Il y a des annonces qui ne surprennent personne… et pourtant, quand elles tombent, on sent quand même l’électricité dans l’air. Ce jeudi de novembre 2025, Nathalie Appéré a mis fin au petit jeu du « sera-t-elle, ne sera-t-elle pas ? ». Oui, la maire socialiste de Rennes briguera bel et bien un troisième mandat en mars 2026. Et franchement, dans la capitale bretonne, plus grand monde ne pariait sur un retrait.
Mais ce qui frappe surtout, c’est la manière dont elle pose ses pions. Pas juste une candidature de plus. Non, on assiste à un alignement des planètes à gauche comme on en voit rarement en France ces temps-ci. Et croyez-moi, dans le contexte national actuel, ça mérite qu’on s’y arrête cinq minutes.
Un rassemblement historique à gauche : du jamais-vu à Rennes
Lorsque Nathalie Appéré parle d’une alliance « historique », elle n’exagère pas vraiment. Douze formations politiques ont déjà annoncé leur soutien pour 2026. Douze. Laissez-moi vous dresser le tableau, ça vaut le détour.
- Le Parti socialiste, évidemment, sa famille d’origine
- Les Écologistes (ex-EELV nouvelle version)
- Le Parti communiste français, toujours présent localement
- Génération.s de Benoît Hamon
- Place Publique de Raphaël Glucksmann
- Le Mouvement Radical, oui oui, même eux
- L’Union Démocratique Bretonne, parce qu’on est en Bretagne quand même
- Et puis des plus petits : Confluences, Horizon Commun, Nouvelle Donne, L’Après, Debout !…
Le seul absent de marque ? La France insoumise. Les relations sont fraîches depuis longtemps, et l’ancien conseiller municipal Ulysse Rabaté a déjà annoncé qu’il ferait liste à part. On reparlera de lui, il risque de piquer quelques pourcents précieux.
« Une alliance qui va de François Ruffin à Raphaël Glucksmann »
Nathalie Appéré, ravie de son coup
Quand on entend ça, on se dit que la maire sortante a réussi un tour de force. Rassembler la gauche « canal historique », les écolos nouvelle génération et même les franges les plus à gauche du spectre (hors LFI), c’est du jamais-vu depuis… disons, très longtemps. À Rennes en tout cas.
Pourquoi cette union tient (pour l’instant)
Plusieurs raisons à cela, et la première est pragmatique : en 2020, les Verts avaient fait 25 % au premier tour avec Matthieu Theurier. Sans retrait au second, l’histoire aurait pu être très différente. Tout le monde a encore ça en tête. Personne n’a envie de revivre le scénario lyonnais où la division a tout fait basculer.
Deuxième raison : le bilan. Disons-le clairement, Nathalie Appéré sort d’un deuxième mandat plutôt solide. La deuxième ligne de métro livrée (même avec des mois de retard), le centre des congrès enfin sorti de terre, le quartier EuroRennes qui change la physionomie de la ville, la piétonnisation du centre… Les dossiers avancent, même si tout n’est pas parfait, loin de là.
Troisième facteur, et pas des moindres : l’adversaire. Quand on regarde à droite, c’est le désert de Gobi. Renaissance est en perdition localement, Les Républicains cherchent encore un chef de file crédible, et le RN tente de se donner une respectabilité avec une alliance surprenante. On y vient.
La droite rennaise : le grand éclatement
Commençons par le centre-droit. Charles Compagnon, sous l’étiquette Horizon (le parti d’Édouard Philippe), a annoncé sa candidature il y a plusieurs mois. Il a même récupéré le soutien de Carole Gandon, qui portait les couleurs Renaissance en 2020. Autant dire que la macronie locale est déjà en train de se replier sur cette liste-là.
Du côté des Républicains traditionnels, Thomas Rousseau tente de maintenir la boutique ouverte. Mais soyons honnêtes : à Rennes, la droite « classique » n’a plus dépassé les 15 % depuis des lustres. Le challenge s’annonce titanesque.
L’extrême droite sort du bois… avec une alliance inattendue
Et puis il y a le cas qui fait jaser : le Rassemblement National s’est allié avec l’UDR, le microparti d’Éric Ciotti. Julien Masson portera les couleurs de cette union improbable. On a connu plus discret comme stratégie pour séduire l’électorat modéré rennais, plutôt bobo et étudiant.
Est-ce que ça peut marcher ? Franchement, j’en doute. Rennes reste une des villes les plus à gauche de France. Mais avec la montée nationale du RN et quelques sujets chauds (insécurité perçue, coût de la vie, etc.), on ne peut pas exclure une petite surprise au premier tour. 10-12 %, ce serait déjà énorme ici.
Le bilan Appéré : ce qui joue pour elle… et ce qui pourrait coincer
Onze ans à la tête d’une ville de 230 000 habitants, ça laisse des traces. Dans le bon sens du terme, d’abord : la transformation urbaine est visible à l’œil nu. La gare complètement repensée, les berges de la Vilaine réaménagées, le développement du vélo (même si certains automobilistes râlent encore), la politique culturelle ambitieuse…
Mais il y a aussi les points noirs. La propreté, souvent pointée du doigt. Le sentiment d’insécurité dans certains quartiers la nuit. Le prix du logement qui explose, même si c’est un phénomène national. Et puis cette impression, parfois, que la ville grandit trop vite pour ses habitants historiques.
Nathalie Appéré le sait. C’est pour ça qu’elle promet, dès janvier, d’« écouter les Rennais » pour finaliser son projet. Traduction : elle va remettre l’accent sur le quotidien. Transports, sécurité, propreté, pouvoir d’achat. Les sujets qui font gagner ou perdre une municipale, finalement.
2026 : une élection plus ouverte qu’il n’y paraît ?
On serait tenté de dire que c’est plié d’avance. Une gauche unie, une droite émiettée, une ville historiquement ancrée à gauche… Et pourtant. J’ai un petit doute qui persiste.
Parce que onze ans, c’est long. Parce qu’une partie des Rennais, même à gauche, pourrait avoir envie de tourner la page. Parce que l’abstention risque encore de jouer les trouble-fête. Et parce que, mine de rien, une candidature dissidente écolo ou insoumise pourrait fracturer juste assez le vote pour créer la surprise.
En 2020, Nathalie Appéré n’avait été élue qu’avec 65 % au second tour, après un premier tour à 32 %. Ce n’est pas une victoire écrasante. Si la dispersion est plus forte en 2026, tout peut arriver.
« Janvier sera le moment où je rentrerai vraiment en campagne »
Nathalie Appéré, prudente mais confiante
En attendant, la maire sortante prend son temps. Elle présentera son bilan, écoutera, ajustera. Stratégie classique, mais qui a fait ses preuves. À Rennes, on aime les maires qui durent. Edmond Hervé avait fait trente ans, remember ?
Alors oui, Nathalie Appéré part favorite. Largement. Mais dans cette ville étudiante, jeune, mouvante, rien n’est jamais totalement acquis. Surtout pas quand on vise le troisième mandat.
Rendez-vous en janvier pour le top départ officiel. D’ici là, les couteaux s’aiguisent déjà dans tous les camps. Et quelque chose me dit que la campagne rennaise 2026 va nous réserver quelques belles surprises.
Et vous, vous en pensez quoi ? Est-ce que Rennes va rester fidèle à sa maire socialiste, ou est-ce qu’on assiste aux derniers mois du « système Appéré » ? Les paris sont ouverts.
