Il y a des courses qui dépassent le simple enjeu sportif. Des moments où le chronomètre passe presque au second plan, où chaque foulée semble porter une histoire, un souvenir, une personne. Vendredi 28 novembre à Vincennes, le Quinté du jour pourrait bien être l’un de ces instants rares. Parce qu’au sulky de Job des Louanges, Christophe Flirden ne va pas seulement tenter de décrocher une belle place : il va essayer de rendre l’hommage le plus beau qui soit à Jean Boillereau.
Vous savez, ces liens qui se tissent dans le monde du trot, parfois, ils sont plus forts que tout.
Un entraîneur discret qui mérite qu’on parle de lui
Installé à Vichy, loin des projecteurs parisiens, Christophe Flirden fait partie de ces professionnels qu’on croise rarement en une des journaux spécialisés, mais qui bossent avec une passion intacte. Dix chevaux à l’écurie actuellement – « le plus gros effectif que j’aie jamais eu », confie-t-il avec une pointe de fierté. Lui, il a toujours préféré la qualité à la quantité. Et quand on regarde son palmarès, on comprend vite pourquoi.
Dans le lot, il y avait autrefois Objectif Royal. Dix-neuf victoires, presque un demi-million d’euros de gains. Un crack. Et derrière la plupart de ces succès, un driver : Jean Boillereau. Les deux hommes formaient un duo en or. Des après-midi de gloire, des soirées à refaire la course autour d’un café, des rêves devenus réalité.
Puis le destin a frappé. Jean Boillereau nous a quittés. Trop tôt. Et depuis, chaque fois que Christophe Flirden attelle un bon cheval, il y a ce petit pincement au cœur. Cette envie de bien faire. Pour lui.
« Jean, c’était plus qu’un driver. C’était un ami, un complice. Quand je vois Job des Louanges, je pense forcément à tout ce qu’on a vécu avec Objectif Royal. »
Christophe Flirden
Job des Louanges, le cheval du souvenir
À 7 ans, Job des Louanges n’est plus un jeunot, mais il reste un trotteur sérieux. Régulier, appliqué, capable de finir ses courses en boulet de canon quand la piste est pénible – ce qui risque d’être le cas vendredi soir à Vincennes en plein mois de novembre.
Christophe Flirden ne s’en cache pas : son cheval arrive en pleine possession de ses moyens. Les dernières sorties sont convaincantes, la forme est là, et surtout, il y a cette motivation supplémentaire qui ne s’explique pas dans les programmes.
- Récemment deuxième sur une piste lourde, exactement les conditions annoncées vendredi
- Déferré des quatre pieds, configuration où il donne souvent le meilleur
- Numéro correct derrière les ailes de la voltige, pas de panique au départ
- Christophe Flirden au sulky : quand le patron drive lui-même, c’est rarement anodin
Franchement, quand on additionne tout ça, on se dit que le cheval a une très belle carte à jouer. Peut-être pas le favori des masses, mais clairement un outsider qui peut créer la surprise. Ou plus.
Vincennes en hiver, l’endroit où naissent les légendes
Il y a quelque chose de magique à Vincennes quand l’hiver s’installe. Les lumières qui percent le brouillard, le bruit des sabots sur la cendrée, l’odeur de la piste humide. C’est rude, c’est exigeant, mais c’est là que se révèlent les vrais guerriers.
Job des Louanges connaît la musique. Il a déjà brillé sur ce tracé. Il sait ce que c’est que de se battre jusqu’au poteau avec 2700 mètres dans les jambes. Et vendredi, il aura un driver qui ne lâchera rien. Parce que ce n’est pas qu’une course. C’est un peu plus.
Je ne vais pas vous dire que c’est gagné d’avance – dans le trot, on sait tous que tout peut basculer en un tour de roue. Mais je peux vous dire une chose : si Job des Louanges passe le poteau en tête, il y aura des larmes dans le rond de présentation. Pas seulement celles de Christophe Flirden.
Pourquoi ce Quinté est particulier
Dans notre milieu, on parle souvent technique, stratégie, déferrage, musique. Et c’est normal. Mais parfois, il y a des histoires humaines qui transcendent tout ça. Ce vendredi, c’est l’une d’elles.
Un entraîneur qui refuse la course à l’effectif XXL pour rester proche de ses chevaux. Un driver disparu qui continue d’inspirer. Un trotteur honnête qui porte sur ses épaules bien plus que son seul jockey.
Alors oui, il y aura des favoris plus médiatisés, des écuries plus prestigieuses, des noms qu’on voit partout. Mais moi, je vais suivre Job des Louanges avec une attention particulière. Parce que le sport, c’est aussi ça : des émotions brutes, des hommages silencieux, des victoires qui veulent dire quelque chose.
« Si on peut lui offrir une belle performance, ce sera le plus bel hommage que je puisse rendre à Jean. »
Cette phrase, Christophe Flirden l’a murmurée récemment. Et quelque part, elle résume tout.
Mon avis personnel ?
Je ne suis pas du genre à enfoncer des portes ouvertes, mais là, je le sens bien. Vraiment bien. Job des Louanges n’a pas la cote qu’il mérite dans les pronostics. Trop discret, peut-être. Pas assez clinquant. Mais sur une piste lourde, avec un driver qui va tout donner pour une cause qui le dépasse, il peut créer un sacré joli coup.
Après, vous faites ce que vous voulez avec votre jeu. Moi, je sais où je mettrai quelques euros vendredi soir. Pas seulement pour gagner. Pour que l’histoire soit belle.
Parce que parfois, dans ce monde du trot où tout va vite, il est bon de se rappeler pourquoi on aime ça. Pas seulement les gros lots ou les triples. Mais les hommes, les chevaux, les souvenirs.
Alors rendez-vous vendredi à Vincennes. Sous les lumières. Sur la cendrée. Avec Job des Louanges qui, peut-être, va nous faire vivre une de ces soirées qu’on n’oublie jamais.
Et si jamais il gagne… eh bien, levez votre verre. À Jean Boillereau. Il le méritera.
(Article écrit avec le cœur, comme on aime les belles histoires de trot. Bonne course à tous.)
