Vous êtes déjà monté dans le métro parisien un matin de janvier, les joues encore rouges du froid, et vous êtes tombé sur une affiche qui vous a fait sourire… ou hausser les sourcils ? C’est exactement ce qui va arriver début 2026 à des milliers de Franciliens.
Imaginez : une immense photo de la Pointe du Raz sous une tempête dantesque, des vagues qui explosent sur les rochers, un phare qui défie les éléments. Et en gros, ce slogan qui claque : « Raz le bol du ski ? Changez d’hiver en Finistère. » Avouez que ça fait mouche. Ou que ça énerve prodigieusement, selon qu’on vend des forfaits de ski ou des balades iodées.
Quand la Bretagne déclare (gentiment) la guerre à la montagne
Parce que oui, c’est bien une petite guerre touristique qui a éclaté ces derniers jours. D’un côté, l’agence d’attractivité du Finistère qui dégaine une campagne audacieuse. De l’autre, certains professionnels de la montagne qui crient au scandale. Et au milieu, nous, les vacanciers, qui nous demandons si on va vraiment troquer nos après-skis contre des bottes Aigle.
Franchement, j’ai trouvé l’idée géniale. Enfin une destination qui ose dire tout haut ce que beaucoup pensent tout bas quand les stations sont bondées, les prix exorbitants et la neige parfois capricieuse : et si on changeait complètement de décor ?
Un jeu de mots qui fait mal… ou qui fait rire
Le génie – ou la provocation, c’est selon – tient dans ce simple jeu de mots. « Raz le bol » au lieu de « ras-le-bol ». Un clin d’œil à la Pointe du Raz et au raz de Sein, ces coins mythiques où la mer montre les dents. Les images sont magnifiques : Ouessant balayée par le vent, le phare du Créac’h dans la brume, des falaises qui donnent le vertige autrement que sur des pistes damées.
Le message est clair : l’hiver, il n’y a pas que la montagne qui offre des sensations fortes. Il y a aussi cette Bretagne sauvage, vivifiante, où l’on marche pendant des heures sans croiser personne, où l’on respire à pleins poumons, où l’on revient changé.
« On ne propose pas du tout la même chose. Aller se balader à Ouessant en famille sous le vent, ça n’a rien à voir avec le ski. »
Le directeur de l’agence d’attractivité du Finistère
La montagne riposte sur les réseaux
Mais tout le monde n’a pas le sens de l’humour breton. Sur les réseaux professionnels, ça a chauffé sévère. Un directeur de tourisme savoyard a parlé de « fair-play assez limité ». Un autre a ironisé sur les Bretons « frustrés » par l’attractivité des Alpes. On a même vu des commentaires du style « Le Finistère en hiver ? Ha non merci ! ».
Puis il y a eu ceux qui ont défendu la campagne bec et ongles. Des directeurs d’offices de tourisme alpins qui ont trouvé l’idée « particulièrement bien pensée et originale ». Des Bretons, évidemment, qui ont rappelé qu’on n’était pas des ploucs restés coincés sous la pluie.
Le débat a duré des jours. C’était presque comique de voir des pros du tourisme se crêper le chignon (ou le bonnet) sur la meilleure façon de vendre l’hiver.
Pourquoi cette campagne tombe à pic (même si le timing est discutable)
Il faut comprendre le contexte. Depuis la pandémie, le Finistère explose en termes de fréquentation. Le tourisme représente aujourd’hui 20 000 emplois directs et 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. Et surtout, l’hiver devient une saison de plus en plus importante.
- Les vacanciers recherchent des destinations moins bondées
- Les prix flambent dans les stations de ski
- Le télétravail permet de prolonger les séjours
- La quête d’authenticité et de nature brute est plus forte que jamais
Résultat ? Les vacances d’hiver représentent désormais 10 % de la fréquentation annuelle dans le département. C’est énorme pour les restaurateurs, les hébergeurs, les commerçants qui bouclaient difficilement leurs comptes autrefois.
La campagne, qui sera visible dans 200 stations de métro parisien du 5 au 11 janvier, arrive pile quand les gens réservent leurs vacances de février. Coïncidence ? Peut-être. Coup marketing ? Sûrement.
Et si on arrêtait de se battre pour des parts de gâteau ?
Ce qui m’interpelle le plus dans cette polémique, c’est qu’elle révèle une vision un peu dépassée du tourisme. Comme si on devait forcément choisir son camp : montagne ou mer, ski ou tempête, raclette ou crêpes.
Pourquoi ne pas voir ça comme une complémentarité ? Il y a des familles qui iront une année à la montagne et l’année suivante en Bretagne. Il y a ceux qui enchaîneront Noël au ski et le Nouvel An face à l’océan. Il y a de la place pour tout le monde.
« Il devrait y avoir de la place pour tout le monde entre Noël et les vacances d’hiver. C’est une concurrence saine qui ne propose pas du tout les mêmes choses. »
Et franchement, il a raison. Comparer une descente de piste noire avec une marche sur la grève de la Torche un matin de janvier, c’est comme comparer des huîtres et du reblochon. Les deux sont excellents, mais pas pour les mêmes papilles.
L’hiver en Finistère, c’est quoi concrètement ?
Si l’idée vous titille, voilà à quoi ressemble vraiment un hiver dans le Finistère (et pourquoi de plus en plus de gens craquent) :
- Des côtes totalement désertes où l’on marche des heures sans voir âme qui vive
- Des tempêtes spectaculaires (en restant prudent, évidemment)
- Des phares visitables et des guides passionnés
- Des prix d’hébergement souvent divisés par deux hors saison
- Des restaurants qui proposent des menus spéciaux « hiver » avec des produits ultra-frais
- Des festivals (Lumière d’hiver à Brest, par exemple)
- La possibilité de voir des phoques sur les côtes
Personnellement, j’ai passé un février à Crozon il y a deux ans. Je me souviens encore de cette lumière rasante sur la mer, de ce silence absolu, de cette sensation d’être au bout du monde. C’était… régénérant. Vraiment.
La montagne a-t-elle vraiment du souci à se faire ?
Soyons honnêtes : non. Les stations de ski remplissent toujours. Les familles continuent de réserver dès l’ouverture des domaines. Le ski reste une valeur sûre, un rite pour beaucoup.
Mais ce qui change, c’est que l’offre s’élargit. Les gens veulent autre chose. Ils veulent des expériences différentes. Et le Finistère, avec son humour et son culot, vient juste rappeler qu’il existe.
Cette campagne ne va pas vider les Alpes. Elle va juste faire réfléchir certains. Et peut-être convertir quelques-uns. Ce qui est plutôt sain, non ?
Le mot de la fin
Au final, cette petite tempête dans un verre d’eau de mer (ou de vin chaud) aura au moins eu le mérite de faire parler du tourisme hivernal autrement. Et c’est déjà une victoire.
Alors, cet hiver, vous prendrez bien un peu de raz-de-marée avec votre bol d’air ? Ou vous resterez fidèle à vos pistes damées ? Dites-le moi en commentaire, je suis curieux de savoir de quel côté penche votre cœur quand février arrive.
Quoi qu’il en soit, une chose est sûre : en 2026, l’hiver français ne sera plus tout à fait comme avant. Et c’est plutôt une bonne nouvelle.
