Vous est-il déjà arrivé de penser que le danger, le vrai, pouvait surgir en quelques secondes à peine ? Pas dans un film, pas dans un jeu vidéo, mais en pleine rue, un samedi soir d’hiver, quand la neige commence tout juste à tomber. C’est exactement ce qui s’est produit à Sarcelles, sur cette longue avenue de la Division-Leclerc que tout le monde connaît dans le coin.
Un équipage de police, en intervention banale au départ, se fait littéralement couper en deux par une voiture lancée à pleine vitesse. Le choc est si violent que les deux conducteurs restent coincés dans leur habitacle. Et là, en quelques minutes, une soirée qui aurait pu se terminer autour d’un café chaud bascule dans le drame.
Un accident qui aurait pu être évité ?
Reprenons depuis le début. On est samedi soir, il fait nuit, la température frôle zéro degré. Les premiers flocons commencent à coller au pare-brise. Les policiers sont appelés pour un accident classique : un conducteur en état d’ivresse qui a fini dans le décor. Rien d’exceptionnel pour eux. Ils roulent, cherchent l’endroit exact, probablement concentrés sur leur GPS ou sur la radio.
Pendant ce temps, un autre automobiliste arrive derrière eux. Il veut dépasser. Peut-être qu’il roule un peu trop vite, peut-être qu’il n’a pas vu les gyrophares à cause de la neige qui réduit la visibilité. Toujours est-il qu’il se rabat brutalement. Le choc est latéral, extrêmement violent. Le genre de collision où la voiture de police fait presque un tête-à-queue avant de s’immobiliser.
Quand on voit les images qu’on imagine – parce qu’évidemment, personne n’a filmé –, on se dit que c’est un miracle qu’il n’y ait pas eu plus de victimes. Le véhicule sérigraphié est méconnaissable sur un côté. Les pompiers doivent sortir les grands moyens : pinces hydrauliques, désincarcération longue et délicate.
Un policier entre la vie et la mort
Le conducteur du véhicule de police est le plus gravement touché. Il perd connaissance immédiatement après l’impact. Les secours le placent en urgence absolue. Direction l’hôpital Beaujon à Clichy, celui qu’on réserve aux cas les plus sérieux. À l’heure où j’écris ces lignes, on me dit que ses jours ne seraient plus en danger, mais franchement, quand on entend « urgence absolue » et « perte de connaissance », on sait que ça a été moins une.
Dans la voiture, deux autres fonctionnaires sont blessés, mais plus légèrement. Ils sont transportés à Gonesse et à Eaubonne en urgence relative. Deux autres personnes impliquées, elles, repartent chez elles sans être prises en charge médicalement. Le hasard des places dans la voiture, parfois, change tout.
Quand tu portes l’uniforme, tu sais que le danger peut venir d’une intervention qui tourne mal. Mais se faire percuter alors que tu roules simplement pour aller aider quelqu’un… là, c’est dur à avaler.
– Un policier expérimenté du Val-d’Oise
L’automobiliste en garde à vue : que risque-t-il ?
L’homme qui conduisait l’autre véhicule a lui aussi dû être désincarcéré. Une fois extrait, direction le commissariat. Garde à vue immédiate. Les enquêteurs vont maintenant déterminer les circonstances exactes : vitesse, alcool, stupéfiants, téléphone ? Tout est sur la table.
Ce qui est sûr, c’est que la qualification pénale peut être lourde. Blessures involontaires avec incapacité totale de travail supérieure à trois mois, aggravées par deux circonstances : la vitesse et peut-être les conditions météo non adaptées. On parle potentiellement de plusieurs années de prison et d’une suspension longue du permis.
- Conduite sans maîtrise par excès de vitesse
- Manoeuvre de dépassement dangereuse
- Non-respect des distances de sécurité
- Conduite sous l’empire d’un état alcoolique ou de stupéfiants (à confirmer)
- Blessures involontaires aggravées
Et puis il y a la dimension symbolique. Frapper des policiers en service, même involontairement, ça ne passe jamais inaperçu. Les syndicats de police ne vont pas tarder à réagir, attendez-vous à des communiqués musclés dans les prochaines heures.
La neige, ce facteur qu’on oublie trop souvent
Je vis dans le coin depuis pas mal d’années. Je sais très bien que dès que les premiers flocons tombent, c’est la panique sur les routes du 95. Les pneus été, les vitesses de croisière à 90 km/h sur des routes secondaires, les distances de sécurité qui fondent comme neige au soleil… On dirait que chaque année, c’est la surprise.
Ce soir-là, la vigilance orange neige-verglas était activée. Les prévisionnistes annonçaient jusqu’à 7 cm localement. Et pourtant, certains conducteurs continuent de rouler comme en plein mois de juillet. Résultat : des accidents en cascade, et parfois, des drames comme celui-ci.
Il y a quelque chose de profondément injuste à se dire qu’un policier qui part aider quelqu’un finit à l’hôpital à cause d’une imprudence liée à la météo. On parle beaucoup de la violence ciblée contre les forces de l’ordre, mais cette violence « passive », celle de l’inattention ou de l’excès de confiance, elle fait aussi des ravages.
Sarcelles, une ville sous tension permanente ?
On ne va pas se mentir : Sarcelles, ces dernières années, traîne une image compliquée. Caillassage du maire, tensions communautaires, trafics en tout genre… Et maintenant, un policier grièvement blessé en intervention. Certains vont vite faire le lien, parler d’une ville « à feu et à sang ». Moi, je pense que c’est plus nuancé que ça.
Cet accident n’a rien de communautaire ou de politique. C’est un drame routier, point. Mais il tombe dans un contexte où chaque fait divers est immédiatement sur-interprété. Et ça, c’est fatiguant pour tout le monde : les habitants qui en ont marre qu’on parle de leur ville seulement quand ça va mal, et les policiers qui aimeraient juste faire leur boulot sans finir à l’hôpital.
Et maintenant ?
L’enquête va durer plusieurs mois. Les expertises automobiles, les analyses toxicologiques, les témoignages… Tout ça va prendre du temps. En attendant, le policier blessé va devoir se reconstruire. Physiquement d’abord, psychologiquement ensuite. Parce que reprendre le volant après ça, croyez-moi, ce n’est pas évident.
Quant à nous, simples citoyens, peut-être que cet accident peut servir de piqûre de rappel. La prochaine fois qu’on prend le volant alors que la neige tombe, qu’on baisse un peu la vitesse. Qu’on se dise que derrière chaque gyrophares, il y a des hommes et des femmes qui risquent leur vie pour nous protéger. Même quand ils roulent simplement pour aller sur une intervention.
Parce qu’au final, la sécurité routière, ce n’est pas qu’une affaire de gendarmes verbalisateurs. C’est une responsabilité collective. Et ce soir-là, à Sarcelles, on vient de le payer très cher.
Prenez soin de vous sur la route. Vraiment.
