis bien plus de temps pour atteindre ce total. Serge Blanco, Christophe Dominici, tous les grands ailiers français du passé sont déjà largement distancés à âge égal.
On parle d’un joueur qui n’a même pas encore atteint son prime et qui flirte déjà avec les records absolus. Effrayant.
Le casque rouge, symbole d’une génération
Ce casque rouge, au début, certains se moquaient. Trop flashy, trop jeune, trop « m’as-tu-vu ». Aujourd’hui, il est devenu une marque de fabrique. Quand tu le vois surgir sur l’écran, tu sais qu’il va se passer quelque chose. Un peu comme le bandeau de Noah Lolesio côté australien, ou le bonnet de Dupont. Le casque rouge, c’est l’avertissement : danger imminent.
Et puis il y a cette humilité désarmante. Au micro après le match, pas de grandes phrases :
« Je suis très content de marquer devant 80 000 personnes, c’est génial à chaque fois. »
Point final. Pas besoin d’en rajouter. Les images parlent toutes seules.
Et maintenant ?
La question qui brûle toutes les lèvres : jusqu’où peut-il aller ? Meilleur joueur monde 2025 ? Record d’essais en Bleu ? Ballon d’or rugby un jour ? Tout semble possible.
Ce qui est sûr, c’est qu’on vient de vivre une soirée où un gamin de 22 ans a pris le rugby français sur ses épaules et lui a redonné le sourire après deux matchs frustrants. Dans un XV de France parfois brouillon, parfois fragile défensivement, il a été l’étincelle, la folie, le génie.
Et quelque part, ça fait du bien. Parce que oui, on peut critiquer le jeu, l’indiscipline, les trous d’air. Mais quand tu as des joueurs capables de produire ça, tu te dis que l’avenir est sacrément excitant.
Alors merci Louis. Merci pour le par-dessus, merci pour les crochets, merci pour les frissons. Continue comme ça, et un jour, on racontera à nos enfants qu’on a vu jouer le plus grand ailier français de l’histoire.
En attendant, on savoure. Parce que des soirées comme celle-là, il n’y en a pas tous les week-ends.
Et vous, quel moment de la soirée Bielle-Biarrey vous a fait bondir de votre canapé ? Le premier par-dessus ? Le relais avec Gourgues ? Dites-moi tout en commentaire, on en reparle pendant des heures…
