Vous est-il déjà arrivé d’attendre une nouvelle qui peut tout faire basculer ? Ce genre de nouvelle qui vous ronge, jour après jour, et qui concerne quelqu’un que tout le monde connaît dans une ville de taille moyenne. À Conflans-Sainte-Honorine, c’est exactement ce que vivent les habitants depuis des mois.
Un maire en exercice, accusé de faits graves par son ancienne compagne, et dont l’avenir politique ne tient plus qu’à un délibéré. Initialement prévu mi-novembre, puis ce lundi 24, le verdict vient encore d’être repoussé. Cette fois, c’est le 1er décembre que les juges rendront leur décision. Et franchement, on commence à se demander si ce n’est pas une façon de faire monter la pression.
Un énième report qui interroge
Ce n’est pas la première fois que la date bouge. On avait déjà eu droit à un premier décalage il y a quelques semaines. Résultat : tout le monde retient son souffle un peu plus longtemps. Les magistrats n’ont aucune obligation de justifier ces reports, mais dans les couloirs du palais, on murmure que les agendas chargés ou la nécessité de peaufiner la motivation expliquent souvent ces petites « prorogations ».
Pour l’élu en question, chaque jour supplémentaire doit ressembler à une éternité. Parce qu’au-delà de la peine de prison avec sursis prononcée en première instance, c’est surtout la sanction d’inéligibilité de cinq ans qui fait trembler tout son camp. Si elle est confirmée, adieu les municipales de mars 2026. Un vrai couperet.
Ce qui s’est passé en première instance
Petit retour en arrière pour ceux qui auraient loupé les épisodes précédents. L’affaire éclate il y a déjà plusieurs années. L’ancienne compagne du maire porte plainte pour harcèlement moral et agression sexuelle. Des accusations lourdes, précises, étayées par des messages, des témoignages, des certificats médicaux. Le genre de dossier qui ne laisse pas indifférent.
En première instance, la justice n’y va pas avec le dos de la cuillère : un an de prison avec sursis, 5 000 euros d’amende, et surtout cinq années d’inéligibilité avec exécution provisoire immédiate. Autrement dit, même en faisant appel (ce qui a été fait dans la foulée), l’élu risquait de devoir quitter son fauteuil dès la lecture du jugement. Sauf que l’appel suspend l’exécution… pour l’instant.
« C’est une peine particulièrement lourde pour un élu en exercice. Elle envoie un signal fort : personne n’est au-dessus des lois, même quand on porte l’écharpe tricolore. »
Un avocat pénaliste habitué des tribunaux franciliens
Les scénarios possibles le 1er décembre
Alors, que peut-il se passer lundi prochain ? On a fait le tour des hypothèses avec plusieurs juristes. Il y a grosso modo quatre grandes possibilités, et aucune ne laisse indifférent.
- Confirmation pure et simple de la peine initiale, sans exécution provisoire : l’élu reste maire jusqu’à épuisement des recours (Cassation incluse), mais l’inéligibilité deviendra définitive si tous les appels échouent.
- Confirmation avec exécution provisoire : là, c’est la douche froide immédiate. Le préfet peut théoriquement le déclarer démissionnaire d’office dès la sortie d’audience.
- Relaxe partielle ou totale : l’élu ressort blanchi ou presque, et peut sereinement préparer sa campagne 2026.
- Aggravation de la peine : ça arrive plus rarement en appel, mais ça reste possible. Certains y voient même un risque réel vu la gravité des faits reprochés.
Le plus probable, selon les observateurs ? Une confirmation avec quelques ajustements. Mais dans ce genre d’affaires, la surprise est toujours possible.
Et si l’inéligibilité était prononcée : qui prendrait la mairie ?
C’est la question que tout le monde se pose en ville. Contrairement à ce qu’on entend parfois dans les cafés, il n’y aura pas d’élection partielle anticipée. Nous ne sommes qu’à quelques mois des municipales générales de mars 2026. La loi est claire : on reste dans la continuité du mandat.
Concrètement, si le maire devait être déclaré inéligible avec exécution immédiate, c’est le premier adjoint qui assurerait l’intérim jusqu’au prochain scrutin. Et encore, seulement si le préfet ne décide pas de maintenir l’élu en poste « pour assurer la continuité du service public » – une possibilité rarement utilisée, mais qui existe bel et bien.
Dans les faits, la ville continuerait de tourner. Les grands projets (le port, les écoles, le futur complexe sportif) ne s’arrêteraient pas pour autant. Mais l’image, elle, en prendrait un sérieux coup.
Un contexte local déjà tendu
Il faut dire que Conflans-Sainte-Honorine traîne depuis cinq ans une autre blessure, bien plus profonde encore : l’assassinat de Samuel Paty. La ville reste marquée au fer rouge par cet événement. Beaucoup d’habitants ont encore du mal à en parler sans émotion. Et voir leur maire empêtré dans une affaire de violences faites aux femmes, ça passe mal. Très mal.
Dans les marchés, dans les files d’attente des boulangeries, on entend de tout. Il y a ceux qui défendent « leur » maire, qu’ils ont élu et réélu depuis 2014. Et il y a ceux qui estiment qu’un élu condamné, même avec sursis, n’a plus sa place à la tête d’une commune de 36 000 habitants.
« On a déjà assez souffert avec Samuel Paty. On n’a pas besoin d’un maire sous le coup d’une condamnation pour harcèlement. Il y a des limites. »
Une mère de famille croisée au marché de Fin d’Oise
L’effet sur les municipales 2026
À quatre mois du scrutin, l’incertitude est totale. Les listes commencent à se monter dans l’ombre, mais personne n’ose vraiment se déclarer tant que le sort du maire sortant n’est pas scellé. C’est un peu le jeu de la chaise musicale version politique locale.
Du côté de l’opposition, on se frotte les mains discrètement. Du côté de la majorité, on serre les dents et on répète que « la présomption d’innocence doit s’appliquer jusqu’au bout ». Sauf que la présomption d’innocence, elle, ne vote pas en mars prochain.
Et puis il y a cette réalité brutale : même en cas de relaxe, l’image est abîmée. Difficile de faire campagne en balayant d’un revers de main des mois de procédure, des audiences, des articles de presse. La politique locale, c’est aussi une histoire de perception.
Un cas qui dépasse largement Conflans
Ce qui se joue ici, ce n’est pas seulement le sort d’un homme ou d’une ville. C’est aussi la question de la place des élus face à des accusations de violences sexuelles ou conjugales. Ces dernières années, plusieurs maires ont été rattrapés par des affaires similaires. Certains ont démissionné, d’autres se sont accrochés. Peu ont survécu politiquement.
Ce délibéré du 1er décembre fera jurisprudence, ou du moins marquera les esprits. Il dira quelque chose de notre époque : tolère-t-on encore qu’un élu condamné pour des faits de cette nature reste en poste ? La réponse, on l’aura dans moins d’une semaine maintenant.
En attendant, la ville retient son souffle. Les drapeaux de la mairie flottent toujours en haut du mât. Mais pour combien de temps encore ?
On suivra ça de très près. Et dès que le verdict tombera, vous serez les premiers informés. Parce que dans cette affaire, chaque jour compte. Et chaque report rajoute du sel sur une plaie déjà béante.
