Vous êtes déjà allé à Jean-Bouin un soir de match cette saison ? Moi oui, plusieurs fois. Et à chaque fois, la même claque : le stade est plein à craquer, l’ambiance bouillonne et on sent que quelque chose de rare est en train de se passer sous nos yeux. Le Paris FC, ce club qu’on présentait encore comme le « petit frère » ou le « club de l’ombre » dans la capitale, est en train de vivre une métamorphose que personne n’avait vraiment anticipée à ce point.
Guichets fermés presque systématiquement, tribunes qui chantent du début à la fin, mélange incroyable entre supporters historiques et nouveaux venus… On se régale, littéralement. Et pourtant, tout ça n’avait rien d’évident il y a encore quelques mois.
Le grand saut qui change tout
Reprenons depuis le début. L’été dernier, le Paris FC décroche enfin la montée en Ligue 1 après des années à flirter avec l’élite. Joie immense, évidemment. Mais très vite arrive la grande question : et maintenant ? Le club doit quitter Charléty, son stade historique du sud-est parisien, pour s’installer à Jean-Bouin, dans le très chic 16e arrondissement. Un déménagement qui fait grincer des dents. Trop loin pour certains habitués, trop « rugby » pour d’autres, trop chic peut-être ? Beaucoup craignaient une désaffection.
Et puis non. Pas du tout même. Dès le premier match à domicile, la surprise est totale : le stade est comble. Et ça n’a quasiment jamais cessé depuis.
Les fidèles ont suivi sans hésiter
La première raison de ce succès, c’est la fidélité incroyable du noyau dur. Ceux qui étaient là à Charléty sous la pluie, dans le froid, quand le club végétait en National ou en Ligue 2. Ces supporters-là n’ont pas réfléchi deux secondes. Jean-Bouin ? Ok, on traverse Paris, on prend le métro un peu plus longtemps, mais on suit le club. Point final.
« On a attendu ce moment toute notre vie de supporter. Un déménagement ? Franchement, on s’en fiche. Tant qu’on est ensemble et qu’on voit le PFC au plus haut niveau, le reste on gère. »
Un habitué de la tribune Capitale
Cette fidélité, elle se voit. Elle s’entend surtout. Les chants sont les mêmes qu’à Charléty, les drapeaux aussi, les fumigènes également (quand c’est autorisé). La tribune Capitale a simplement déménagé avec armes et bagages, et elle impose son rythme à tout le stade.
Le stade Jean-Bouin, un vrai coup de cœur inattendu
Il faut le dire : Jean-Bouin, c’est une réussite architecturale. Moderne, couvert, proche du Parc des Princes sans en avoir les inconvénients tarifaires ou l’aura écrasante du grand voisin. Les sièges sont confortables, la vue excellente partout, l’acoustique parfaite pour les chants. Même les plus réticents l’admettent après coup : c’est un bel outil.
Et puis il y a ce côté « village » surprenant. On arrive à pied depuis la station Porte de Saint-Cloud, on croise les supporters dans les rues tranquilles du 16e, on boit une bière sur les marches avant le match. Ça change des abords parfois plus tendus d’autres grands stades.
- Un stade à taille humaine (20 000 places environ)
- Proximité incroyable avec le terrain
- Toiture qui renvoie le son : l’ambiance est décuplée
- Accès métro directs depuis presque partout à Paris
- Tarifs encore raisonnables pour de la Ligue 1
Résultat ? Même des gens qui n’avaient jamais mis les pieds à Charléty découvrent Jean-Bouin… et reviennent.
L’effet « anti-PSG » qui fonctionne à plein
Soyons honnêtes deux minutes. À Paris, supporter le PSG peut parfois ressembler à un parcours du combattant émotionnel. Les stars, les prix exorbitants, l’impression d’être un client plus qu’un passionné… Beaucoup de supporters de foot pure jus se sont sentis un peu orphelins ces dernières années.
Le Paris FC arrive au bon moment avec la bonne proposition : du foot de haut niveau, mais avec une âme de club. Des joueurs accessibles, un président qui parle aux supporters, des prix qui ne ruinent personne, une ambiance familiale et populaire. Pour beaucoup de Parisiens, c’est le retour à quelque chose qu’ils pensaient perdu.
J’ai discuté avec un père de famille du 15e qui venait pour la première fois : « Avec mes deux fils, au Parc on paye 300 euros pour être loin du terrain et se faire insulter si on ose critiquer. Ici, 90 euros pour trois places en latérale, on voit tout, on participe, les gamins adorent. On reviendra. » Cette phrase résume tout.
Les nouveaux fans : qui sont-ils vraiment ?
On les croise partout dans le stade maintenant. Des jeunes du 92 ou du 93 qui n’avaient jamais eu « leur » club à Paris. Des étudiants étrangers qui découvrent la Ligue 1 autrement qu’à la télé. Des familles entières du 16e ou de Neuilly qui se mettent au foot parce que c’est devenu « the place to be » le week-end.
Et puis il y a les déçus du PSG, bien sûr. Pas forcément des ultras, mais des supporters lambda qui en ont marre de payer toujours plus cher pour voir parfois un spectacle décevant. Ils viennent tester « l’autre club parisien »… et restent.
« Je suis parisien depuis toujours, j’ai mon abonnement au Parc depuis 15 ans. Cette année, j’ai pris aussi la carte Paris FC. Et franchement, je me sens revivre au foot. »
Cette diversification du public est fascinante. On passe d’un supporteriat très « populaire et local » à Charléty à un mélange social beaucoup plus large. Et ça fonctionne. Parce que tout le monde se retrouve dans les valeurs affichées par le club : proximité, combativité, plaisir.
L’effet sportif : quand les résultats suivent
Évidemment, tout ça ne serait pas possible sans un minimum de résultats. Le Paris FC n’est pas venu en Ligue 1 pour faire de la figuration. Les joueurs mouillent le maillot, l’équipe joue, propose, surprend parfois les gros. Cette saison, on a vu des victoires de prestige, des matchs accrocheurs, du spectacle.
Et quand tu gagnes ou que tu tiens tête à des cadors dans un stade plein qui te porte, ça crée une spirale positive terrible. Les joueurs le disent eux-mêmes après les matchs : l’ambiance à Jean-Bouin leur donne des ailes.
Même le Stade Français en profite (un peu)
Petit clin d’œil amusant : le colocataire rugby, le Stade Français, voit aussi son affluence repartir à la hausse certains week-ends. L’effet d’émulation fonctionne dans les deux sens. Le stade vit enfin à plein régime, presque tous les week-ends, que ce soit en bleu et blanc ou en rose.
On est loin des années où Jean-Bouin sonnait parfois creux même pour les grands matchs de rugby. Aujourd’hui, c’est devenu une vraie place forte du sport parisien.
Et demain ?
La grande question maintenant, c’est la suite. Le Paris FC va-t-il réussir à pérenniser ce phénomène ? Le club travaille déjà sur l’augmentation de la capacité d’accueil (on parle de projets pour pousser vers 25 000 places). La billetterie est en train de passer au niveau supérieur, avec des abonnements qui partent en quelques heures.
Mais l’essentiel est ailleurs. Ce que vit le Paris FC cette saison, c’est la naissance d’une vraie identité populaire dans une ville qui en manquait cruellement. Un club qui grandit avec son public, un public qui grandit avec son club. C’est beau, c’est rare, et franchement ça fait du bien au foot français.
Alors si vous n’avez pas encore tenté l’expérience Jean-Bouin, faites-le. Parce que oui, on se régale. Et quelque chose me dit que ce n’est qu’un début.
PS : Le jour où le Paris FC remplira le Parc des Princes pour un derby… ce jour-là, Paris aura vraiment deux grands clubs. Et quelque chose me dit qu’on n’est pas si loin.
