Vous souvenez-vous de la dernière fois où Melun a basculé à gauche ? Moi non plus. Depuis 1947, la préfecture de Seine-et-Marne reste un bastion imprenable pour la droite. Pourtant, à quatre mois des municipales de mars 2026, quelque chose bouge dans l’air. Et pas qu’un peu.
Six listes sont déjà officiellement dans les starting-blocks. Six. Autant dire que ça va être la foire d’empoigne. Et quand on regarde de plus près les profils, les étiquettes et surtout les ego qui s’entrechoquent, on se dit que le scrutin s’annonce explosif.
Melun 2026 : une campagne qui s’annonce historique
Franchement, je n’avais pas vu une configuration pareille depuis longtemps dans une ville de cette taille. D’habitude, on a deux ou trois gros blocs qui s’affrontent proprement. Là ? C’est le festival de la division tous azimuts. Et vous savez quoi ? C’est peut-être précisément ce qui pourrait tout faire basculer.
La gauche en trois morceaux (minimum)
Commençons par le camp qui rêve de reconquérir la ville depuis près de 80 ans. La gauche. Et là, accrochez-vous : impossible de faire l’union au premier tour.
Premier visage : Rémy Béhagle, 38 ans, prof de lycée, melunais depuis 2017 et investi par La France Insoumise. Le garçon est sympathique, parle bien, veut la « révolution citoyenne » et la « bifurcation écologiste ». Il répète que l’union reste possible… mais seulement au second tour. Traduction : pour l’instant, chacun sa liste.
« La politique, c’est un programme, des compétences et surtout pas des querelles d’ego »
Rémy Béhagle, tête de liste LFI
Deuxième morceau : Céline Gillier, 49 ans, élue d’opposition depuis 2020, soutenue par le Parti socialiste, le PCF, Place publique et le PRG. Elle aussi voulait l’union. Elle aussi a fini par dire banco pour une liste autonome. Son argument massue ? « L’adversaire, c’est le maire sortant ».
Troisième morceau, et pas des moindres : le ticket Bénédicte Monville – Djamila Smaali-Paillé. L’écologiste historique (élue depuis 2014, 30,2 % en 2020 au second tour) s’associe avec la candidate d’Espoir Melun (près de 10 % en 2020). Elles refusent poliment l’invitation LFI et construisent leur propre projet « populaire et écologiste ».
- Municipalisation de l’eau
- Priorité à l’humain
- Expérience de terrain depuis des années
Elles résument leur position en une phrase qui en dit long : « On a construit un projet en vivant la ville, pas en suivant une ligne nationale ».
Résultat des courses ? Trois listes de gauche au premier tour. Peut-être quatre si les Écologistes officiels finissent par en rajouter une. Vous avez dit dispersion des voix ?
À droite, ça ne va pas beaucoup mieux
Le maire sortant, Kadir Mebarek (Horizons), va vivre sa première élection sous son propre nom. Arrivé en cours de mandat en octobre 2023, il défend un bilan axé sécurité, travaux du Tzen 2 et lutte contre les poids lourds en transit (même si le tribunal vient de lui mettre un petit stop là-dessus).
Son positionnement ? Centre-droit, rassembleur, « unité de la ville ». Classique. Mais ça risque de ne pas suffire.
Car en face, Philippe Martin, 49 ans, élu d’opposition LR, claque la porte de la ligne officielle et monte sa propre liste « Relevons Melun ». Sans investiture. Avec deux autres élus dans son groupe. Son obsession ? Le « déclassement » de la ville et surtout les finances : 100 millions d’euros de dette, selon lui. Ça fait mal.
Et l’extrême droite qui veut sa part du gâteau
Cerise sur le gâteau : Dominique Lioret, 70 ans, ancien maire de La Grande-Paroisse, ex-RN, ex-coprésident d’un micro-parti d’extrême droite, se lance avec l’ambition de « virer la macronie ».
Son discours ? Le grand classique : « Avant, Melun c’était le paradis, aujourd’hui c’est plus Melun ». Il rêve d’une union des droites dures jusqu’à Reconquête. Philippe Martin a déjà poliment décliné l’invitation. Tant mieux, ça aurait fait tache.
« À ce stade, son union c’est l’union des extrêmes droites. Nous, on veut l’union des Melunais autour d’un projet »
Philippe Martin, tête de liste dissidente LR
Pourquoi ça peut tout changer cette fois-ci
Regardez les chiffres de 2020 pour comprendre l’enjeu. Au second tour, la droite l’avait emporté dans une triangulaire avec 46 % environ, face à une gauche/écologistes à 30 % et une autre liste à 23 %. Avec trois listes de gauche et deux (voire trois) à droite, on risque l’éparpillement total.
Et là, tout devient possible. Une quadrangulaire ? Une quinquangulaire ? Voire une qualification surprise au second tour ? Historiquement, quand la dispersion est maximale, c’est souvent là que les surprises arrivent.
Ce que je trouve fascinant, c’est que tous les candidats, sans exception, disent vouloir « répondre aux besoins des Melunais ». Sécurité, commerce de proximité, finances, qualité de vie… Tout le monde est d’accord sur le diagnostic. C’est sur les solutions et surtout sur les personnes que ça bloque.
Les grands thèmes qui vont dominer la campagne
- La sécurité : thème numéro 1, comme partout en France. Le maire sortant met en avant les moyens renforcés. Ses adversaires disent que ça ne suffit pas.
- Les finances : 100 millions de dette, des projets dépendants des subventions… Le sujet qui fâche.
- Les transports : le Tzen 2, les poids lourds, la circulation. Le tribunal administratif vient d’ailleurs de suspendre partiellement l’arrêté anti-camions du maire.
- Le commerce local : comment redynamiser le centre-ville ?
- L’écologie : entre ceux qui veulent municipaliser l’eau et ceux qui trouvent ça irréaliste.
Et au milieu de tout ça, les Melunais, qui vont devoir choisir entre six visions différentes d’une même ville.
Mon pronostic (osé) pour mars 2026
Si j’étais parieur – et je le suis parfois –, je dirais que le maire sortant reste favori… mais de justesse. La division à gauche peut lui profiter mécaniquement. À condition que la droite ne s’effondre pas complètement avec les dissidences.
Scénario noir pour lui : deux listes de droite au second tour + fusion partielle de la gauche = triangulaire très serrée. Et là, plus rien n’est écrit.
Scénario rose : la gauche reste en trois bouts, la droite dissidente fait moins de 10 %, et le maire repasse tranquillement avec 40-45 % dans une quadrangulaire.
Une chose est sûre : cette campagne va être passionnante à suivre. Et pour une fois, à Melun, l’issue n’est vraiment pas jouée d’avance.
Alors, qui va l’emporter ? Le rassembleur de centre-droit ? Le dissident républicain ? La coalition rose-verte-rouge ? Ou un scénario complètement fou qu’on n’a même pas encore imaginé ?
Rendez-vous dans quatre mois. Mais une chose est certaine : en 2026, Melun ne sera plus tout à fait la même.
(Article mis à jour le 25 novembre 2025 – suivez l’évolution de la campagne dans nos prochains articles)
