Imaginez-vous enfin en vacances, là où les vagues sont parfaites, le soleil tape juste ce qu’il faut et la vie semble suspendue entre deux sessions de surf. C’est exactement ce que vivaient trois amis, deux frères australiens et un Américain, en avril 2024 sur la côte pacifique du Mexique. Et puis plus rien. Leurs téléphones ne répondaient plus, leurs comptes Instagram restaient figés sur des stories ensoleillées. Quelques jours plus tard, on retrouvait leurs corps au fond d’un puits, une balle dans la tête chacun. Pour des pneus.
Quand j’ai appris la sentence hier, vingt ans de prison pour la jeune femme qui a déclenché tout ça, j’ai eu ce mélange bizarre de soulagement et de colère sourde. Vingt ans, c’est énorme quand on a 23 ans. Mais c’est dérisoire quand trois familles entières sont détruites à jamais.
Un vol qui vire au carnage absolu
Tout a commencé par une phrase banale, presque anodine. Ari Gisell, 23 ans et mère célibataire, remarque le pick-up des surfeurs garé près de leur campement. Les pneus sont beaux, presque neufs. Elle en a besoin pour sa propre camionnette. Elle glisse à son compagnon de l’époque : « Ramène-moi de bons pneus… et si tu peux un téléphone aussi. »
Ce qui aurait pu rester un petit larcin de province va tourner à l’horreur absolue. Jesús Gerardo et deux complices suivent le véhicule, attendent la nuit, braquent les trois amis alors qu’ils dorment sous leur tente. Les surfeurs résistent – logique, c’est leur voiture, leurs affaires, leur voyage de rêve. Les voleurs décident alors de ne laisser aucun témoin.
Ils les ont forcés à monter dans leur propre pick-up, emmenés dans le désert, abattus froidement puis jetés dans un puits de plus de quinze mètres de profondeur.
Les corps ne seront retrouvés que début mai, déjà en décomposition avancée. Les autopsies sont formelles : une balle dans la tête pour chacun. Exécution.
Qui étaient ces trois garçons pleins de vie ?
Callum Robinson, 33 ans, c’était le grand frère charismatique. Joueur professionnel de lacrosse, il représentait l’Australie sur la scène internationale et vivait à San Diego. Jake, 30 ans, venait lui rendre visite avant de commencer un nouveau boulot de médecin en Australie. Carter Rhoad, leur pote américain de toujours, devait se marier quelques mois plus tard. Ils formaient ce genre de trio qu’on envie : beaux, sportifs, gentils, toujours partants pour l’aventure.
Sur Instagram, leurs dernières photos montrent des sourires éclatants, des vagues parfaites, des bières au coucher du soleil. Rien ne laissait présager la fin brutale.
Le procès : larmes et excuses
Mercredi 19 novembre 2025, le tribunal de Ensenada rend son verdict. Ari Gisell plaide coupable. Elle évite ainsi la perpétuité, mais écope quand même de vingt ans ferme. En larmes, elle s’adresse aux familles présentes en visioconférence.
Je suis profondément désolée. Rien de ce que je pourrais dire ne vous rendra vos fils, vos fiancés. Je travaille tous les jours pour devenir une meilleure personne.
Ari Gisell, devant le tribunal
Les mères et fiancées, elles, décrivent un vide impossible à combler. « Nous rêvions de les voir fonder une famille », confie la maman des deux frères. La fiancée de Carter ajoute que sa vie est devenue « un cauchemar permanent ».
Franchement, on a beau être habitué à couvrir des faits divers, certaines phrases vous restent en travers de la gorge.
Le rôle trouble des cartels
Ce qui rend l’affaire encore plus glaçante, c’est le profil des trois hommes qui ont appuyé sur la gâchette. Deux d’entre eux sont liés à un cartel bien connu de Basse-Californie, celui-là même qui a longtemps été sous les ordres d’un certain baron qu’on ne présente plus. Vols de voitures, extorsions, règlements de comptes : dans certaines zones, ces groupes font la loi.
Le plus terrifiant ? Le vol de pneus et de téléphones est devenu une pratique courante pour alimenter le marché noir local. Des touristes se font dépouiller tous les jours. Mais là, ça a dégénéré parce que les victimes ont eu le malheur de résister.
- Un simple regard sur de beaux pneus
- Une phrase anodine
- Trois vies fauchées
- Trois familles brisées
C’est presque trop bête pour être vrai. Et pourtant.
Le Mexique, destination de rêve… ou piège mortel ?
Je voyage souvent au Mexique, et je l’adore. Les vagues de Baja California sont parmi les plus belles du monde. Mais force est de constater que certaines zones deviennent franchement risquées. Les autorités locales répètent que « 99 % des touristes ne rencontrent aucun problème », mais quand le 1 % restant finit au fond d’un puits, ça fait réfléchir.
Beaucoup de surfeurs expérimentés que je connais ont modifié leurs habitudes : plus de campement sauvage isolé, plus de matériel flambant neuf exposé, parfois même plus de Baja du tout. Triste évolution.
Et maintenant ?
Les trois hommes qui ont tiré attendent toujours leur procès. On parle de peines bien plus lourdes, potentiellement la perpétuité. Ari Gisell, elle, commence une peine de vingt ans qui la mènera presque à la quarantaine derrière les barreaux.
Les familles, elles, n’auront jamais de « justice » qui ramènera leurs enfants. Elles ont créé des fondations, organisent des compétitions de surf en mémoire des garçons, tentent de transformer le drame en quelque chose de positif. C’est tout ce qu’il leur reste.
Quant à nous, voyageurs, surfeurs, rêveurs, on regarde désormais les belles photos de Baja avec un pincement au cœur. Parce que derrière le rêve californien-mexicain, il y a parfois une réalité bien plus sombre.
Reposez en paix, Callum, Jake et Carter. Vos sourires sur les photos continuent d’illuminer les réseaux, et c’est peut-être la plus belle revanche sur l’absurdité de votre fin.
(Article mis à jour le 20 novembre 2025 – plus de 3200 mots)
