Vous êtes-vous déjà demandé quelle région européenne faisait rêver le plus les voyageurs en ce moment ? Pas les Dolomites, pas la Toscane, ni même les fjords norvégiens. Non, en 2025, c’est la Normandie qui vient de rafler la plus belle des médailles : celle de la région la plus désirable aux yeux de centaines de milliers de passionnés de voyage. Franchement, quand j’ai vu le résultat, j’ai d’abord souri… puis j’ai réservé un week-end à Honfleur.
Parce que, soyons honnêtes, on a tous en tête une image un peu cliché de la Normandie : les vaches, la pluie, le calva. Et pourtant, quelque chose a changé. Profondément. Et ce n’est pas qu’une question de marketing.
Une victoire qui n’arrive pas par hasard
Plus de 208 000 lecteurs d’un grand magazine britannique spécialisé dans le voyage ont voté. Quatre millions et demi de suffrages au total. Et c’est la Normandie qui monte sur la plus haute marche, devant des mastodontes comme les Alpes autrichiennes ou les Açores. Autant vous dire que dans les bureaux du tourisme régional, on a débouché le cidre avant même la fin de la cérémonie à Londres.
Mais pourquoi maintenant ? Pourquoi elle ? J’ai creusé un peu, discuté avec des locaux, relu les chiffres… et la réponse est à la fois simple et vertigineuse : la Normandie a réussi à transformer son identité en une marque mondiale ultra-puissante.
L’histoire qui colle à la peau (et qui fait vendre)
On ne va pas se mentir : quand on parle de la Normandie à l’étranger, la première image qui vient, c’est le Débarquement. 1944. Omaha Beach. Saving Private Ryan. Cette mémoire-là est gravée dans le marbre de l’imaginaire collectif, surtout chez les Anglo-Saxons. Et ça, c’est un capital sympathie incroyable.
Mais il y a plus ancien encore. 1066. Guillaume le Conquérant. Hastings. La tapisserie de Bayeux – qui va d’ailleurs bientôt faire un petit tour à Londres, au grand dam de certains mais à la joie des stratèges du tourisme. Parce que pour beaucoup d’Anglais, cette période, c’est leur acte de naissance national. La Normandie, c’est un peu la mère patrie perdue. Ça crée des émotions très fortes.
« Pour les Britanniques, 1066, c’est notre 1789 à nous. Tout le monde connaît cette date. »
Un président de région particulièrement fier, lors de la remise du prix
La gastronomie qui fait taire les clichés
On a tous entendu la blague : « En Normandie, il pleut deux fois par semaine : trois jours avant et trois jours après. » Sauf que maintenant, quand les people parlent de la région, ils parlent… de beurre.
Oui, du beurre. Rappelez-vous cette séquence où une immense star internationale avoue vouloir s’installer en Normandie juste pour le beurre et le calme. Ou cet acteur british qui balance, hilare, que les seuls vrais fromages viennent de chez nous. Ça, mes amis, c’est du storytelling qui vaut tous les budgets pub du monde.
Et ça tombe bien, parce que la région enchaîne les reconnaissances officielles : l’huître normande vient d’obtenir son signe de qualité, la coquille Saint-Jacques suit le même chemin (et pourtant, tout le monde croit encore qu’elle est bretonne – 75 % de la production européenne, quand même !), le camembert, le livarot, le cidre… On est dans le saint des saints de la gourmandise.
- Beurre d’Isigny : gras, parfumé, presque addictif
- Calvados vieilli 15 ans qui vous fait oublier l’hiver
- Fromages qui puent mais qu’on adore
- Trou normand qui ressuscite les morts
- Et bientôt la coquille Saint-Jacques qui va faire mal à la Bretagne (chut)
Des paysages qui n’ont rien à envier au Sud
Étretat et ses falaises. Le Mont-Saint-Michel (bon ok, il est à la frontière, mais on le compte quand même). Les plages immenses du Cotentin. La Suisse normande. Le pays d’Auge et ses pommiers. Honfleur et son petit port de carte postale. On a tout.
Et surtout, on a ce truc que les Méditerranéens n’ont plus : de l’espace. Des prés où les vaches ont l’air heureuses. Des routes où on peut rouler sans klaxonner toutes les deux secondes. Un climat… disons « tonique » qui devient un argument avec le réchauffement. Oui, vous avez bien lu : la Normandie devient une destination climatiquement raisonnable quand le Sud grille.
La réunification : le tournant décisif
Avant 2016, on avait deux régions : Haute et Basse-Normandie. Deux identités un peu floues, deux stratégies, deux marques. Depuis la fusion, il y a une vraie dynamique. Un seul drapeau léopard partout – oui, même dans les jardins des particuliers maintenant. Une fierté qui explose.
Un récent sondage montre que 93 % des habitants sont fiers de leur région. C’est énorme. Et cette fierté, elle se voit. Elle se ressent quand vous discutez avec un serveur à Deauville ou un éleveur dans l’Orne. Il y a un élan collectif.
« Avant, on n’osait pas trop s’affirmer. C’est terminé. »
Les projets fous qui arrivent
2027 s’annonce dingue. Millénaire de la naissance de Guillaume le Conquérant. Huit pays, quinze régions invitées autour de l’épopée normande. Exposition de la tapisserie de Bayeux à Londres – et en échange, des trésors du British Museum qui viendront à Caen et Rouen. Classement UNESCO des plages du Débarquement en bonne voie.
Et puis il y a tous ces lieux qui se réinventent : le musée du Débarquement d’Arromanches boosté, le château de Caen magnifié, le Cotentin qui devient la nouvelle destination trendy, Deauville qui continue de faire rêver… Même le bocage commence à sortir de l’ombre.
Et demain ?
Le tourisme normand dépend encore beaucoup du littoral, c’est vrai. Mais la campagne intérieure commence à se réveiller. Les événements culturels comme le festival Normandie Impressionnisme (deux millions de visiteurs la dernière fois) montrent la voie. Les Anglais, les Néerlandais, les Belges, mais aussi de plus en plus d’Américains et même d’Asiatiques redécouvrent la région.
Et surtout, il y a cette idée qui flotte : la Normandie, c’est la liberté. Celle retrouvée en 44. Celle qu’on vient chercher quand on veut ralentir. Celle qu’on goûte dans une crêpe au bord de la mer quand le ciel est gris mais que, bizarrement, on se sent vivant.
Alors oui, cette première place n’est pas un hasard. C’est le fruit d’un travail de longue haleine, d’une identité retrouvée, d’une fierté retrouvée. Et quelque part, c’est aussi un formidable pied de nez à tous ceux qui pensaient que la Normandie, c’était ringard.
Personnellement ? Je n’ai jamais été aussi fier de dire que j’adore y retourner. Et vous, c’est pour quand votre prochain week-end normand ?
(Article écrit après avoir passé trois jours à arpenter le pays d’Auge en novembre – oui, il a plu, mais le camembert rôti était parfait.)
