Chaque été, quand les écoles ferment leurs portes, les centres aérés s’animent. Mais derrière les rires des enfants et les jeux en plein air, une question taraude les responsables municipaux : où sont passés les animateurs ? Depuis quelques années, recruter des animateurs périscolaires relève du parcours du combattant. Entre exigences réglementaires, salaires peu attractifs et attentes élevées, les communes peinent à trouver des candidats à la hauteur. Alors, le Bafa et un casier judiciaire vierge suffisent-ils pour encadrer nos enfants, ou faut-il repenser tout le système ?
Une crise de recrutement qui s’aggrave
Depuis la crise sanitaire, le secteur de l’animation périscolaire traverse une tempête. Une étude récente révèle qu’en 2023, près d’une collectivité sur deux a rencontré des difficultés pour pourvoir ses postes d’animateurs. Pourquoi ce désintérêt ? Les raisons sont multiples, et elles touchent autant les conditions de travail que les attentes des nouvelles générations. J’ai toujours pensé que l’animation était un métier passion, mais force est de constater que la passion ne suffit plus à remplir les rangs.
Les jeunes d’aujourd’hui cherchent des emplois stables et mieux rémunérés. L’animation, c’est souvent vu comme un job d’été, pas une carrière.
– Responsable municipal anonyme
Des salaires qui freinent l’enthousiasme
Le salaire d’un animateur périscolaire n’a rien de mirobolant. Avec un taux horaire souvent proche du minimum légal, il est difficile de rivaliser avec d’autres secteurs. Prenons l’exemple d’un job dans la grande distribution : un mi-temps dans un supermarché peut rapporter plus qu’un poste d’animateur à temps partiel. Ajoutez à cela des contrats souvent précaires, avec des horaires morcelés, et on comprend pourquoi les candidats se font rares.
- Salaires faibles : souvent proches du SMIC, peu compétitifs face à d’autres secteurs.
- Horaires fragmentés : matin, midi, soir, parfois seulement quelques heures par jour.
- Contrats courts : jobs saisonniers ou à temps partiel, sans perspective d’évolution.
Pour beaucoup, l’animation est perçue comme un tremplin, pas une destination. Et quand on sait que les responsabilités sont lourdes – encadrer des enfants, garantir leur sécurité, proposer des activités éducatives –, on se demande pourquoi le métier n’est pas mieux valorisé.
Le Bafa : un sésame indispensable, mais limité
Le Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur (Bafa) reste une condition sine qua non pour travailler dans l’animation périscolaire. Ce diplôme, accessible dès 17 ans, forme les candidats à encadrer des groupes d’enfants dans des contextes variés. Mais est-il suffisant ? Pas vraiment. Si le Bafa garantit un socle de compétences, il ne couvre pas tout. Gérer des conflits, répondre aux besoins spécifiques d’enfants en situation de handicap ou encore concevoir des activités éducatives demande bien plus qu’une formation de quelques semaines.
Et puis, il y a la question du coût. Obtenir le Bafa peut coûter plusieurs centaines d’euros, un investissement que beaucoup de jeunes hésitent à faire pour un métier aussi peu rémunérateur. Résultat : le vivier de candidats se réduit, et les communes doivent parfois se contenter de profils moins qualifiés.
| Critère | Exigence | Réalité |
| Formation | Bafa obligatoire | Formation coûteuse, parfois insuffisante |
| Casier judiciaire | Vierge requis | Garantie de sécurité, mais ne mesure pas les compétences |
| Expérience | Souvent souhaitée | Peu de candidats expérimentés disponibles |
Le casier judiciaire vierge, autre prérequis incontournable, est une garantie de sécurité, mais il ne dit rien des aptitudes pédagogiques ou de l’engagement d’un animateur. On pourrait presque comparer ça à un permis de conduire : c’est nécessaire, mais ça ne fait pas de vous un bon conducteur.
Pourquoi les jeunes boudent-ils l’animation ?
Les jeunes, qui formaient autrefois le cœur du recrutement, se tournent vers d’autres horizons. J’ai discuté récemment avec une ancienne animatrice, qui m’a confié avoir abandonné le métier pour un poste dans la logistique. « C’était plus simple, mieux payé, et moins de responsabilités », m’a-t-elle dit. Difficile de lui donner tort. Les nouvelles générations privilégient la stabilité et des revenus immédiats, deux choses que l’animation peine à offrir.
Les animateurs doivent être des couteaux suisses : pédagogues, créatifs, patients… mais sans la reconnaissance qui va avec.
– Formateur en animation
Les communes tentent de s’adapter. Certaines offrent des primes, d’autres misent sur des formations internes pour pallier le manque d’expérience. Mais ces solutions restent des pansements sur une plaie plus profonde : le manque de valorisation du métier.
Des solutions pour sortir de l’impasse
Face à cette crise, plusieurs pistes émergent pour rendre le métier d’animateur plus attractif. Voici quelques idées qui font leur chemin :
- Revalorisation salariale : Augmenter les salaires et proposer des contrats plus stables pour attirer des candidats qualifiés.
- Formations subventionnées : Rendre le Bafa plus accessible en prenant en charge une partie des coûts pour les jeunes.
- Parcours professionnels : Créer des perspectives d’évolution, comme des postes de coordinateurs ou de formateurs.
- Communication positive : Mettre en avant l’impact social du métier pour séduire ceux qui cherchent du sens dans leur travail.
Certaines municipalités ont déjà commencé à expérimenter. Par exemple, offrir des primes exceptionnelles ou des avantages comme des logements temporaires pour les animateurs saisonniers. Mais ces initiatives restent rares, et leur impact est encore limité. Ce qui manque, c’est une véritable stratégie nationale pour redonner ses lettres de noblesse à ce métier essentiel.
Et les enfants dans tout ça ?
Le plus inquiétant, c’est l’impact sur les enfants. Un animateur mal formé ou peu motivé peut transformer une expérience éducative en simple garderie. À l’inverse, un bon animateur peut marquer une vie. J’ai moi-même un souvenir ému d’un animateur qui m’a appris à faire du théâtre quand j’étais gamin. Ces moments-là, ça compte. Mais avec la pénurie actuelle, les communes risquent de baisser leurs exigences, au détriment de la qualité des activités proposées.
Et si on voyait cette crise comme une opportunité ? Repenser le recrutement, valoriser les animateurs, investir dans leur formation : autant de leviers pour bâtir un système plus solide. Après tout, ne dit-on pas que l’éducation commence là où l’école s’arrête ?
Un bon animateur, c’est quelqu’un qui donne aux enfants l’envie d’apprendre, de créer, de grandir. Mais pour ça, il faut qu’on leur donne les moyens de réussir.
– Parent d’élève
Un défi à relever ensemble
La crise du recrutement des animateurs périscolaires n’est pas une fatalité. Elle demande un effort collectif : des communes, des pouvoirs publics, mais aussi de la société tout entière. Car au bout du compte, ce sont nos enfants qui en bénéficieront. Alors, pourquoi ne pas commencer dès maintenant à repenser ce métier ? Donner aux animateurs les moyens de s’épanouir, c’est investir dans l’avenir. Et franchement, qui pourrait dire non à ça ?
En attendant, les centres aérés continuent de tourner, parfois à bout de souffle. Mais une chose est sûre : sans animateurs compétents et motivés, c’est tout un pan de l’éducation qui risque de s’essouffler. À nous de faire en sorte que ça change.
