Imaginez un peu la scène : un stade parisien qui vibre, des cris de joie qui fusent de partout, et sur le terrain, des joueurs qui ne se ressemblent pas vraiment mais qui portent le même maillot, le même rêve. Des passes précises, des tacles propres, des buts fêtés à dix, vingt, parfois dans les bras les uns des autres comme si la victoire appartenait à tout le monde. C’est exactement ce qui va se passer à l’été 2026 à Paris. Non, pas une nouvelle Coupe du Monde classique. Quelque chose de bien plus fort.
La capitale française s’apprête à accueillir la toute première Coupe du Monde de football unifié organisée hors des États-Unis. Un événement qui, mine de rien, pourrait marquer un tournant dans la façon dont on voit le sport – et surtout le foot – en France.
Quand Paris devient la capitale mondiale de l’inclusion par le ballon rond
L’annonce est tombée un lundi de novembre, presque discrètement, alors qu’on parle encore beaucoup des exploits (et des polémiques) du football traditionnel. Pourtant, ce qui arrive en juillet 2026 mérite qu’on s’y arrête longtemps. Du 2 au 12 juillet plus précisément, le stade Charléty, dans le 13e arrondissement, va accueillir 24 équipes venues du monde entier : 12 masculines et 12 féminines. Et là, attention, ce n’est pas du football ordinaire.
Le principe du football unifié ? Des équipes mixtes où les joueurs en situation de handicap intellectuel évoluent côte à côte avec des joueurs sans handicap. Pas de séparation, pas de catégorie à part. Juste du foot, ensemble. Et ça change tout.
Comment ça marche concrètement sur le terrain ?
Prenez le tournoi masculin : chaque équipe compte 17 joueurs, dont 9 en situation de handicap intellectuel et 8 valides (appelés « partenaires »). Côté féminin, c’est 11 joueuses au total, avec 6 en situation de handicap et 5 partenaires. Sur le terrain, en même temps, la règle est simple : il faut toujours un équilibre entre les uns et les autres.
Et non, ce n’est pas du « foot light ». Les matchs sont intenses, engagés, parfois même rugueux – mais toujours dans le respect. J’ai vu des vidéos des éditions précédentes à Chicago et Détroit : des frappes de loin, des dribbles chaloupés, des gardiens qui plongent. La différence ? Quand un but est marqué, toute l’équipe célèbre, peu importe qui a marqué. C’est ça, la vraie victoire.
Accueillir ces athlètes venus du monde entier, avec et sans handicap, c’est affirmer que le football peut et doit être un formidable vecteur d’égalité et de respect.
– Un dirigeant d’un grand club parisien impliqué dans le projet
L’équipe de France : du Paris FC aux établissements médico-sociaux
La sélection tricolore sera particulièrement symbolique. Les joueurs et joueuses en situation de handicap viendront d’établissements médico-sociaux franciliens affiliés au mouvement. Quant aux partenaires valides ? Ils seront issus du centre de formation d’un club professionnel parisien bien connu. Autrement dit : des jeunes pros qui vont apprendre, eux aussi, autre chose que la seule performance.
Je trouve ça beau, franchement. On parle souvent de la formation des jeunes dans le foot français, de leur mentalité parfois trop individuelle. Là, ils vont jouer pour autre chose. Pour quelqu’un d’autre. Et ça, ça forme un homme ou une femme autant que dix ans de compétition classique.
- Des joueurs pros en devenir qui découvrent le sens du collectif absolu
- Des personnes en situation de handicap qui accèdent au haut niveau
- Un staff qui doit inventer une nouvelle façon de coacher
- Des familles qui vont enfin voir leur enfant ou frère sous un autre jour
Special Olympics : bien plus qu’une association
Derrière tout ça, il y a une organisation née en 1968 aux États-Unis, qui a toujours eu une idée simple et révolutionnaire : le sport peut changer la vie des personnes porteuses de handicap intellectuel. Pas juste leur faire faire de l’activité physique. Non. Leur redonner de la dignité, de la visibilité, du rêve.
En plus de cinquante ans, ils ont organisé des milliers d’événements dans 200 pays. Et aujourd’hui, ils posent leurs valises à Paris. Après les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 qui ont déjà marqué les esprits, la France envoie un message clair : on ne veut pas juste organiser des grands événements. On veut qu’ils changent quelque chose.
Et après les JO 2024 ? L’héritage continue
On a beaucoup parlé d’héritage après Paris 2024. Des équipements, des clubs boostés, une nouvelle génération de pratiquants. Mais l’héritage le plus précieux, c’est peut-être celui-là : changer le regard. Faire en sorte que voir une personne trisomique ou autiste sur un terrain de foot pro ne surprenne plus personne.
Parce que soyons honnêtes : en 2025, on en est encore loin. Combien de clubs pros ont vraiment une section handisport active ? Combien de gamins en situation de handicap jouent dans un club lambda le mercredi après-midi ? Pas assez. Voire presque jamais.
Cette Coupe du Monde peut être le déclic. Pas juste un joli événement. Un vrai tournant.
Pourquoi Charléty, et pas le Parc ou le Stade de France ?
Bonne question. Charléty, c’est 20 000 places, une ambiance intimiste, un stade historique du sport parisien. C’est aussi un lieu qui a accueilli les Jeux paralympiques pour certaines épreuves. Il a déjà cette âme-là.
Et puis, symboliquement, c’est parfait. Pas besoin d’un mastodonte à 80 000 places pour faire passer un message fort. Parfois, la proximité compte plus que la démesure.
Ce que ça dit de notre société (et du foot)
Le foot, on le sait, c’est le sport le plus populaire au monde. Mais c’est aussi parfois le plus élitiste, le plus dur, le plus impitoyable. Là, pendant dix jours, il va montrer un autre visage. Plus humain. Plus généreux.
Et si, finalement, cette Coupe du Monde unifiée était plus « football » que certaines finales de Ligue des champions où on ne voit plus que des millions et des ego ? Je pose la question.
Le soutien de l’État à cette Coupe du monde illustre la volonté de la France de faire du sport un véritable moteur d’inclusion.
– La ministre des Sports
Des mots forts. Reste à transformer l’essai sur le terrain – et dans les mentalités.
Et nous, qu’est-ce qu’on peut faire ?
Déjà, en parler. Partager. Venir voir les matchs en juillet 2026. Emmener ses enfants. Montrer que oui, le foot peut être ça aussi.
Et pourquoi pas, un jour, créer une équipe unifiée dans son club de quartier ? Ce n’est pas si compliqué. Il suffit d’un peu de bonne volonté, de quelques éducateurs formés, et surtout de l’envie de faire autrement.
Paris 2026, ce n’est pas juste un événement. C’est peut-être le début de quelque chose de beaucoup plus grand.
Alors rendez-vous à Charléty. Pour voir du foot. Du vrai. Celui qui rassemble au lieu de diviser.
Et qui sait… peut-être que dans dix ans, on se dira que tout a commencé là, un soir d’été 2026, sous les lumières de Paris.
