Il y a des soirs où le football vous rappelle brutalise sans même que l’adversaire soit forcément plus fort. Mercredi, à Limassol, l’AS Monaco en a fait l’amère expérience. Menant 2-0 face à Paphos, une équipe chypriote censée être largement à sa portée, le club de la Principauté a fini par concéder le match nul 2-2. Et le pire, c’est que personne n’est vraiment surpris.
Quand la gentillesse devient un défaut
On va être honnête : voir Monaco prendre l’eau sur des coups de pied arrêtés, ce n’est plus une nouvelle. C’est presque devenu une tradition douloureuse. Mais cette fois, c’est le cocktail complet qui fait mal : fragilité mentale, manque de vice et incapacité à tuer le match quand tout vous sourit.
Pourtant, le début de match était presque parfait. Combinaisons rapides, pressing haut, but rapide. On s’est dit : « Tiens, l’effet Pocognoli fonctionne encore. » Et puis, comme souvent cette saison, l’ASM a oublié qu’un match dure 90 minutes, pas 60.
La roublardise, cette grande absente
Ce qui a sauté aux yeux, c’est le contraste abyssal entre les deux équipes dans la gestion des moments chauds. D’un côté, des Chypriotes rugueux, tactiques, prêts à laisser une semelle ou à simuler au bon moment. De l’autre, des Monégasques parfois trop propres, trop naïfs.
« Il nous manque un petit peu ce côté roublard, un peu vicieux et un peu agressif »
Sébastien Pocognoli, entraîneur de l’AS Monaco
La phrase est tombée en conférence de presse et elle résume tout. On a vu Golovine s’énerver après une faute non sifflée et prendre un jaune inutile. Camara balancer une petite claque par frustration. Zakaria, pourtant capitaine exemplaire, se faire dominer dans les duels aériens en fin de match. Tout ça sent le doute, la crispation, l’équipe qui sent que ça peut basculer à tout moment.
Les coups de pied arrêtés, ce cancer récurrent
Revenons sur les faits. Monaco encaisse ses deux buts sur… corner et coup franc. Rien de nouveau sous le soleil rouge et blanc. Depuis le début de la saison en Ligue des Champions, c’est une hécatombe. Concentration déficiente ? Mauvais placement ? Manque de taille ? Probablement un peu de tout ça.
- Défense zonale qui laisse des espaces béants
- Manque d’agressivité sur le premier ballon
- Rebond non attaqué
- Gardien qui hésite à sortir
Le scénario est presque toujours le même. Et face à des équipes qui savent jouer leur va-tout sur ces phases, c’est du pain bénit.
Un problème avant tout mental ?
Ce qui frappe, c’est que les joueurs eux-mêmes en ont conscience. Lukas Hradecky, la voix cassée à force de hurler sur sa défense, l’a dit sans filtre :
« On ne peut pas gagner des matches seulement en pressant haut. Nous devons être des tueurs, ne pas être aussi tendres. »
Lukas Hradecky
Le gardien finlandais a raison. Monaco a du talent, parfois même beaucoup. Mais quand il s’agit de gérer une avance, de faire le dos rond, de mettre le pied là où ça fait mal, l’équipe craque. On l’a vu à Rennes (4 buts encaissés), à Lens (4 encore), et maintenant à Chypre.
Le plus inquiétant ? Cette série en cours : une seule victoire lors des cinq derniers matchs toutes compétitions confondues. L’effet Pocognoli, arrivé en octobre pour redresser la barre, semble déjà s’essouffler.
Pocognoli face à son plus grand défi
Le coach belge n’a pas caché que le chantier était immense quand il a pris l’équipe en octobre. Changer de système en cours de saison, tenter une défense à quatre avec Jordan Teze reconverti en axial, gérer les ego, les blessures, les doutes… Tout ça en pleine course à l’Europe.
Mais là, on touche au cœur du problème : l’absence d’ADN collectif. Pocognoli le dit lui-même, il cherche encore le vrai caractère de cette équipe. Et pour l’instant, il n’y a qu’une solution : la stabilité. Mais comment l’obtenir quand tu changes de système tous les quatre matins ?
Et maintenant ?
Avec ce nul, Monaco reste dans la zone play-offs de Ligue des Champions, mais la marge est mince. Les barrages s’annoncent comme un couperet. Et pour y arriver, il va falloir retrouver cette agressivité entrevue à Bodø ou à Nantes, ces soirs où l’équipe terminait à 7 cartons jaunes mais avec les 3 points.
Paul Pogba n’a pas joué à Chypre, préservé. Peut-être le bon choix. La Pioche va devoir sortir les crocs dans les prochaines semaines, parce que cette équipe a besoin d’un leader qui met le feu, qui montre l’exemple dans les duels, qui fait mal.
Parce que oui, le feu n’est pas éteint, comme le dit Hradecky. Les discussions dans le vestiaire ont été animées, les joueurs se parlent, se disent les vérités. C’est déjà ça. Mais il va falloir transformer ces mots en actes. Vite.
Conclusion : un sursaut ou la chute ?
Ce match contre Paphos n’est pas une catastrophe comptable. Mais il est un révélateur cruel. Monaco a les joueurs, a les idées, parfois même le jeu. Mais il lui manque cette méchanté, cette rage de gagner qui transforme une bonne équipe en grande équipe.
Les prochaines semaines vont être décisives. Soit l’ASM retrouve son instinct de tueur et arrache sa qualification en barrages, soit elle continuera à jouer les gentils tourists du football européen. Et ça, sur la scène continentale, ça ne pardonne pas.
Le Rocher vacille. À eux de prouver qu’il ne s’effondrera pas.
